Feuille de route pour le Président idéal… /Par Ebe Babah

23 May, 2019 - 04:13

Cette feuille de route est notre initiative… Alors venez tous, applaudissez,  chantez  et dansez, distribuez les roses et des gâteaux, composez les  poèmes et les hymnes  populaires et patriotiques, Portez vos  plus beaux habits, exhibez-vous et montrez bien vos visages devant les caméras des  télévisions pour qu’on remarque bien  que vous aviez participé à cette initiative. Egorgez moutons et chameaux pour que les gens se gavent bien et remplissent leur panse…

Mais, ne faites pas de compromission, ne flattez pas inutilement et ne mentez surtout pas.

Il s’agit d’une initiative complètement différente de celles qui l’ont précédé  et pour lesquelles on nous a  habitués en ces temps de vaches maigres, de flatterie, d’hypocrisie et de dégénérescence des valeurs nobles de notre société. Ces manifestations, qui regroupent souvent des milliers de personnes qui se livrent à des âpres et rudes concurrences d’allégeance au nom des tribus, des régions, des villes, villages et au nom même des familles sans qu’elles n’aient aucune légitimité ni aucune mandat de ces entités à l’effet de les représenter.

Ces manifestations folkloriques ont entaché sérieusement nos nobles valeurs et ont introduit des pratiques totalement contraires aux valeurs intrinsèques de notre honorable société mauritanienne, avec leur train de flatteries sans retenues, de l’hypocrisie éhontée qui les accompagne dans le seul but de plaire et de se rapprocher de ceux qui sont au pouvoir. Ces agissements sont des pratiques totalement étrangères aux nobles valeurs morales de notre société.

Notre initiative est d’un tout autre genre, faite d’une manière tout à fait différente,  elle exige de l’enthousiasme, de la conviction, de l’intégration et de la défense des valeurs morales de notre peuple. Elle lance un appel vibrant pour sauver le pays de la décadence et vise à le mettre sur la voie du progrès, du développement, de la justice, du droit et de l’équité.

C’est une initiative qui vous invite à voter pour un candidat que vous choisirez en toute liberté et en totale possession de vos facultés mentales individuelles, avec toute conviction et une foi sincère, sans être influencé ni par une quelconque   autorité ni par la propagande de ceux qui ont fait et font encore la cour au fil des années à tous ceux qui ont les rênes du pouvoir. Ceux qui retournent leur veste ou changent de couleur de boubous à chaque fois que quelqu’un s’empare du pouvoir  légalement ou illégalement.  Ils sont toujours là, les mêmes figures, prêts à applaudir et ovationner les nouveaux maîtres du pays quels que soient leurs choix politiques, fussent-ils bons ou mauvais. Ces personnes-là, nous les connaissons et elles sont parfaitement connues de tous dans les quatre coins du pays.

Notre initiative fait appel à un candidat qui doit répondre à des conditions particulières et doit avoir des qualités intrinsèques :

Le candidat Idéal, que notre initiative soutient en tant que futur président du pays, doit avoir un programme électoral intégré, multidisciplinaire, intrinsèque et convaincant et qui garantisse, aussi bien le développement économique et social du pays, mais aussi doit comporter une vision globale et futuriste qui rompt totalement avec les méthodes passées de gouvernance du pays, ces méthodes qui ont prouvé leurs limites et ont échoué dans tous les domaines. C’est à cause de ces politiques de gestion désastreuses que notre pays patauge aujourd’hui encore dans la pauvreté, le sous-développement et l'ignorance. Selon la Banque Mondiale, le taux de pauvreté représente 31% de la population totale en 2017, soit un million et demi de personnes dont les votes vont peser dans la prochaine élection présidentielle, notamment des jeunes en perdition pour la plupart...

             Notre candidat doit travailler pour réaliser les réformes nécessaires et importantes selon la feuille de route, que nous proposons comme suit :

Il doit tout d’abord se faire entourer, dans son cabinet, par une équipe d’experts professionnels nationaux hautement qualifiés. Il pourrait être très approprié que la plupart des membres de cette équipe soient choisis parmi des experts mauritaniens ayant fait leurs preuves dans le organisations internationales spécialisées dans les domaines du développement économique et social, de la planification, de l'éducation, de la santé, du développement rural, de la justice, des droits de l'homme, de l'énergie, des mines, de l'environnement et des systèmes d'information, Une nouvelle équipe totalement détachée  des pratiques  de corruption  et de  mauvaise gestion. Les profils de ces experts ne manquent pas. Nous savons que nous avons un large terroir d’experts compétents dans ces domaines et dans d’autres qui ne failliront pas lorsqu’il s’agit de répondre à l’appel de la patrie si on fait appel à eux.

