J’ai dormi dans cette camionnette trois mois successifs jusqu’au jour où j’ai fait la connaissance d’un jeune garçon qui habitait le quartier surplombant les jardins maraichers de Nouakchott. C’était à quelque deux à trois cents mètres de la boutique de mon patron. Mon jeune ami qui s’appelait Sidi m’invitait tous les soirs chez lui où je pouvais suivre des films dans cette merveilleuse boîte qu’était pour moi la télévision. Je ne comprenais rien de ce qui se disait dans la télévision, mais les images et la musique me suffisaient largement comme passe-temps avant de me jeter dans les bras de Morphée.
Après une année de travail avec Diallo, raconte Malek, j’ai pu économiser quelques pécules qui m’ont permis de payer une petite caisse pour colporter des cigarettes, des allumettes et autres petites marchandises que je proposais aux passants. Tous les soirs, je rentrais avec quelques centaines de francs, après avoir payé mes repas chez Diallo chez qui j’ai cessé de travailler.
Quand je l’avais quitté, le guinéen était content parce que, dit-il ,« Malek a décidé de prendre son destin en main pour devenir un homme ». J’étais très réconforté par ces paroles qui signifiaient que j’étais sur le bon chemin du garçonnet de 15 ans que je suis.
Un jour, mon ami Sidi vint m’annoncer que ses parents ont décidé de déménager vers Tiguent où son père va s’adonner au métier de boucher. Veux-tu venir avec nous ? m’a dit Sidi. C’est pour demain le départ. Ce soir on en parlera, je le dirai à papa, ça ira, me dit-il avant de partir chez lui.
Le soir, mon ami a tout arrangé avec son père. Et comme j’ai en tête l’histoire de certains villageois partis depuis longtemps au Sénégal, je me suis dit que c’est une bonne chose d’aller sur la route de Rosso pour être plus proche encore de ce pays.
Pendant toute la nuit, j’ai continué à poser des questions à mon ami qui, semble-t-il, avait déjà fait le voyage vers Tiguent, Rosso, Rosso Sénégal. Il me racontait des bribes de souvenirs qui me faisaient rêver.
Le matin, un taxi est venu nous prendre à la maison pour nous conduire à l’unique Gare routière de la capitale qui se trouvait alors au Ksar, en face de l’aéroport.
Nous embarquons à bord d’une Peugeot de marque 404 familiale. La route était relativement bonne pour nous permettre d’arriver à destination au bout de deux heures de temps sans fatigue. Etant donné la veillée d’hier nuit, je n’avais pas résisté au sommeil le long du trajet.
A Tiguent, je me suis installé avec la famille de Sidi qui m’a adopté sans le moindre couac. Je sortais tous les matins pour aller vendre mes petites marchandises au bord de la route.
Pendant ce temps, Sidi partait chez le marabout avec sa tablette pour apprendre le Coran.
Son père m’a proposé de faire comme lui, mais j’avais déjà en tête l’idée du gain et l’obstination de changer ma vie grâce au travail.
Malheureusement, mon petit commerce n’a pu marcher à Tiguent et je me suis retrouvé dans l’obligation de chercher un travail.
Ely Maghlah