Devant l’OIT : La CGTM réchauffe une plainte contre le gouvernement

14 June, 2018 - 04:13

La Confédération Générale des Travailleurs de Mauritanie (CGTM), une des plus importantes centrales syndicales du pays, n’est pas convaincue par les avancées du gouvernement dans la mise en œuvre d’une feuille de route visant à mettre le pays  aux normes mondiales, dans le délicat domaine du travail. Constatant l’absence  d’une réelle  volonté de rompre avec certaines pratiques à la peau dure, le syndicat a donc décidé, sous la houlette d’Abdallahi ould Mohamed, dit Nahah,  de traîner à nouveau le gouvernement devant les instances internationales, notamment la Commission de la liberté syndicale de l’Organisation Internationale duTravail (OIT).

En remettant en selle une plainte qu’elle avait retirée, la CGTM entend ainsi dénoncer l’absence de progrès  dans «la  lutte contre l’esclavage et ses séquelles, l’abolition du travail des enfants et les questions de représentativité syndicale ». Le dépôt initial de la plainte, dont la relance est annoncée par un communiqué publié au cours du week-end dernier, avait été à l’origine d’une mission du Bureau International du Travail (BIT)  à Nouakchott, au mois de Janvier 2017. Une visite à l’issue de laquelle les parties concernées avaient trouvé un accord autour d’une feuille de route, amenant la centrale syndicale à geler sa doléance.

La décision de la CGTM de la réchauffer intervient après la signature, entre l’État mauritanien, la Confédération Syndicale Internationale (CSI) et plusieurs centrales syndicales mauritaniennes affiliées à celle-ci, d’un accord  sur la question du travail forcé, de la lutte contre les séquelles de l’esclave et  la représentativité syndicale. Parmi les centrales signataires de l’accord dénoncé, figure, notamment, l’Union des Travailleurs de Mauritanie (UTM), historiquement proche de tous les pouvoirs. Cette  démarche est catégoriquement rejetée par les camarades de Nahah. Dans un communiqué rendu public  au cours du week-end, ils estiment que les parties signataires du récent accord de Genève « ont fini de concéder, au gouvernement,  l’avantage de pouvoir continuer  à violer la liberté syndicale et les droits des travailleurs à choisir librement  leurs délégués du personnel et leurs représentants, pour entamer des négociations sociales dans le pays ».

Dans l’optique de la CGTM, le récent épisode de Genève est perçu comme « une récompense à un gouvernement qui n’a pas été à la hauteur de ses engagements, dans la mise en œuvre de la feuille de route qu’il avait signée avec les organisations syndicales affiliées à la CSI, sous les auspices du BIT, en Mars 2017, et qui devait être clôturée en Novembre de la même année ». Poursuivant son réquisitoire, la CGTM signale que  « le nouvel accord relatif à la question du travail forcé et la lutte contre les séquelles de l’esclavage  en Mauritanie est très en deçà de celui déjà accepté par le gouvernement mauritanien, lors des différentes discussions  que la commission des normes du BIT avait tenues avec les partenaires ».

« Sur la question du travail des enfants, l’accord signé récemment n’apporte rien de nouveau non plus. Si la Mauritanie a déjà accepté et élaboré son plan et programme de lutte contre ce phénomène,  le gouvernement n’a jamais accepté d’y mettre une seule ouguiya du budget de l’État et se contente d’attendre que  la Communauté internationale le finance», écrit la CGTM. En dépit de la signature formelle de l’accord,  les autorités refusent ainsi de contribuer au démarrage du projet. Sans le nerf de la guerre, quel espoir de solution à des problèmes aussi sérieux peut-on donc  entretenir ? Le recours judiciaire paraît effectivement inéluctable…

Seck Amadou