En 1989, la seule localité de Mouta au Guidimakha se vit brutalement amputée de vingt-sept de ses membres. Épisode – parmi d’autres, hélas ! – d’une tragédie d’exécutions sommaires, déportations et disparitions forcées qui soldaient ainsi le prétexte d’un différend, entre des éleveurs peulhs de Sonko (Mauritanie) et des agriculteurs soninké de Diawara (Sénégal), en réalité alibi pour s’attaquer aux civils de la vallée et du Karakoro. Au Guidimakha, de Boroudji à Woyndouyol, en passant par Sélibaby, Moudji, Feytas, etc., des personnes furent exécutées, d’autres forcées à la disparition. De tels actes barbares se sont également produits à Doubouldé, à Kalinioro et dans d’autres localités relevant du département d’Ould Yengé. Mais, il faut le noter avec regret, aucune ONG nationale ni internationale n’en a jamais fait cas. Chaque année, ce sont les vingt-huit malheureux soldats pendus, pour « célébrer » l’indépendance nationale, qui sont évoqués, alors que pire s’est produit au Guidimakha et dans la Vallée. Quand on parle des civils, ce sont ceux de Sori Malé et de Wothié, au Brakna, qui attirent l’attention, alors que des milliers de disparitions forcées et des fosses communes sont connues au Guidimakha mais restent ignorées des ONG nationales et internationales. Pis : pas un seul mot à leur sujet, dans le « règlement » du passif humanitaire. S’il faut, bien sûr, saluer la prière effectuée, par l’autoproclamé président des pauvres, à Kaédi, et l’octroi de quelques indemnités, aux veuves et orphelins des victimes militaires, il ne faut pas oublier de signaler la volonté d’occulter la réalité des faits, traduite par l’exclusion des victimes.
C’est pourquoi nous revenons sur ce douloureux sujet. Pour dénoncer, d’abord, cette exclusion et condamner, ensuite, le silence coupable de tous, surtout de ceux qui prétendent s’exprimer, en Mauritanie ou à l’étranger, au nom des victimes, tout en en occultant la réalité et les privant, ainsi, de leur droit. Les recommandations adressées à la Mauritanie, par les Nations Unies, exigent des enquêtes, pour jeter la lumière sur les disparitions et les exécutions des vingt-huit soldats. Pourquoi pas celles des civils, éleveurs et agriculteurs, notamment au Guidimakha, passées sous silence depuis 1989 ? Et si la loi d’amnistie de 1993, rédigée et votée par les acolytes des bourreaux, doit être abrogée, il est surtout nécessaire d’identifier toutes les victimes, pour éviter le moindre tort à quiconque. Nous avons écrit, par le passé, pour édifier sur les réalités au Guidimakha en 1989. Il nous faut, maintenant, publier la longue liste des personnes portées disparues, en commençant par celles embarquées, par une patrouille militaire, un matin de Novembre 1989, à Mouta. Il s’agit de Goumbo Diawo, Harouna Diadié Diawo, Goulo Diadié Ba, Moussa Harouna Diawo, Salamata Harouna Diawo, Coumba Harouna Diawo, Demba Harouna Diawo, Penda Harouna Diawo, Issa Harouna Diawo, Ifra Harouna Diawo, Sileymane Harouna Diawo, Yéro Birjam Ba, Thiadi Modi Sané, Koullé Yero Ba, Ali Yéro Ba, Alassane Yéro Ba, Alpha Yéro Ba, Sobé Yéro Baba Ba, Njabu Koliyaajo Diallo, Djeinaba Sobé Ba, Abderrahmani Sobé Ba, Faty Sobé Ba, Penda Sobé Ba, Alassane Mamadou Kane (de Seyndé Ganki), Abdoulaye Modi Ba, Djiba Mody Ba et Diarry Demba Sané.
Amadou Bocar Ba
CP Guidimakha