Objet : Risque Santé populations Tasiast et cheptel
Chers messieurs,
Tout d’abord, un court aperçu, pour nous rafraîchir la mémoire et nous édifier davantage sur l’or, notamment en ses valeur et risques liés à son traitement. Nous avons besoin, préalablement, de connaître, avec précision, son importance et son rôle, dans l’économie mondiale. Ceci nous amène à dire qu’il est la matière la plus chère et prisée, aujourd’hui, sur notre planète. Voici, en quelques mots, son rôle dans l’économie mondiale.
En un, son dépôt, dans les banques d’émission des Etats et de la Banque mondiale, garantit la convertibilité de leurs monnaies en devises, pour satisfaire et favoriser les fluctuations, sur des bases solides, des échanges, les équilibres des balances de paiement et les financements des investissements extérieurs inter-états et de la Banque mondiale. En deux, c’est de l’importance de son dépôt, dans les banques précitées, que découle la valeur monétaire de chaque pays déposant. En trois, voici sa cotation actuelle sur le marché de l’euro : le lingot d’un kilo d’or brut est à 39.000 livres et le gramme à 39 livres ; pour l’or fin, 40.000 livres le kilo et 40 livres, le gramme. Sa pureté est exprimée en carat (mesure historique).
D’une façon très raccourcie, rappelons, à ce sujet, la déclaration historique du Général de Gaulle, le 4 Février 1965. Elle indiquait que le volume circulant de dollars, sur le marché mondial, était beaucoup trop supérieur aux réserves américaines en or, entraînant, en conséquence, d’importantes inflations dans tous les pays. Et, qu’à partir de cette date, la France demandait le remboursement, en or, de ses avoirs en dollars. La France fut suivie par les cinq autres pays européens, ainsi que l’avait prévu de Gaulle. C’est à partir de cette position française, courageuse et difficile à prendre, à l’époque, que des équilibres internationaux ont commencé à s’installer, dans les rapports économiques mondiaux.
Rappelons, enfin, pour votre enseigne, que Tamaya, symbole du projet, est un arbre généreux, dans le pays, par ses trois bénéfiques apports ; à savoir : ses fleurs et ses feuilles sont une excellente nourriture, pour toute espèce animale, et un heureux secours, surtout en période de soudure ; sa gomme est de qualité supérieure ; ses écorces sont le meilleur produit pour tanner les peaux. Ceci dit, nous craignons fortement que votre projet ne soit pas à la hauteur de la générosité de notre arbre.
Des procédures bafouées
Chers messieurs, après ce prélude impératif à meilleure compréhension du sujet, nous avons bien reçu, par voie de presse, votre dernier communiqué qui annonce, au-delà del’imposture, le démarrage de l’enquête commodo-incommodo, sur le projet Tamaya, omise dans le communiqué de Benechab, et révèle, en même temps, des zones d’ombre. Le commentaire est idéaliste sur tous les problèmes qui peuvent se poser ou surgir sur le projet et leur identification, dans le processus de l’EIE. Pourtant et pour raisons environnementales, l’EIE semble omettre la nécessité de retourner les stériles à leur terre initiale, en fin d’exploitation, au lieu de les stocker de manière permanente.
Poursuivant les analyses de cette imposture, on constate les erreurs suivantes de procédure. Elles constituent bien des infractions à notre réglementation. Primo, la consultation secrète de Benechab, le 9/11/2016 ; secundo, le communiqué, antérieur à l’événement censé l’avoir précédé ; tertio, absence d’enquête commodo, pourtant première obligation de la procédure ; quarto, dépôt du dossier EIE (contenu ignoré) à l’approbation du MEDD, avant les résultats de l’enquête ; quinto, probabilité d’un même dépôt aux Mines. Il est donc démontré que la consultation de Benechab était bel et bien la charrue avant les bœufs, comme le dépôt, sans date, du dossier du projet Tamaya, pour approbation au MEDD.
Zones d’ombre et leçons d’une belle prose
Nous relevons, tout d’abord, que le permis d’exploration N°428 est dénué de la date de son obtention qui devait, normalement, figurer, avec ses références juridiques. Par ailleurs, si l’impact négatif a été reconnu, enfin, il a été minimisé au maximum, pour le traitement de quinze millions de tonnes de minerai aurifère, alors que les réactifs séparateurs sont nécessairement utilisés, en abondance, pour une quantité aussi importante.
