Après six jours d’une longue attente, le premier ministre a dévoilé son gouvernement composé de vingt huit membres dont quelques uns (cinq) étaient déjà là dans les autres gouvernements de son prédécesseur Mohamed Salem Ould Béchir. Sur les vingt huit membres, quatre sont des femmes dont trois nouvelles entrées pour la première fois au gouvernement. Les premières réactions à l’annonce de cette première équipe gouvernementale de l’ère Ghazwani sont naturellement mitigées. Pour certains, la reconduction d’anciens ministres de Mohamed Ould Abdel Aziz n’est pas une bonne chose même si parmi les ‘’rescapés’’ il y en a qui ont fait leurs preuves dans les secteurs qu’ils avaient en charge. Pour d’autres, la composition de la nouvelle équipe constitue un signal fort du nouveau patron de rompre avec certaines traditions qui privilégiaient les dosages politico-ethnico-régionaux au détriment de la compétence et de l’intégrité. La tendance générale étant la satisfaction d’ensemble de ce qui semble être une option très nette de la promotion d’un groupe de hauts cadres dont certains occupaient des postes de hautes responsabilités dans des institutions internationales de renom. Au niveau des ministères régaliens, les choix semblent faire l’unanimité. Dr Haimoud Ould Ramdane est véritablement ce qu’on peut appeler l’homme qu’il faut à la place qu’il faut. Cet éminent juriste et professeur d’université est depuis plusieurs décennies la boite noire du ministère de la justice et l’artisan en chef de ses textes et de ses instruments. Le placement du général Hanena Ould Sidi, qui revient juste de la direction du G5, à la défense est incontestablement un bon choix pour ce militaire chevronné qui connaît parfaitement les dédales de l’institution militaire dont il est l’un des plus emblématiques symboles. L’arrivée à l’intérieur et à la décentralisation de l’ancien commissaire de l’OMVS, Mohamed Salem Ould Merzoug consacre la promotion d’un grand intellectuel doté d’une solide expérience de gestion de gros dossiers et d’une capacité d’écoute et d’analyse qui ne sera pas de trop pour le pilotage d’un département ayant en charge l’administration du territoire et l’ancrage de la décentralisation. L’éminent docteur en géographie ne sera certainement pas en terrain inconnu. Comme le ministre de la justice, l’arrivée d’Ould Dhebbi aux finances rassure les gens du secteur. L’homme est connu pour sa compétence et son intégrité. Les affaires étrangères restent entre les mains d’un grand diplomate qui n’a véritablement plus rien à prouver. Pour ce premier gouvernement, le président Ghazouani semble avoir choisi des hommes et des femmes capables grâce à leurs compétences de relever les nombreux et complexes défis de leurs départements respectifs. Pour l’instant, les considérations politiques dans le choix des ministres n’ont pas été ou pas du tout prises en compte. Selon certaines rumeurs, les Upéristes seraient très mécontents au point qu’avec certains anciens ministres débarqués et des députés de la majorité ayant soutenu le président élu, ils envisageraient d’entreprendre une action. Les autres soutiens de Ghazwani : cadres du RFD, de Tawassoul ou de Adil et autres personnalités indépendantes sont tout aussi déçus de ne pas avoir été impliqués dans ce premier gouvernement. Selon des rumeurs persistantes, le président et son premier ministre auraient demandé aux ministres sortants de produire des rapports détaillés sur leur gestion dans la perspective de la passation de service avec leurs remplaçants. Une autre mesure qui vient ‘’mouiller davantage l’argile’’ et exacerber la tension entre la nouvelle direction nationale et ceux qui pensent l’avoir élue et dont le premier, l’ancien ministre de la fonction publique, Seyidna Aly Ould Mohamed Aly, président du comité de gestion de l’UPR a été débarqué avec fracas et sans appel. Gros mécontentement. Tensions en perspective. Crise interne. Possibilité d’une motion de censure contre le gouvernement d’Ismail Ould Cheikh Sidiya pour mal commencer le mandat de Mohamed Cheikh Ghazwani qui a en tête de rompre avec un certain passé. On dit chez nous que ‘’celui qui remplit sa bouche de farine sait avec quoi il va la mouiller’’. Ould Cheikh Sidiya et Ould Ghazwani connaissent bien l’adage.
El Kory Sneiba