Calamités…. Calamités…. Calamités…

8 September, 2016 - 03:56

Depuis quelques temps, nombre d’affaires, plus rocambolesques les unes que les autres, secouent le pays. Il y a eu le déguerpissement de la Gazra Bouamatou et ses effets collatéraux dont l’emprisonnement de 3 à 15 ans d’onze membres d’IRA. Il y a eu le scandale de la SONIMEX, une histoire de blanchiment de milliers de tonnes d’engrais en milliards d’ouguiyas, où l’Inspection Générale d’Etat « peine » à situer les responsabilités. Mais, si l’Etat se résout à remonter la filière, il est fort probable que les deux milliards dont on parle ne soient que la partie émergée d’un colossal iceberg de malversations qui remontent aux années 80, partant des crédits agricoles à l’avènement de la subvention/ventes des engrais et intrants où l’abcès a crevé. Il y a eu les affaires de la mairie de Nouadhibou, l’affaire Macina et consorts, les affaires des comptables de diverses ambassades et des fonctionnaires du Trésor, et, encore, la SOMELEC et ses indélicats caissiers. C’est tout ? Auriez-vous oublié les affaires de drogue dont la plus emblématique semble être celle où sont impliqués au moins deux fils d’un ancien président ? L’affaire de la balle assassine qui a handicapé une jeune fille à vie ? L’affaire de la mandarine qui faillit coûter la vie à un pauvre « toujours debout » dans une épicerie ? L’affaire de la chaussure de Cheikh Baye, lancée à la figure du porte-parole du Gouvernement ? Les arrestations intempestives des activistes du Mouvement Mani Chari Gasoil ? L’affaire de cette voiture de la Garde nationale bondée de caisses de vin, avec, à bord, le fils d’un général ? Il y a eu le mécontentement des gens de Bougseiss, dans l’arrondissement de Male, qui a conduit à des émeutes populaires qui n’auront épargné ni le hakem, ni ses gardes, ni même le drapeau national. Bien sûr que des choses comme ça sont arrivées ailleurs et partout dans le vaste monde. Parfois, même, des choses plus graves et quotidiennes. Mais ce qui n’est pas ordinaire, c’est la manière avec laquelle telle affaire ou telle autre est traitée par les services de notre justice nationale. Il y a un peu plus d’un an, l’ancien bâtonnier des avocats, maître Ahmed Salem ould Bouhoubeïni la qualifiait de peu indépendante et de très instrumentalisée. En fait, un gros « machin », pour reprendre l’« énaurme » formule du général de Gaulle. Une machine à démolir dont usent et abusent les pouvoirs, selon la puissance ou la faiblesse des origines sociales, tribales et autres cercles protecteurs dont sont issus les prévenus. C’est au nom de cette malveillante logique que sans « avoir son œil de travers », les juges ont condamné,  dans un procès expéditif, les onze prévenus d’IRA, à des peines démentiellement sévères, variant de trois à quinze ans de prison ferme. C’est aussi au nom de cette même logique que le procureur de Rosso a mis, sous contrôle judiciaire, le fils d’un général pris en possession de produits totalement prohibées. Alors que les fils Haïdalla écopent d’une peine particulièrement lourde, pour pratiquement le même crime. C’est encore au nom de cette même logique que les deux Lucky Lucke nationaux (un autre fils de général et son cousin) ont été, tout simplement, relaxés par des juges « complaisants ». Au procès de Zouérate, quasiment tous les fonctionnaires du Trésor inculpés s’en ont bien sortis : deux ans de prison ferme et des amendes entre dix et dix-huit mille ouguiyas, pour des gens accusés d’en avoir illégalement dilapidé des centaines de millions, voire un ou deux milliards. Un procès/parade qui permet, au pouvoir, de se débarrasser de prisonniers encombrants, soutenus par fortes personnalités civiles et militaires et puissantes tribus. Le procureur de la république du Tagant a mis en liberté les manifestants de Male, au prétexte qu’il s’agissait de mineurs. Pourtant, l’instigateur de l’émeute serait un septuagénaire. Les « Iraouis » n’ont malheureusement eu ni la même « indulgence » ni la même « chance ». Allez savoir pourquoi ! Les comptables des ambassades, les deux de Nouadhibou (le maire de la ville et son trésorier) attendent encore. Et, puisqu’une vérité dite avec insolence ressemble à un mensonge, le jeune Cheikh Baye dormira trois ans en prison. L’ancien secrétaire général du Ministère de l’Intérieur et de la Décentralisation a été libéré. Sans qu’on sache pourquoi. Personne ne peut présager de l’issue de la rocambolesque affaire de la SONIMEX. Dessaisissement de l’inspecteur général d’Etat qui avait en charge le dossier et départ prématuré de l’Administrateur directeur général de la SNIM qui était ministre de l’Agriculture au moment des faits : voilà bien de quoi ajouter à la confusion ! Finalement, le traitement de toutes ces affaires corrobore la thèse d’une justice partiale et instrumentalisée. Une justice/machin qui sert à blanchir qui le pouvoir veut ou à le noircir, selon ses intérêts et calculs. Vous avez dit Etat de droit, démocratie et indépendance de la justice ?

El Kory Sneïba