S’il te plaît, pas de risque avec un pays fragile dont les chemins frémissent de bandes, mouvements, bombes et explosifs, peuplé de groupes enragés, ethnies excitées et couches pleurant des blessures historiques non encore cicatrisées. Et là-bas, dans un puits sans fond, du gaz qui fait couler tant de salive.
S’il te plaît, pas de risque avec un pays fragile où des militaires s’ennuient de la nullité des civils et des civils s’ennuient de l’omniprésence des militaires, tandis qu’entre les deux, des perturbateurs profiteurs, ennemis de la paix, cherchent la moindre occasion de brûler une allumette.
S’il te plaît, pas de risque avec un pays fragile dont le lourd, futile, rétrograde et répréhensible héritage politique n’a eu de cesse de s’empiler, du bourbier du « parti du peuple » à l’argile du « sauvetage », inepties du « Salut », dévergondage des « SEM », poubelle du « PRDS », poltrons d’« ADIL », ordures de l’UPR…. Une longue marche qui a échoué à fonder une seule Nation, démissionné face à la construction d’un mur de liberté, fui devant les chevaux de l’égalité, s’est éclipsé au regard de la justice, aplatie dans le courant de la démocratie et révélée incapable d’uriner sur la tête de « Houbel ». La crise politique s’est de plus en plus approfondie dans l’accumulation des violations intempestives des droits humains, les mauvaises prestations économiques et la tension sociale. Les doléances du peuple se sont ainsi accumulées en tonnes de plateformes de revendications féminines, des jeunes, couches, ethnies, syndicats et partis et d’on ne sait quoi encore ? Personne ne pensant aux conséquences.
S’il te plaît, pas de risque avec un pays fragile où l’esclavage est un fléau qui ravage secrètement nos entrailles, la gabegie un microbe qui annihile nos rêves et nos espoirs, tandis que l’anarchie héritée de la culture des tentes abuse de tout, même des feux rouges qui, bras croisés, se sont figés en un total et terrible silence. Aucune inspection ; sinon, qui inspectera les inspecteurs ? Aucun enseignement ; sinon, qui enseignera les enseignants ? Pas d’eau à distribuer. Pas de pain à partager. Pas de médicament à ingurgiter. Pas de poisson sur le dos duquel nous pourrions fuir collectivement vers le pays de l’Oncle Sam.
Mais voici qu’aujourd’hui, aujourd’hui de derrière l’horizon, est apparu un homme à calvitie qui a allumé la locomotive du train. Nous avons dit qu’elle n’allait pas démarrer à cause de la vétusté et de la rouille. Mais grâce au pouvoir d’un Puissant, elle a quand même démarré. Nous avons vu le diable de la résurrection, Birame Dah Abeid, sur une large bande en première page de l’Agence Mauritanienne d’Information. Nous avons vu le vieux leader de l’opposition, Ahmed ould Daddah, au premier rang à côté de la « tête de la pyramide », au festival de Chinguetti. Nous avons vu la Commission Nationale des Droits de l’Homme s’amuser avec les enfants des adwabas, menacer d’appliquer les lois et poursuivre les propriétaires d’esclaves. Nous avons vu les vendeurs de la mort pleurer en leur pharmacie de poisons. Nous avons vu les prix descendre au moins au troisième ciel. Le train a démarré effectivement, avec une réelle ouverture politique, des changements rigoureux en termes de droits de l’homme et de profondes réformes inédites.
Chacun ne te veut que du bien. Personne ne veut que tu te dresses devant un train en marche. Dégage donc la route ! Dégage-la pour permettre à ton frère de passer. Dégage-la pour permettre à ton pays de récupérer. Dégage-la pour que l’Histoire te cite en bien.
Traduction d’un texte original en arabe
de Mohamed Vall ould Sidi Moila