Il nous a fallu trois semaines. Vingt et un jours d’un suspense insoutenable. Cinq cent quatre heures d’attente, de rumeurs et de supputations. Avant qu’Ould Abdel Aziz ne daigne lever un coin du voile sur ce que sera son accompagnement, au début de son deuxième – et réputé dernier – mandat. Trois semaines au cours desquelles tout et son contraire furent avancés. Oui, oui, Ould Mohamed Laghdaf sera maintenu, avec la majorité de ses ministres. Non, non, c’est un expatrié qui viendra se frotter à la dure réalité de son pays. Mais après quelques jours de bouillottement, plus personne ne s’avançait à prédire ce que pouvait bien mijoter le président de la République. Et la surprise fut telle que même le plus courageux des bookmakers n’avait parié un sou, sur Yahya Ould Hademine. Natif, comme son prédécesseur, du grand Est – une condition apparemment sine qua none au poste de Premier ministre chez les « Rimiens », pour reprendre un terme cher à notre Derwichette nationale – le ministre de l’Equipement et des transports sortant cultive la plus extrême discrétion sur les relations, privilégiées, qu’il entretient avec notre leader bien aimé. Alors qu’il était directeur de l’ATTM, la filiale de la SNIM qui s’occupe du BTP, c’est, en effet, à la croisée d’Ould Abdel Aziz que l’homme prit goût à la politique. Grand soutien de la rectification de 2008, il sera directeur de campagne du candidat Aziz au Guidimakha, en 2009 et en 2014. Et propulsé, dans l’intervalle, à la tête du ministère de l’Equipement et des transports. Un secteur dont le Président faisait la cheville ouvrière de son premier quinquennat et où il lui fallait un homme de confiance. Yahya, qui associe l’efficacité de l’école de la SNIM à la docilité, est le prototype même de la perle rare dont le président risque de ne pas se défaire avant longtemps.
C’est ce qui explique, d’une part, sa longévité au gouvernement – à un poste sensible, de surcroît – et son ascension, d’autre part. Même si elle s’inscrit en porte-à-faux des promesses du candidat qui avait claironné, à maintes reprises, la priorité désormais accordée aux jeunes et aux femmes. Certes, sept membres du sexe dit faible (un record) font leur entrée au gouvernement mais les jeunes en restent les grands absents. Ils se consoleront, peut-être, en se disant que cette équipe, qui conserve la même ossature que la précédente, a été concoctée dans l’urgence. Et qu’ils auront plus de places, dans la prochaine. Tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir.
Ahmed Ould Cheikh