Le président de l’Alliance Populaire Progressiste (APP), Messaoud Ould Boulkheïr a tenu, le dimanche 15 juin à midi, dans la salle de conférences de l’hôtel Wissal, une conférence de presse qui aura duré plus de deux heures d’horloge.
Dans son exposé introductif, le président Messaoud a parlé de ses relations, très peu cordiales, avec la presse ; du Mouvement El Hor et de son combat pour l’avenir de son pays ; de ses relations avec le président Mohamed Ould Abdel Aziz et avec le FNDU ; du boycott actif de la présidentielle du 21 juin que prône son parti ; et, enfin, de son patrimoine. Cette sortie du nouveau président du Conseil Economique et Social (CES) intervient après un long silence, une espèce de rupture que Messaoud Ould Boulkheïr dit déplorer. Il reconnaît que ses relations avec la presse n’ont pas toujours été des meilleures, l’accusant au passage, comme, d’ailleurs, une bonne partie de la classe politique, de ne n’avoir pas bien compris le sens de son combat; surtout, de lui attribuer des propos qu’il n’a pas tenus.
Au cours de cette rencontre à laquelle assistaient des observateurs de l’Union africaine, venus examiner le déroulement de la présidentielle du 21 juin, l’ex-président de l’Assemblée Nationale a réaffirmé le boycott, par son parti, de ce scrutin également boudé par onze partis du FNDU. Soulignant les manquements de la CENI, il a justifié sa position par l’absence de règles de jeu définies, en concertation, entre tous les acteurs politiques du pays. Le président d’APP a déploré le retour en force du tribalisme, du clanisme, du régionalisme, tous ces maux qu’il a combattus, des années durant. Une régression provoquée, selon lui, par l’irrespect envers les partis politiques. Et de citer, pour étayer son propos, l’éclosion des cohortes d’initiatives, à l’occasion de la campagne présidentielle en cours. « Avec ces comportements, on nous ramène presque trente ans en arrière, », a déploré le président d’APP qui ajoute, en substance, « la voie actuellement suivie par le pouvoir n’est pas démocratique ». Puis il rappelle les différentes actions qu’il a entreprises, pour éviter, au pays, une révolution, genre « Printemps arabe », que certains politiciens appelaient de leurs vœux. Et de s’interroger : changera-t-on de président pour mettre en place un Etat véritablement démocratique, un Etat de droit qui bannit l’esclavage et la marginalisation, un Etat qui répartit équitablement les ressources du pays et qui donne chance égale à tous ses fils ?« Voilà le sens de mon combat ! », s’est-il exclamé.
Autre interrogation : le président d’APP n’arrive toujours pas à comprendre pourquoi la classe politique s’obstine encore à rejeter toute initiative qui vient de lui. Allusion à sa contribution pour une sortie de crise consensuelle qui représente, à ses yeux, une bonne feuille de route, pour construire un réel Etat de droit, dans les vingt ans à venir. Le président Messaoud s’est, ensuite, longuement appesanti sur ses rapports avec Mohamed Ould Abdel Aziz, rappelant, au passage, ses multiples rencontres avec celui-ci et dont la première remonte à la fronde de 2008, à l’Assemblée nationale. Une entrevue qui cherchait, alors, médiation, entre le président Sidi Ould Cheikh Abdallahi et son chef d’état-major particulier, Mohamed Ould Abdel Aziz. On connaît la suite et la position du président de l’Assemblée nationale de l’époque. « Je ne rencontre pas le président Aziz pour quémander quoi que soit ! », a-t-il tenu à préciser, « Je le rencontre dans le cadre de mes efforts à éviter, à notre pays, des lendemains dangereux. Je le rencontre, parce que je me soucie de l’avenir de ce pays ». Avec le FNDU, même s’il se dit ouvert à toute proposition visant à préserver cet avenir, les rapports restent encore assez distants.
A l’adresse de ses détracteurs qui le prétendent riche, Messaoud Ould Boulkheïr a dévoilé l’état de son patrimoine : trois maisons à Nouakchott, un terrain, trois voitures dont une V8 donnée, gracieusement, par une généreux donateur, quelques dizaines de chameaux, de vaches et de moutons, trois comptes bancaires à Nouakchott… Ould Boulkheïr n’a pas hésité à citer, nommément, ses donateurs. Auparavant, le leader haratine avait évoqué son combat pour l’abolition de l’esclavage, la fondation, dans les années 80, du Mouvement El Hor, indiquant, au passage, qu’il fut le premier à parler de ces problèmes, en 1962, déjà. Le président Messaoud a également décrit la situation économique peu enviable de la Mauritanie. Un pays qui regorge de ressources dont les fruits sont mal répartis entre ses citoyens, un pays où continue de sévir une pauvreté que les goudrons et autres infrastructures de Mohamed Ould Abdel Aziz n’arrivent pas à juguler. Un pays où certains citoyens peinent à disposer du repas quotidien, les diplômés à trouver du travail. Un pays dans lequel on manque de respect aux citoyens. « Ce n’est pas juste ! », c’est exclamé le président du CES.