Droit de réponse à Mariem mint Derwich et ses inconditionnels, à propos de l’Anthologie de littérature mauritanienne francophone (éditions Joussour/Ponts, 2016)/Par Mamadou Kalidou BA

9 June, 2016 - 02:52

Après sa parution il y’a de cela deux semaines, aux éditions Joussour/Ponts, l’Anthologie de littérature mauritanienne francophone a fait l’objet d’une présentation en amphithéâtre, à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de l’université de Nouakchott, le jeudi 26 mai 2016.

La veille de sa présentation, j’avais accepté la proposition de Bios Diallo qui souhaitait que je réponde à certaines interrogations pour vulgariser l’ouvrage. Je crois que c’est la publication de cette interview qui a déclenché une polémique surprenante à propos de ce livre. Il faut bien le préciser, toutes les attaques mes collègues et moi, ont été directement ou indirectement perpétrées par Mariem mint Dewich. J’ai voulu être patient, espérant que la tempête passera, mais la « chroniqueuse offensée » poursuit au point d’épuiser ma patience. La dernière en date, à la quelle je réponds ici, est parue dans le numéro 1029 du 01 juin 2016 de Le Calame, le journal où elle tient une chronique.

 Cette polémique qui s’est amplifiée au fil des jours au point de surprendre toute la communauté universitaire, habituée, il faut bien le dire, à travailler dans l’ombre sans jamais qu’ailleurs, on s’intéresse à notre actualité scientifique. Car disons-le au passage – et le lecteur de ces lignes se rendra bien compte que ce fait n’est point fortuit – la majorité des co-auteurs de cette anthologie ont publié des ouvrages critiques précédemment, sans jamais que leurs publications suscitent non pas l’émoi, mais simplement la curiosité de la classe intellectuelle mauritanienne.

Notre aîné Idoumou ould Mohamed Lémine est co-auteur, avec Nicolas Martin-Granel Georges Voisset de Guide de littérature mauritanienne. Une anthologie méthodique (L’Harmattan, 1992, 204 pages).

Mbouh Séta Diagana a publié ses Eléments de la littérature mauritanienne de langue française. Mon pays est une perle discrète (L’Harmattan, 2008, 233pages) et co-auteur avec moi et Mamadou ould Dahmed de deux autres ouvrages : La poétique de l’histoire dans les littératures africaines francophones (L’Harmattan, 2014, 251 pages) et du numéro spécial de Littérature mauritanienne de langue française de la revue italienne Interculturel Francophonies (Lecce, N°26, 2014, 304 pages).

Le doyen Mamadou ould Dahmed a publié Le héros monstrueux. Une lecture psychanalytique du personnage romanesque de Stendhal (L’Harmattan, 2014, 233 pages) et enfin, moi-même, avant ces ouvrages collectifs ci-haut mentionnés, j’ai publié deux ouvrages critiques : le premier intitulé Le Roman africain francophone post-colonial. Radioscopie de la dictature à travers une narration hybride (L’Harmattan, 2009, 254 pages), et le second, Le Roman africain francophone contemporain. De la narration de la violence à la violence de la narration. (L’Harmattan, 2012, 204 pages). 

Cependant, bien rares sont les Mauritaniens qui, en dehors des universités de Nouakchott ou d’ailleurs, étaient au courant de notre existence, ni en tant que chercheurs isolés, ni en tant que membres d’une unité opérationnelle de recherche (le GRELAF). Et voilà qu’après cette ultime publication, la Mauritanie intellectuelle se réveille de sa torpeur – mieux vaut tard que jamais, pourrait-on se réjouir – et s’intéresse enfin à ce que nous faisons au temple du savoir. Sauf que lorsque les férus de l’actualité ordinaire s’intéressent à ce que nous faisons, ce n’est, hélas, ni pour leur curiosité pour la science, ni pour leur goût de l’évaluation objective de notre travail. Mais pour proposer leurs épaules à une pleurnicharde qui chiale, se débat, crie, fulmine, peut-être même se jette-t-elle par terre, parce que des chercheurs ont osé publier une Anthologie de littérature mauritanienne francophone, dans laquelle ils ne disent mot de sa poésie !

Et sans même prendre le temps d’aller consulter notre ouvrage, les amis de Mariem Derwich, dont beaucoup de respectables journalistes – le lobby de la chroniqueuse du journal Le Calame – s’engouffrent dans la brèche, sans réfléchir ; il faut coûte que coûte défendre, que dis-je ? Venger la « collègue » à la grande gueule pour s’assurer de sa sympathie.

Mêmes de respectables journalistes tombent sous le piège de « Njeddo Dewal, mère de la calamité », pour nous accuser, à main levée ! Le cas de Mohamed Hanefi, pour qui j’ai toujours eu un grand respect, est un exemple patent. Il versait dans l’amplification en nous reprochant d’avoir également omis, Tène Youssouf Gueye et Djibril Zakaria Sall, pourtant troisième et quatrième auteurs traités dans l’anthologie !

De quoi nous accuse-t-on en réalité ? D’avoir dit du mal de Mariem mint Derwich ou de quelqu’un d’autre ? Non ! D’avoir mal rédigé l’ouvrage ? Non ! D’avoir terni l’image de la Mauritanie, à travers l’exposition d’un pan de sa littérature ? Encore non !

