Nuages venus d’on ne sait où

30 June, 2016 - 19:23

Le ciel gouvernemental a vu s’amonceler des nuages annonciateurs d’un rude hivernage. On le voudrait pluvieux. Sera-t-il excessivement tempétueux ? Car le discours de Néma n’a pas produit les effets escomptés. Au lieu de calmer le front politique, il l’a, au contraire, exacerbé. Mouvements harratines « indignés », par les propos du Président sur la fécondité des pauvres, et opposition on ne peut plus raidie, par une attaque en règle, alors que tout le monde, jusque dans les chancelleries, s’attendait à un discours apaisé, une main tendue et l’annonce de mesures visant à rassurer les plus réfractaires à un dialogue auquel Ould Abdel Aziz n’en convoquait pas moins ses opposants, dans un délai de trois à quatre semaines… avant d’écarter toute alternance au pouvoir en leur faveur ! Bref, un dialogue de treillis…

Autre nuage, la grogne des sénateurs. Les élus de la Chambre haute ne sont pas contents de la manière dont ils ont été traités, par le président de la République, dans son discours de Néma. Non seulement, il a annoncé la suppression du Sénat mais a profité de l’occasion pour dire tout le mal qu’il en pense. Depuis, les parlementaires sont entrés en « fronde », allant jusqu’à même renvoyer se promener des ministres auxquels ils reprochent de les avoir trop vertement critiqués.

Lourdeur atmosphérique supplémentaire, la grève des employés de Tasiast qui a débouché sur l’arrêt de la production et le renvoi de salariés étrangers. Une affaire fort mal gérée, par le ministère du Travail à l’origine des inspections visant à débusquer les travailleurs en situation irrégulière. Une affaire très délicate pour le gouvernement. Tasiast emploie, comme on le sait, des milliers de mauritaniens et rapporte des revenus substantiels à l’Etat qui doit œuvrer à élever sa part (3%) de revenus générés par l’exploitation de cette manne aurifère. Les licenciements massifs de nos nationaux et l’anéantissement des apports de la mine ne manqueront pas de peser gros sur le front social. La chute des prix des matières extractives (fer, or, pétrole…) a vu fondre, comme neige au soleil, la contribution de ce secteur au budget de l’Etat, entraînant l’augmentation de la TVA sur certains produits de grande consommation.

Vient s’ajouter, à ce problème, celui des employés de Mauritel S.A. La décision de renvoyer, comme à Tasiast, les employés étrangers (surtout marocains, en cette occurrence), accusés de détenir ou de gérer des « matériels sensibles », accentue la tension avec le royaume frère du Maroc. Celui-ci, qui a décliné l’organisation du sommet de la Ligue arabe (L.A.), ne pardonne pas, à notre pays, non seulement de s’être substitué à lui mais, aussi, d’avoir assisté à l’enterrement du feu président de la RASD. On voit mal le roi Mohammed VI prendre part au sommet pour la réussite duquel le président mauritanien met les bouchées doubles.

Pour couronner l’entassement des cumulo-nimbus, le gouvernement aurait, à en croire diverses confidences, procédé à de sévères coupes dans les subventions que l’Etat accordait à certaines institutions. Désormais, l’essentiel de l’argent public est destiné aux préparatifs du Sommet de la L.A. prévu pour juillet prochain. Alors, serrons nos ceintures, en attendant les dividendes que notre gouvernement espère récolter, à la fin de ce conclave ! Prémices de ces retombées, un certain embellissement de la capitale, même si l’on déplore la qualité des ouvrages réalisés qui risquent fort montrer, dès la première pluie, leurs limites...

Ben Abdalla