Moi, j’ai veillé. Comme tout le monde. « Si tu vois que tous les gens sont borgnes… », nous dit l’adage. Il faut donc au moins faire semblant. Ils avaient dit « vingt heures ». On en a attendu cinq de plus pour écouter l’ex-président Mohamed ould Abdel Aziz. Entre le 1er Août et maintenant, il n’a guère changé. Toujours égal à lui-même : on attendait Aziz,on a eu Aziz. Tel est le résumé de la conférence de presse. Tout le reste n’est que détails. Avec, quand même, deux ou trois symboles dans tout ça qui pourraient servir aux futurs présidents de la Mauritanie. Pour les anciens, c’est trop tard. Moi, l’image la plus forte que j’ai retenue, c’est celle d’Aminetou Alias, la « folle d’Aziz » et son mégaphone. Une dame crachant à tout va sur la tête des ex-soutiens et applaudisseurs de l’ex-président qui doit bien regretter, aujourd’hui, de ne pas l’avoir nommée administratrice directrice générale de la SNIM, ministre des Affaires étrangères ou du Pétrole, présidente de l’Assemblée nationale ou de l’Union Pour la République, directrice de son cabinet, ou de ne pas lui avoir donné quelques licences de pêche ou quota de poulpe, ou encore de ne pas l’avoir choisie pour diriger la Commission électorale nationale indépendante. La folle d’Aziz a administré, à tous les ex-soutiens et applaudisseurs de celui-ci, une extraordinaire leçon de fidélité et de constance. L’autre image, un peu moins forte, que j’ai encore retenue, c’est Aziz assis entre deux hommes des deux extrêmes de la Mauritanie. Comme disait une publicité sur le danger des incendies qu’un brin de feu peut allumer : entre Fassala très à l’Est (ici Amourj) et Keur Mécène (ici Ndiago) sur la rive de la Mer Bleue à l’Ouest. À dire vrai, ce que je voulais surtout savoir, c’était si les journalistes et bloggeurs invités avaient effectivement diné chez l’ex-président. Ceci dit, voici en résumé les plus importantes infos de la très attendue conférence de presse de son Excellence Monsieur l’Ex-Président. On disait naguère qu’il ne fallait pas demander à un homme combien il avait-il duré, mais qu’est-ce qu’il avaitamené. C’est un peu ça, quoi. Les nouvelles autorités doivent enfin commencer à faire quelque chose de concret. Cinq mois, c’est « un peu beaucoup ». Et puis il ya des têtes qui ne sont bonnes ni à voir, ni à sentir, ni à entendre. Les audiences avec des ex : ministres, Premiers ministres, fonctionnaires débarqués, embarqués même dans des affaires couci-couça ; les gens commencent à se décourager. Les espoirs suscités par les premiers discours et une ou deux très timides petites actions commencent à s’estomper. Au moins les honorables députés ont bougé, avec l’augmentation de leurs salaires. Ce qu’on n’a pas pu trouver, que nos frères en bénéficient ! Et puis « celui qui ne t’a préféré que sa tête, ne le voit pas sur lui »... Au début ils ont refusé, après ils ont accepté. Mais les députés ne sont pas des poisseux. Ce ne sont que de respectables gens, entre fils de notables, grandes tentes, grosses cases, spacieux hangars, petits-fils d’émirs, de résistants ou d’illustres marabouts, un peu mélangés de quelques autres venus comme ça, par les fantaisies d’une certaine alchimie politico-socio-idéologico-dosageo-concentrique. Mais là n’est pas le problème. Que chaque député augmente sa « tête » de vingt-cinq mille nouvelles ouguiyas n’a jamais fait jaser tout une nation. C’est juste de la futilité. Ce ne sont pas ces quelques centaines de millions auto-autorisés par les honorables députés qui vont empêcher les conditions de s’améliorer, la construction de classes ou de points de santé, de résorber le chômage, lutter contre la pauvreté massive ou réformer les secteurs de la santé et de l’éducation. Alors, autant avoir une belle Assemblée nationale avec de beaux députés conduisant de luxuriantes 4x4 et vivant dans de très belles villas cossues, que de ne pas les avoir. Pour les autres, ça va venir. Il n y a que la mort qui arrive en même temps. Comme la pourriture, la forfaiture commence par la tête. Salut.
Sneiba El Kory