Est-ce que l’étude de l’état initial annoncée couvre la période d’Août 2010 à fin 2016 ou uniquement l’incidence toxique de Tamaya ?S’agissant de la sécurité des vies humaines et leurs biens, l’état actualisé des lieux, sur le niveau de la pollution du site de la mine de Tasiast, après six ans d’exploitation, est une condition sine qua none à toute approbation. Ce qui pose, à la fois, les problèmes de la fraîcheur de l’étude et de la notoriété de ses auteurs, en la matière. Ce constat rafraîchi dudit site doit être un préalable à l’approbation de l’EIE du projet Tamaya, pour mesurer, en temps utile, le niveau résiduel du risque mortel, après une expérience suffisante d’exploitation, « compte-tenu que l’apparition de son risque est latente ». Cette contrainte devrait être même une « curiosité technico-intellectuelle » et une référence d’expérience en ce domaine, pour vous et les ministères concernés. Il est à retenir, pour les mémoires et l’histoire, que tant qu’il y aura un gramme d’or, en Mauritanie, à traiter, le risque mortel sera systématiquement posé. Par ailleurs, la fusion préméditée, entre TML-SA et TML est-elle approuvée par les ministères des Mines et le fisc (les finances) ? Si oui,l e pays sera confronté à une perte de maîtrise sur sa plus importante richesse. Pourquoi ? Parce que c’est le signal, fort, que l’or mauritanien a émargé sur le marché de thieb thieb cette ingénieuse production de l’intelligence mercantile mauritanienne où se recycle, à l’heure actuelle, tous les produits de vols dans le pays, y compris l’esclavage.
L’avis signé, le 11/01/2017, par le préfet d’Akjoujt affirme qu’il n’y a pas de conflit de compétences avec Chami mais aucune carte géographique n’est présentée, pour lever le doute, d’autant plus que le gisement se situe à plus de quinze kilomètres au Sud de celui TML-SA. Il précise aussi que son avis n’est pas domicilié à sa mairie d’Akjoujt. Nous remarquons, également, que le projet Tamaya a une durée de vie de trois ans d’exploitation intensive, sans précision, ni de la quantité d’or, en lingot, ni de sa qualité, en carat, bien que le gisement, qualifié de fosse ou puits, soit à ciel ouvert, avec une séparation naturelle entre l’or et le stérile. A cet égard, il est important que les Mauritaniens connaissent, avec précision, la quantité réelle et la teneur en carat de l’or qui sortira de leur précieux gisement à ciel ouvert, d’autant plus que la teneur est la seule base de la valeur commerciale.
Il est aussi rappelé que la durée de ce projet dépend, exclusivement, de la compétence de l’Etat et non du désir de l’opérateur-commerçant. C’est aisément compréhensible : l’Etat planifie sa politique économique sur une stratégie de développement répondant à ses besoins à court et long termes. A partir de cette stratégie, il fixe les besoins de financement, directs et indirects, assis d’abord sur ses possibilités nationales où entrent, en priorité, ses richesses naturelles. A partir de là, il définit, annuellement, leurs apports, répartis entre ces différentes richesses et les quantités exportables, pour satisfaire les nécessités du financement de sa politique de développement. Il est naturellement évident que ledit projet Tamaya s’inscrit bien sur cette plage : la ductilité de la durée de son exploitation dépend, donc, exclusivement de l’appréciation de l’Etat qui mesure, à la fois, les nécessités économiques et sociales. Cette durée est une décision souveraine qui peut être prorogée à dix, quinze ans ou plus, selon les besoins mesurés de l’Etat, à partir desquels il opère les ajustages, limite et harmonise, graduellement ; les exportations annuelles de ses ressources à ses besoins.
Impact économique
Aucun chiffre n’est donné, pour corroborer l’augmentation des revenus de l’Etat mauritanien, à l’heure où tout est mesurable préalablement. S’il ne s’agit, uniquement, que des 3% de redevances, après déduction des amortissements et des frais d’exploitation non suivis ni contrôlés, par les Mauritaniens, comme dans les cas de MCM et TML-SA, nous ne pouvons certainement pas nous réjouir d’être arnaqués à ciel ouvert, dans un passé relativement récent et le présent. C’est une « Porte béante » (réf : Le Prélude). Les 3% sont moins qu’une pitance et inférieurs à une aumône charitable, surtout quand il s’agit d’or 24 carats, sommité de pureté du métal jaune. Or, l’or mauritanien est, précisément, reconnu de 24 carats, ce qui porte le manque à gagner du pays à 93%, par estimation relative.
