« Sois courageux, tu en auras besoin. De toute façon, on sera là ». Ce sont les termes, très peu diplomatiques, qu’Emmanuel Macron, le président français, a glissés, à son départ de Nouakchott, à l’oreille d’Ould Abdel Aziz et que les caméras ont immortalisés. Les deux présidents auraient sans doute voulu que les propos restent entre eux, pour éviter le flot des interprétations contradictoires qu’on ne manquera pas de leur donner. En visite en Mauritanie, les 1er et 2 Juillet, pour assister à la clôture du Sommet de l’Union africaine et s’entretenir avec les présidents des pays du G5-Sahel, Macron avait le feu aux trousses. Quelques jours avant son arrivée, deux attaques terroristes avaient en effet touché l’état-major du G5 et le siège de la force Barkhane au Mali, provoquant la mort d’une dizaine d’hommes, beaucoup de blessés et des dégâts considérables. Ni les lieux (Gao et Sévaré) ni les dates n’avaient été choisis au hasard. Sachant que le G5 allait se réunir, les jihadistes voulaient envoyer un signal fort à des dirigeants qui n’arrivent toujours à accorder leurs violons sur la conduite à tenir, face à un danger qui peut frapper n’importe où. Macron et Hollande, avant lui, l’ont dit et répété : c’est aux États eux-mêmes qu’il revient d’assurer la sécurité des territoires qu’ils gèrent. Encore faut-il qu’ils en aient les moyens, soient d’accord et que la Communauté internationale les épaule. C’est loin d’être le cas. La France veut tout régenter dans la région, l’argent promis n’arrive toujours pas, l’armée malienne est aux abois et la Mauritanie freine, pour différentes raisons, des quatre fers, afin de ne pas engager ses troupes contre un ennemi auquel elles se sont déjà frottées et qui ne leur a évidemment pas déroulé le tapis rouge. Lemghaïty, Al Ghallawiya, Tourine, Wagadou, Hassi Sidi, autant de batailles perdues contre ces insaisissables barbus qui n’aspirent qu’à une chose : mourir en martyrs. Échaudé par ces malheureuses expériences, notre guide éclairé n’a plus voulu prendre de risques. Depuis 2011, il n’a plus attaqué personne et a refusé, malgré l’insistance de la France, de participer à la guerre au Mali. Certains ont parlé de « gentlemen agreement » conclu avec AQMI et qui aurait été retrouvé dans les petits papiers de Ben Laden après sa mort. Si tel est le cas, le G5 risque de n’avoir pas plus de chance que l’opération Serval. Engagée depuis près de six ans au Sahel, dans une opération coûteuse, en hommes et en matériel, la France veut se désengager progressivement, en laissant, aux États de la région, le soin d’assurer eux-mêmes leur sécurité. Un combat autrement plus difficile. C’est dans ce contexte qu’il faudra, peut-être, placer la phrase de Macron. Veut-il encourager Ould Abdel Aziz à aller plus loin dans le G5, envoyer des troupes et s’engager enfin sur le terrain, au même titre que les autres ? C’est l’explication la plus plausible mais en échange de quoi notre épicier en chef enverrait-il ses troupes dans une guerre aussi périlleuse ? La France fermerait-elle les yeux, s’il tentait, demain, de tripoter la Constitution, pour rester au pouvoir ? Sacrifierait-elle ses sacro-saints principes de liberté et de démocratie, en échange d’une guerre par procuration ? Un Etat, dit-on, n’a pas d’amis, il n’a que des intérêts. Certes mais, si la France acceptait ce marchandage malsain, rien ne permet d’avancer qu’Ould Abdel Aziz en accomplirait tous les termes. Chat échaudé craint l’eau froide… d’autant plus qu’elle peut bouillir à tout instant.
Ahmed ould Cheikh
Soucieux de moderniser Nouakchott et d’en faire une ville un tant soit peu viable, le gouvernement a décidé de débloquer cinquante milliards d’ouguiyas MRO. Plusieurs départements ministériels sont concernés par cette mise à niveau dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle a tardé.