Droit et Justice :

 L’absence de justice réelle et de droit équitable ont été la cause de nos problèmes dans tous les systèmes politiques passés. Nous avions toujours aspiré et rêvé d’un Etat de droit dont nous n’avions jamais vécu réellement les formes, ni les exigences ni bénéficié de ses avantages.  Aujourd’hui, nous rêvons encore de cet Etat de droit qui préservera et protègera les intérêts et droits de chaque individu et dans lequel le citoyen ordinaire sera assuré de l’exercice de ses pleins droits.  Devant le juge,  n’importe quel  citoyen se tiendra debout la tête haute avec fermeté et confiance,  assuré  qu’il ne sera en aucun cas  lésé par ce magistrat au motif qu’il est un simple citoyen lambda, opposant, d’une ethnie ou d’une autre ou appartenant aux couches marginalisées dans notre société.

Nous rêvons d’une justice dans laquelle les responsables des plus hautes fonctions soient nommés sur approbation et recommandation du parlement national après avoir convaincu ses membres de leurs compétences à occuper valablement et loyalement lesdits postes. Nous proposons que les fonctions du procureur général de la République, du président et les membres de la Cour suprême, ainsi que le président et les membres de la Cour constitutionnelle soient choisies parmi les magistrats les plus compétents de notre pays et leur nomination soit validée par les commissions spécialisées de notre parlement.

Le Gouvernement :

Le choix des postes ministériels au sein du gouvernement doit être fondé et répondre aux principes de compétence, de sincérité, d'honnêteté et d'intégrité. La pratique courante   de les nommer, comme il s’est toujours fait, sur la base du favoritisme, du clientélisme et à d'autres fins qui ne tiennent pas compte des intérêts de la patrie et du citoyen, doit définitivement cesser. Nous devons  imposer à chaque ministre d'être un professionnel spécialisé dans le domaine et les affaires de son secteur et d'avoir un programme de réformes et de développement de son secteur ayant les objectifs quantifiables et mesurables dans le temps  et dans l’espace. Il devrait pouvoir être redevable ou récompensé pour l'échec ou la réussite à l'atteinte de ces objectifs. La validation de la nomination de chaque ministre dans son poste devrait se faire par le Parlement sur la base du programme qu’il aura à présenter à celui-ci pour le développement de son secteur.

Administration et gestion des institutions publiques :

Les institutions publiques (Banque centrale de Mauritanie, SNIM, Caisse nationale de sécurité sociale, Caisse nationale d'assurance maladie, Caisse de dépôt et de développement, les sociétés de distribution d'eau et d'électricité, la société mauritanienne de commercialisation du poisson et les grandes entreprises portuaires du pays) représentent les piliers de notre économie nationale. Le degré de la bonne ou mauvaise gestion de ces entreprises détermine leur impact et leur contribution au développement économique et social du pays. Le prochain président doit nécessairement concevoir les fondements efficients pour assurer la bonne gestion de ces entreprises. Les politiques de nomination des directeurs généraux de ces institutions, qui ont toujours prévalu sur des bases clientélistes, électoralistes, tribales, régionales et parfois ethniques et partisanes doivent cesser et être bannis pour toujours. Nous en avons assez et vraiment assez de telles pratiques ! Désormais, les directeurs généraux de ces établissements publics devraient être nommés sur la base de concours nationaux ouverts à la plus haute expertise nationale, les meilleurs candidats seront sélectionnés en fonction des résultats de ces concours, qui doivent être réalisés en toute transparence. Après la sélection des candidats les mieux qualifiés, leur nomination définitive doit être soumise à l’approbation préalable des commissions spécialisées du Parlement. Chacun de ces candidats sélectionnés doit nécessairement convaincre ces commissions parlementaires de sa compétence et de son habileté professionnelle à diriger ces institutions.

