Après avoir affirmé, solennellement, lors de l'ouverture et de la clôture du dernier dialogue, que "les propositions et recommandations requérant des modifications constitutionnelles seront soumises au plébiscite populaire par voie référendaire", Ould Abdel Aziz change, subitement, son fusil d'épaule : plus question d'une consultation populaire qui coûtera les yeux de la tête. Six milliards, selon notre nouvel Iznogoud, celui qui veut devenir Calife à la place du Calife, qui détient les cordons de la bourse et ne les délie que pour la ''bonne'' cause. Place donc au congrès du Parlement. Moins cher et moins risqué pour qui détient majorité confortable en celui-ci. L'opération de charme pour convaincre les parlementaires commence : terrains bien placés, invitations, petits services entre amis, promesses en tout genre… et, maintenant, tirez les premiers, messieurs les députés ! Comme prévu, la salve fait mouche. Reste à convaincre une trentaine de sénateurs de choisir la "bonne voie". La démarche se révèle plus périlleuse que prévu. Les papis font de la résistance et… patatras ! Rejettent, à une large majorité, les amendements constitutionnels. Coup de tonnerre dans le camp de la majorité. Qui observe, pendant plusieurs jours, un silence de cathédrale. Attendant que son chef prenne les devants. Ce qu'il fait, cinq jours plus tard, en nous offrant une nouvelle volteface : fi de l'impasse " Congrès du Parlement " ! Quoique coûteux, le referendum, désormais paré de toutes les vertus, redevient solution, que dis-je, "La" solution ! Un yoyo auquel nous a habitués notre guide éclairé dont la constance est loin d'être la vertu cardinale. Mais, au-delà de ce revirement et des justificatifs tirés par les cheveux de l'article 38 de la Constitution, c'est la morale politique qui prend un sérieux coup. Quand on choisit une voie et qu'on échoue, en prendre une autre par entêtement est tout aussi moralement condamnable que politiquement incorrect. Mais que veut dire morale dans un pays où l'on peut renverser, impunément, un président élu, nommer qui l'on veut où l'on veut, sans tenir compte d'aucun critère objectif; faire main basse sur ses richesses et fouler du pied ses lois, textes et règlements ? De quelle morale se targuer, quand on considère le texte fondamental qu'est la Constitution comme un simple bout de papier qu'on peut changer à sa guise ? Peut-on parler de morale dans un pays où il n'y en a plus, où les laudateurs et autres flagorneurs se muent en donneurs de leçons ? Que veut dire morale quand le président d'un pays pauvre et exsangue, où les salaires sont parmi les plus bas du Monde, se voit mieux payé que ses homologues de Russie, de France, d’Angleterre ou d'Allemagne, pour ne citer que ceux-ci ?
Ahmed Ould Cheikh