En vue du 28 novembre : Kaédi fait peau neuve

5 October, 2017 - 01:08

Kaédi se retape, change par endroits, comme une vieille femme mondaine cherchant à cacher sa laideur, son visage ridé par manque d’entretien, espérant apprivoiser  les regards  qui viendront, le 28 Novembre prochain, apprécier sa nouvelle recette  qu’appliquent ces architectes venus d’ailleurs, avec leurs engins, et tirer les habitants de la torpeur languissante  qui semble leur servir de couvert, depuis belle lurette. Pour se hisser à cette stature, la wilaya, la vieille dame juchée sur la colline  qui surplombe la ville,  comme si elle veillait, en permanence sur le sort des gouvernés, se présente avec ce mélange architectural de l’ancienne bâtisse coloniale dont le dôme en tuile a disparu, avec toute son histoire, et les nouvelles concessions, splendides, hâtivement sorties de terre -j’allais dire, de colline- pour agrémenter et donner, à l’environnement, une autre séquence de vie au tempo de la modernité, symbole de  notre indépendance. A regarder le labeur investi, pour réhabiliter l’axe principal qui relie l’aéroport à la wilaya et les deux bretelles qui mènent au stade municipal et à l’hôtel Faboly, on ne saurait passer sous silence l’amour, le grand amour qu’expriment nos gouvernants pour le terrassement, le balisage et le retournement, incessant, du sable et du gravier comme pour marquer, dans le marbre, leur propension illimitée à assouvir leur désir  d’éternité. Pour autant, la nouvelle parure est-elle du goût des habitants ? Ils constatent surtout que certains quartiers, comme Wandama, situé dans une espèce de cuvette, redeviennent, par la force de ces terrassements herculéens, le siège permanent des eaux de pluie qui ne s’écoulent plus. En s’adonnant au vernis de l’embellissement, au détriment de la question, fondamentale, de  l’assainissement, le retour à l’état initial  risque de compromettre, à bien des égards, la volonté de faire, de Kaédi, une ville moderne malheureusement lourde de vieux réseaux d’électricité et d’eau complètement caducs. Ville-hôte des festivités de l’indépendance, Kaédi connaît, par la gazra, une extension qui a abouti à la création de nouveaux quartiers, les uns de moins en moins lotis que les autres, faute d’infrastructures de base. De Dar es-Salaam, à l’Est de la ville, à la base, à l’Ouest, en passant, au centre, par Tinzah, c’est le même décor, depuis qu’ISKAN est passé par là. S’il est d’usage que les actions  de revêtement ou de réhabilitation des infrastructures obsolètes soient liées aux grandes annonces  qui précèdent les grands évènements, pour accompagner les souhaits du chef de l’Etat, on n’en est pas moins incertains que leur mise en œuvre  coïncide avec les aspirations des populations, même si l’on aperçoit, çà et là, à l’occasion, des efforts pour étendre l’alimentation de ces quartiers, en électricité surtout. A deux mois de l’évènement, les citoyens kaédiens semblent voir, sous la loupe de l’indifférence, ce qui, en temps normal, pouvait déclencher une mobilisation citoyenne plus forte que jamais. Cette atmosphère délétère, dont la légitimation se justifie, peut-être, par un quotidien ponctué de difficultés, pour les uns et les autres, à joindre les deux bouts, constitue, à n’en pas douter, un boulet manifeste d’incohérence, à la hauteur de l’évènement. Face aux imprévus et aux exigences de l’accueil, l’interpellation des filles et fils de Kaédi devient un impératif, pour donner davantage d’éclat et de de réussite aux festivités marquant la Fête nationale. National, cet appel au sursaut interroge pourtant, d’abord les cadres de la ville qui s’illustrent, d’habitude, par leur dévouement et leur engagement dans des évènements similaires, histoire d’apparaître aux premières loges des serviteurs de la République. En attendant que les populations s’approprient  toutes les dimensions de l’évènement, force est de constater que le temps qui nous sépare du 28 Novembre se réduit, de jour en jour et de manière disproportionnée à ce que devraient être les ambitions des « gens du pouvoir », têtes de pont d’une mobilisation individuelle et collective.

                                                                                             

BiryDiagana, CP Gorgol