Le Calame : Le candidat que votre initiative avait choisi de soutenir a été déclaré vainqueur de la présidentielle. Qu’avez-vous envie de lui dire au lendemain e cette victoire ?
Aissata Kane : Vous me permettrez de lui adresser, tout d’abord, à travers vos colonnes, mes félicitations les plus chaleureuses pour la confiance que les mauritaniens ont bien voulu placer en lui, à travers leurs suffrages. C’est une lourde change dont il vient d’hériter, mais je suis convaincu, au vu de son parcours et de son expérience, qu’il ne les décevra pas. Les mauritaniens attendent beaucoup de lui pour la consolidation de la démocratie, pour un véritable Etat de droit dans lequel les droits et devoirs de chacun sont respectés. Un Etat où règnent la justice, la bonne gouvernance, la fraternité et la citoyenneté. Enfin, je souhaite vivement, à l'aube de sa mandature, que la Mauritanie se réconcilie avec elle-même. Le président Gahazwani s’y est engagé, nous allons l’accompagner dans cette œuvre.
-Le président élu prêtera serment le 2 août prochain. Qu’attendez-vous de lui ?
-Comme je l’ai dit tantôt, le président élu est très attendu, et je sais qu’il en est conscient et apprécie à sa juste valeur, sa nouvelle charge ; une charge très délicate en raison de ses multiples enjeux et contraintes. Je suis tenté, pour répondre à votre question, de dire que j'attends de gros efforts dans la gouvernance des secteurs sociaux.
En effet, si on aborde la gouvernance des secteurs économiques et sociaux, je souhaiterai que notre économie soit planifiée dans un cadre stratégique visant à sortir les populations de la pauvreté et de l’ignorance. Mon souhait, dans ce domaine, est d’accorder une priorité aux secteurs traditionnels: agriculture, élevage et pêche continentale. La promotion et le développement de ces trois secteurs ont plus d’impact sur les conditions de vie du monde rural qui renferme 60% de nos populations. Alors que les autres secteurs dits modernes sont très dépendants de l’extérieur (commerce, industrie, travaux publics, service etc.) Ces secteurs sont certes nécessaires pour notre croissance économique, mais ils ne doivent pas prendre le dessus sur ce que nos populations connaissent le plus. En somme, il s’agit de mettre en valeur nos ressources naturelles qui peuvent assurer une autosuffisance alimentaires à nos citoyens les plus démunis.
Dans ce cadre, je suggère une promotion soutenue des trois secteurs visés, par une meilleure distribution des terres de cultures dans le respect de propriétés privées (1), une mise en place de fermes d’élevage dans les foyers pastoraux par le développement des cultures fourragères et l’améliorations des races(2), et la promotion de la pêche artisanale dans les eaux fluviales ou des marigots(3). La pêche maritime est un secteur rentable certes, mais n’impacte pas nos populations rurales qui sont traversées par des marigots et des fleuves renfermant une importante quantité de ressources halieutiques d’eau douce non capturées ou capturées par des étrangers.
-Que pensez-vous de l’attitude de l’opposition mauritanienne qui a exprimé sa disponibilité au dialogue pour « sortir le pays de la crise née de la présidentielle du 22 juin dernier ?" Des échauffourées et des arrestations ont marqué le lendemain de la proclamation des résultats par la CENI.
-Je trouve cette position très louable, ce sont des citoyens comme tout le monde. Et à partir du moment où ils acceptent le dialogue, il faut, à mon avis, leur tendre la main, les écouter, discuter avec eux et les impliquer afin de leur permettre d’apporter leur pierre à l’édifice, pourquoi pas ; nous sommes tous des citoyens mauritaniens et nous voulons tous le meilleur pour notre pays.
Propos recueillis par Dalay Lam