Si le projet Tamaya est autorisé pour une exploitation triennale, il sied, au ministère des Mines, de prendre les précautions nécessaires pour préserver le pays du risque de brader une partie importante de sa richesse de bonne teneur, comme les mines d’or d’Akjoujt et de Tasiast dont la teneur déclarée, par les opérateurs, est de 24 carats, paraît-il. Avant de donner son aval à l’exploitation de la mine de Tamaya, il doit, nécessairement, exiger la fourniture d’un compte d’exploitation et un bilan prévisionnels, à auditer pour certification de leur sincérité, par au moins trois experts différents, aux fins d’avoir un tableau de bord pour le suivi et le contrôle des postes de charges et d’amortissement duditprojet. L’usine de TML-SA est déjà largement amortie.
La modération usuelle, en prévisionnel, est de 10 à 15% de marge d’erreur, en plus ou en moins, mais son montant conventionnel doit être arrêté en accord préalable, entre les parties. Après ces formalités, la partition des intérêts est également à fixer, sans référence aux pratiques revêches précédentes, car les exploitations permanente et temporaire n’ont pas les mêmes seuils de tolérances.Toute autre adéquation ne peut s’expliquer d’une façon recevable et il ne restera que s’esbigner sur le manque de préservation de l’intérêt supérieur du pays, chose historiquement grave.
Impact économique régional
Sinon préciser que régional est au singulier, pour marquer l’exclusion de Chami et annoncer l’agrandissement d’El-khoubra, tirée du milieu de la nappe du territoire de ce dernier vers Benechab, il n’y a pas d’augmentation prouvée, spectaculaire régionale. Il indique aussi que l’économie régionale est au singulier, ce qui veut dire que Chami est exclu, d’office, des retombées économiques d’une richesse au centre de son territoire. Voilà qui est juste ? Quels sont, finalement, les périmètres de TML-SA et TML ? Chami, parent pauvre, est exclu de la seule ressource qui assurerait sa survie. Larmes aux yeux, il supportera, tout seul, les souffrances de ses administrés et de leur cheptel, menacés des effets mortels du traitement du minerai au cyanure, et le poids de la sécurité de TML-SA et TML. Il ne sera même pas accompagné aux cimetières, pour l’enterrement de ses morts cyanurés. Mais, il a la promesse, non ferme, qu’il sera, à la fin de l’exploitation de TML, dans trois ans, décoré du mérite national.
Chers messieurs, ce tripatouillage, dans l’irrespect total du cheminement normal des procédures du pays, accompagné du si peu d’attention accordée, aux populations environnantes, sur les plans de la santé et du social, est de nature, à peine voilée, de démontrer et minimiser la maturité du mauritanien. Au lieu d’expier,vous tentez de le rendre imperceptible ; sinon, de le feindre inaperçu. C’est tout de même surprenant et contraire aux plus élémentaires règles universelles de courtoisie, même, si l’aveuglement du gain facile, en Mauritanie, est bien présent.
Scandale à ciel ouvert ?
L’analyse fine des contenus des deux communiqués du 9/11/2016 et du 13/01/2017 nous offre, en lecture, une bonne littérature platonique, sans arguments crédibles, ni chiffres convaincants, nous rappelant les promesses, non tenues, de «l’expansion de TML-SA de 8.000/tj à 38.000/tj », annoncées, par communiqué Kinross du 29/04/2013, toujours lettre morte, à ce jour. En somme, voilà votre comportement, peu chevaleresque, dans le pays ; la faiblesse du revenu de l’Etat, sur l’or ; le silence des intellectuels, particulièrement des économistes et de leurs auxiliaires financiers et statisticiens ; réunis dans la marmite bouillante de la Mauritanie, avec des relents, de plus en plus perceptibles, ces derniers temps, d’un scandale probable de l’or mauritanien.
Et voilà comment nous, en tant que partie doublement concernée, réitérons nos appels, nos observations et nos remarques, déjà publiés dans Le Calame n°1050 du 23 Novembre 2016. Nous réservons, de surcroît, tous nos droits d’ester, au moment le plus approprié, pour défendre les intérêts des populations Tasiast menacées, dans leur vie et celle de leur bétail, seule source de leur subsistance, et leur droit au dédommagement, commenous le rappelions déjà, dans l’article précité du Calame. En conclusion, la responsabilité historique des ministères MEDD et des Mines est engagée, sur les risques mortels des populations et de leur cheptel à Tasiast, et les intérêts supérieurs du pays, sur l’or de cette région. Les mémoires et l’histoire retiendront que l’avenir de l’or mauritanien dépend du résultat du traitement du projet Tamaya. A demain, donc.
Brahim Ould Boïdaha
- : Document amplié au MEDD et MINES, au wali de Nouadhibou et au Calame.