Eh bien, mes collègues enseignant-chercheurs, Mbouh Séta Diagana, Mamadou ould Dahmed, Manuel Bengoéchéa, Idoumou ould Mohamed Lémine, Achraf Mohamed Abdelkader et moi, nous serions accusés de n’avoir pas consacré un chapitre de notre anthologie à Mariem mint Dewich. Que dis-je, il s’agit plus que d’une accusation, on nous condamne ! Quel est notre crime ? Celui de lèse-star ! Nous y voilà !

Parce que Madame Derwich se considère comme la star représentative de la littérature féminine, mauritanienne, francophone, qu’elle a l’habitude de raconter à ses amis de l’hexagone et d’ailleurs qu’elle était l’écrivaine mauritanienne la plus célèbre, qu’elle est une icône en RIM, il était inacceptable, inimaginable qu’une Anthologie de littérature mauritanienne francophone paraisse sans mentionner, ni son nom, ni sa seule œuvre littéraire !

En « l’oubliant » - je pose les guillemets parce que ce n’est pas un oubli – nous ôtions à la prétendue star la possibilité de parader dans les cafés parisiens, à l’occasion de quelque voyage, notre anthologie en main, montrant, à qui voudrait lui accorder son attention, que son cher pays la magnifiait !

Alors la chroniqueuse de Le Calame, jure de nous faire la peau, en nous vilipendant dans la presse et sur les réseaux sociaux, comme si nous n’avions pas, comme elle, accès au clavier et à internet ! Par pudeur et magnanimité, mes collègues et moi avons observé le silence, malgré la véhémence de ton « ton » et la gratuité, tout à la fois,  mesquine et lamentable de ses attaques. Et lorsque mon collègue Idoumou tente de la raisonner, en s’expliquant, elle n’a d’autres réactions que celle de le trainer dans la fange de ses propos infâmants et amers.

Eh bien Mme Derwich, moi je te réponds que ton unique recueil de poésie érotique, intitulé Mille et un je, ne mérite pas de figurer dans notre Anthologie de littérature mauritanienne francophone. Je n’ai vu dans tes textes qu’une timide imitation du courant romantique français que tu t’es efforcée de pasticher maladroitement !

Pour faire de la poésie, Mme, attend d’abord de recevoir la visite des muses, comme Oumar Ba, Djibril Zakaria Sall, Ousmane Moussa Diagana ou tout simplement Aichetou mint Ahmedou ! Fais un tour dans son site et admire les formidables « Tbra » en français d’Aichetou mint Ahmedou, (tu vois que je suis aussi les blogs et sites web intéressants), tu sauras alors pourquoi ton seul recueil n’a pas eu de succès chez les amateurs de la bonne et belle déclamation, encore moins chez les spécialistes ! Dans ces poésies, le contenu thématique épouse la prosodie et la métrique dans une remarquable harmonie. On est bien loin de ta poésie prosaïque et éparse !

Et puis, sois cohérente avec toi-même, jusqu’au bout ! Tu écris que nous n’avons produit qu’une « hontologie ». Alors tu devrais te réjouir que ton bestseller ne figure pas dans notre « torchon » ! Seulement, au lieu de cela, Mme se met en colère au point de tomber en syncope ! Par ton amertume mal assumée, tu avoues, malgré toi, qu’il faut bien compter avec notre modeste avis. Et celui-ci est que ton texte n’est pas prêt à entrer dans le programme de nos étudiants. Publie-la dans tes chroniques !

Mes collègues et moi ne sommes à la solde de personne et ne serons certainement jamais à la tienne ! Nous sommes des penseurs libres ! Libres dans le choix de nos corpus ! Libres dans notre discours critique ! Libres d’apprécier ou de passer à côté des écrits des uns et/ou des autres. Et c’est au nom de cette liberté que ton fameux « Mille et un moi, pardon, un je » n’a pas été jugé éligible dans notre auguste Anthologie. Mais puisque Mme se considère comme une sommité intellectuelle dont l’omission doit entrainer l’apocalypse, alors il lui reste toujours une issue : regrouper ses amis et produire une anthologie de littérature mauritanienne (si tu préfères franco-mauritanienne) dans laquelle ton Mille et un je, pourrait trouver une place de choix ! Tu vois, nous au moins, on te reconnait le droit de faire ce que tu veux.

Sinon ? Sinon, tu peux toujours pleurer, chroniquer, appeler à la rescousse tes amis de la presse ! Je reste de marbre ! De marbre comme cette caravane qui ne se laisse point impressionner par les aboiements des chiens qu’ils soient du désert, de la savane ou de l’autre rive de l’Atlantique. Enfin, soi-dit au passage, tu peux écrire ce que tu voudras, mais à partir de maintenant, je répondrais à chacune de tes sorties sur ce sujet ! Dieu, merci tu n’as le monopole ni sur la langue de Molière, ni sur le clavier ! A bon entendeur, salut !

Mamadou Kalidou BA

Coordinateur de l’Anthologie de littérature mauritanienne francophone