Croyez-moi Monsieur le Président, la méthode proposée pour ces nominations comporte de nombreux avantages. Bien qu’elle limite un peu vos pouvoirs en matière de nomination absolue de hauts fonctionnaires de la manière dont vous souhaitez et sans consultation aucune, mais elle comporte de nombreux autres avantages : Elle vous évite le choix de la nomination de tel ou tel responsable à la tête de ces institutions, décision qui, souvent, suscite les critiques et les jalousies de toute part. Compte tenu de la transparence de cette méthode de sélection basée sur l'efficacité, le professionnalisme et l'intégrité, elle garantit aussi que ces fonctionnaires seront facilement responsabilisés, car tout ce qui les associe à l’État est un contrat de bonne gouvernance et de bonne gestion signé avec eux.  Chaque fois que l’un deux en viole les termes et conditions, il peut être jugé et tenu pour responsable s’il a commis des détournements de deniers publics ou a failli aux normes de bonne gestion et de gouvernance de ces entreprises

Maximaliser et créer de la valeur ajoutée dans l'économie nationale :

Depuis plus de 60 ans, notre économie dépend de l’exportation de nos richesses minières à l’état brut et sans subir aucune forme de transformation ou d’industrialisation. Assez, assez et assez de ces politiques économiques infructueuses, notre nouveau président devrait élaborer des politiques visant à créer des mégaprojets mettant en valeur nos richesses minières et halieutiques, de manière à garantir la création de valeurs ajoutées à ces ressources. La création d’usines de traitement et de transformation du fer, du cuivre, de l’or, du phosphate, du gaz et du poisson créera de fortes  valeurs ajoutées et engendrera  des  emplois pour les milliers de jeunes chômeurs sans oublier  les apports en devises et leurs  effets positifs sur la balance des paiements et la balance commerciale du pays.

Nous savons que de nombreux sceptiques et défaitistes dans ce pays vous diront que la mise en œuvre de tels projets nécessite la mobilisation de capitaux énormes que le pays n’a pas. Mais la réponse à ces allégations est toute prête. Aujourd’hui, des dizaines de milliards de dollars peuvent être mobilisés sur le marché international, pour financer tout projet économique et financier fiable et rentable et les investisseurs se bousculent pour de tels projets d’investissement à condition de leur fournir un climat d’investissement sain.

Selon les données de la Banque mondiale, la dette de notre pays a atteint  4,23 milliards de dollars en 2017, soit 84% du revenu brut du pays, en 2018 elle a atteint plus de 94% de notre PIB. Interrogeons-nous un peu, où est passé l'argent de cette dette et à quoi il a servi ? A-t-il conduit à élever le niveau de vie des populations ? A-t-il   contribué à réduire le niveau de pauvreté ? Avons-nous atteint l'autosuffisance alimentaire du pays ? Des questions, entre autres, que les contribuables mauritaniens ont le droit légitime de se poser et de trouver leurs réponses.

Investissements :

La création d’un climat propice à l’investissement national et étranger crée un environnement propice à l’attraction des investissements qui contribuent au développement du pays sans l’endetter à outrance. Il est notoire que le capital est frileux et lâche. Il ne s’investit que dans les pays qui remplissent toutes les conditions appropriées qui garantissent la protection et la maximisation de la rentabilité de ces investissements. Il est nécessaire de mettre en place une législation stricte qui protège ces investissements à tous les niveaux que ça soit au niveau de la  justice, de la sécurité, des infrastructures  adéquates, de la stabilité politiques et d’une fiscalité incitative meilleure que dans  les pays voisins qui amèneront  ces   investisseurs à choisir notre pays comme destination pour leurs investissements.

Education, santé et services publics :

 Il est notoire que tout le monde concorde sur l’échec cuisant du système éducatif dans notre pays. Toutes les tentatives de réformes qu’a connues ce système ont échoué l’une après l’autre. L'éducation est la base de tout développement économique et social cohérent comme elle est le ciment nécessaire pour réaliser et consolider l’unité nationale. La réalisation d'une école républicaine qui ne fait aucune différence entre nos enfants au sein d'une même classe est une obligation et un devoir. Un système d’uniforme unifié, subventionné par l’état, doit être introduit dans toutes nos écoles. Ce système aura l’avantage de ne faire aucune distinction entre le noir ou le blanc, ni l'arabe, ni le Pular ni le Soninké ni le Wolof.  Un système éducatif qui épanouit et valorisent  toutes nos  langues nationales et répond aux besoins du développement économique et social doit être conçu et mis en place .La multiplication d’instituts de formation professionnelle répondant aux besoins du marché de l’emploi,  la création  d’opportunités  pour assurer l’emploi des diplômés de ce système et leur intégration dans la vie active, et non pas pour venir  élargir la base du chômage, tels  sont les caractéristiques du système éducatif que notre candidat doit accomplir.

