Le 22 juin, les Mauritaniens élisaient le président de la République. En dépit de quelques irrégularités, la commission électorale nationale indépendante (Ceni) a relevé le défi de la diligence et de l'organisation technique. Cependant, sa recomposition inévitable et nécessaire, garantirait l'impartialité de son travail.
Les résultats accordent la victoire à Mohamed Ould Cheikh Mohamed Ahmed Ould El Ghazouani, avec 52, 00% des voix. Durant le dépouillement, des manifestations de rue éclataient, en protestation aux allégations de fraude. Le bilan des troubles se solde par des blessés et des dizaines d'arrestations. Le spectacle des marches révèle la densité de la fracture sociale, jusque-là objet d'occultation, voire de déni. Une partie de la population se sent hors d'un système qui l'exclut de la possibilité d'une régulation pacifique des intérêts. Les griefs visent, dans une même défiance, le fichier électoral et le registre de l'état-civil.
Ainsi, se présente la première priorité du président de la République élu, Mohamed Ould Cheikh Mohamed Ahmed Ould El Ghazouani et nous l'y encourageons, sans réserve. Le pays ne connaitrait le développement et l'assurance de sa continuité tant qu'une fraction considérable de ses citoyens s'estime de seconde zone. Nous insistons sur l'Agence d'inclusion sociale, en charge d'éradiquer les discriminations sociales et économiques. Sa centralité dans l'énoncé et l'exécution des politiques publiques requiert un recrutement rigoureux et une transparence de gestion. D'emblée, il lui revient de favoriser l'intégration équitable à tous les processus de recensement et d'établissement de documents administratifs.
En sus de nos attentes exprimées dans le communiqué de soutien au candidat d'alors, nous souhaitons que les Mauritaniens lui accordent une trêve d'une année, pour lui permettre de susciter une nouvelle majorité au parlement et de déclencher la dynamique des réformes. Au terme du délai, une évaluation s'imposera.
La Mauritanie devrait aussi recouvrer ses institutions abimées, renouer la relation avec les peuples amis, confirmer sa vocation de trait d'union entre Afrique de l'Ouest et le Maghreb et rassurer ses partenaires.
Au-delà de l'ensemble des revendications, doléances et vœux, une présidence réussie demeure tributaire de la lutte résolue contre la corruption et le clientélisme, source de prédation du bien public et de promotion de la médiocratie. Le nouveau chef de l'Exécutif est appelé à éradiquer, par des gestes probants, l'impunité, l'incompétence et les promotions indues parmi les agents de l'État. Tout retard, atermoiement ou compromis sur de tels impératifs aggraverait la frustration et congédierait l'espoir de l'alternance. Nos compatriotes ne veulent pas de la continuité. Ils aspirent à mieux, en toute urgence.
La Mauritanie de la paix a un prix, longtemps impayé : la remise en question des certitudes acquises, l'humilité et la disponibilité à une révision profonde des équilibres sur lesquels repose le pays depuis l'Indépendance, s'avèrent la meilleure garantie de stabilité. Le Président Mohamed Ould Cheikh Mohamed Ahmed Ould El Ghazouani peut réussir le pari. En foi de quoi, nous lui renouvelons notre confiance vigilante.
LA MAURITANIE AVANT TOUT Nouakchott, 01 juillet 2019