Passif humanitaire : Le REVE se demande pourquoi certains directeurs des sociétés d’Etat n’exécutent pas les instructions du président de la République

10 December, 2015 - 01:11

« Nous ne comprenons pas pourquoi certains responsables de sociétés d’Etat  mais aussi du privé  n’exécutent pas les instructions du président de la République Mohamed Ould Abdel Aziz  autorisant le règlement  définitif  du dossier des fonctionnaires et agents de la fonction publique  et  du secteur privé  victimes des  licenciements abusifs  entre 1989 et 1991»,  se sont demandés  des membres du regroupement des victimes des années 1989/1991 (REVE), venus  crier leur détresse, ce lundi 7 décembre au Calame. Des victimes qui  affirment avoir été accompagnées   dans ces  entreprises par  un  conseiller du président de la République, Abdallahi Ould Ahmed Daamou  pour plaider leur cause.

En effet, rappellent ces victimes, sur les 16 entités ayant reçu la circulaire gouvernementale, certaines continuent à trainer les pieds pour l’appliquer. Parmi les récalcitrants, les victimes  citent, entre autres,  la SONADER, la Mauritel, la SOMELEC.

Du côté de la Mauritel, l’ancien DG avait  décidé, suite à une saisine du  ministre des finances, d’octroyer, à titre d’indemnisation un montant de 30 millions d’Ouguiyas. Il avait cependant  affirmé qu’il ne pouvait reprendre aucun des fonctions et agents licenciés. A en croire nos interlocuteurs, le payement devrait  intervenir   à la veille de la fête de Tabaski dernier. Hélas, le patron de la boîte a été remplacé  et le nouveau directeur,  pourtant saisi  par  la direction de la fonction publique  au cœur  de presque tous les  récents blocages,  tarde  lui aussi  à répondre au courrier.

Il faut rappeler qu’avant d’accepter la requête du ministre des finances à payer les indemnisations, la direction de Mauritel  a rappelé que le gouvernement mauritanien s’était engagé, lors de la privatisation de Mauritel et au travers de la Convention de prise de participation du 12 avril 2001 à ne faire supporter par l’entreprise « aucune obligation non encore exécuté au titre de la rupture de tout contrat de travail, (…) ou pour ne pas avoir respecté une obligation quelconque de réintégrer  un salarié.» Néanmoins,  la Mauritel  s’était engagée à contribuer aux dédommagements  des victimes

Pour l’une des victimes, comme l’Etat est actionnaire de la société, elle peut bien défalquer le montant de cette participation. Ils sont 28 agents  dont certains sont malades ou totalement démunis  à tourner en rond depuis des années  et  abandonnés   aux humeurs de certains  responsables de l’administration.

Idem à la  SOMELEC où toutes les formalités  et annotations ont été faites,  indiquent les membres du REVE. « Nous avons été voir le ministre du pétrole et de l’énergie pour faire avancer le dossier avec  le conseiller Ould Ahmed Daamou, des instructions ont été données  mais jusqu’au moment où nous vous parlons, le dossier dort dans les tiroirs de la société », affirment les membres du   REVE. Et d’ajouter : « c’est des rendez-vous à n’en pas finir ».

De son  côté, après réception de la lettre circulaire du gouvernement  et sous la pression de ses anciens salariés, la SONADER  a demandé une rallonge budgétaire au ministère des finances qui aurait  rétorqué que la société dispose de ressources suffisantes pour s’acquitter de cette obligation. Et depuis lors, le dossier des indemnisations  traîne en longueur.

 

Reconstitution de carrière  et pensions des retraites  

Si  les entités  destinataires de la circulaire du gouvernement  ont  respecté les  instructions du président de la République,  aucune n’a octroyé une pension de retraite à  l’un de ses  anciens employés licenciés abusivement. Et pour cause  affirme  la caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), elles n’ont pas versé leurs  cotisations. Selon les victimes, la CNSS, qui a payé les indemnisations  à ces anciens employés  et repris certains d’entre eux,  a demandé au ministre des finances de faire une lettre circulaire adressée aux entreprises  leur demandant de verser les cotisations depuis la date de licenciement des employés, à savoir 1989, pour la majorité des cas.

Autre  problème des victimes,  la reconstitution de carrière prévue dans  le règlement  du passif humanitaire. Selon l’un des employés, « certaines  sociétés d’Etat   ne voulant pas  exécuter les instructions du Président de la République   entretiennent  un amalgame entre la date de la réhabilitation qui est une décision politique intervenue après le recensement des victimes  en 2010 et  la date de licenciement régie par les textes  de la fonction publique.  « Pour reconstituer la carrière, il faut partir de la date de licenciement, non  de la  date de réhabilitation intervenue  alors que certains fonctionnaires et agents ont déjà  atteint  ou dépassé l’âge de la retraite ». « Nos responsables  doivent  se référer aux textes réglementaires, non à une décision politique », observe un de nos visiteurs. Tenez, signale l’un des membres du REVE,  pour une simple erreur commise lors des opérations de recensement par ANAIR et que Tadamoun a redressée  par lettre officielle, le port de Nouadhibou refuse de payer l’une des ses employées (secrétaire)  parce que tout simplement, sur la liste, elle compte sur le personnel  du  Port de Nouakchott.

Désemparés,  les fonctionnaires et agents du REVE  qui courent derrière les rendez, à la direction de la fonction publique, au ministère des finances  où le patron  ne veut  les recevoir et  ne prend aucune décision, s’interrogent : « Est-ce que le président de la République qui vient d’affirmer, à l’occasion de la fête de l’indépendance  que  le dossier du passif humanitaire est  définitivement réglé ne serait-il  pas au courant  des obstructions  de  certains  petits responsables  de l’administration ?  Est-ce qu’on lui dit la vérité sur ce dossier dont le règlement avait été décidé depuis 2010? » Les victimes du REVE prient le président de la République  de  bien vouloir  s’informer sur la gestion de ce dossier.

Ben Abdalla