Les services de santé, malgré quelques améliorations réalisées ces dernières années, nécessitent toujours de nombreuses infrastructures, la formation et répartition géographique pour atteindre tous les coins et recoins  du pays afin de réduire les taux de mortalité, d'éliminer les maladies épidémiques et chroniques et d'améliorer le niveau de vie et la santé de la population.

Mais puisque nous parlons des services publics, il est important de relever certaines pratiques éhontées et inacceptables auxquelles les anciens régimes et leurs médias nous ont habitués, en politisant de façon excessive et exagéré les services publics rendus aux populations.  A chaque fois qu’un service public est réalisé que ça soit une école, un centre de santé, un puits, une route ou tout autre service public, quelles qu’en soient la taille, il est décrit comme un cadeau offert par les dirigeants du pays. Cette langue de bois orchestrée par les médias publics fait croire aux pauvres populations que tous ces services publics sont des dons du pouvoir, voire du Président lui-même alors qu’ils sont financées par l’argent des contribuables ou l’aide internationale. Ces services publics, financés par les impôts des contribuables sont des droits légitimes que les citoyens doivent obtenir de plein droit. Le nouveau président doit empêcher ces pratiques éhontées des médias publics et mettre un terme à la politisation des services publics, qui constitue un droit permanent pour tous les citoyens de ce pays.

Héritage humain et groupes marginalisés :

Notre pays continue à souffrir des séquelles de l'héritage humain abominable que certaines de nos populations ont subi durant le période de l’injustice et de la tyrannie des anciens régimes. Le prochain président devrait accorder la plus grande importance à cette question afin que toutes les personnes victimes de ces exactions soient indemnisées équitablement et que des assises nationales de dialogue soient organisées entre les différentes composantes de notre peuple, afin de rétablir et de renforcer la cohésion nationale, comme cela a été fait dans les expériences réussies  de « paix et réconciliation » au Maroc, en Tunisie et dans d'autres pays tels que l'Afrique du Sud et le Rwanda.

L’Unité nationale 

Il est évident qu’aucun développement économique et social cohérent ne peut être envisagé sans créer un climat propice à la réalisation de l’unité nationale entre toutes les composantes de notre peuple. Le lecteur est invité à consulter le document que nous avons préparé dans le cadre du Collectifs des Cadres Mauritaniens Expatriés (CCME).

Ce mémorandum fournit une évaluation approfondie et un diagnostic réaliste de la réalité de l’unité nationale et présente des propositions concrètes. Si elles sont prises en compte, elles seront en mesure d’assurer la réalisation de notre unité nationale souhaitée.

Conclusion

Ce sont là, Monsieur le futur  président, des idées et des suggestions, bien sûr, non exhaustives et non complètes, qui visent à réaliser les aspirations légitimes et justes de notre peuple en matière de développement économique et social, mais à mon avis, si vous  les adoptez, elles conduiront inévitablement à une amélioration significative de la conduite des affaires publiques du pays. Elles sont simples et faciles à mettre en œuvre si les intentions sont bonnes pour les mettre en place.... En bref, elles garantissent la création minimale de l’Etat de droit en réformant la justice et en assurant la bonne gouvernance en préservant les fonds publics dans les entreprises publiques de l’État, ce qui aura un impact important sur la rationalisation et la gestion des ressources de l’État en vue de la réalisation des objectifs de développement économique et social ainsi que l’élimination de la pauvreté et du chômage.  Enfin et surtout, elles conduisent à soigner les plaies des opprimés et des marginalisés de toutes les composantes de notre peuple.  Ces idées s’efforcent également de jeter les bases solides pour renforcer l’unité nationale entre les différentes composantes de notre cher et grand peuple.

Vive la Mauritanie libre, juste, unie, démocratique et tolérante.