Mohamed Ould Abdel Aziz, l’a dit, le 29 septembre dernier, au Palais des congrès de Nouakchott, lors de l’ouverture du « dialogue national inclusif », entre le pouvoir et une partie de l’opposition : « Les propositions et recommandations requérant des modifications constitutionnelles seront soumises au plébiscite populaire par voie référendaire ». Il le répétera, de nouveau, trois semaines plus tard, à la clôture de ce même dialogue dont « les conclusions, claires et limpides, seront appliquées, parce qu'elles procèdent, uniquement, de l'intérêt général du peuple tout entier et des générations futures. L’accord fondamental recommande la suppression du Sénat, une option objective que certains peuvent désapprouver, mais aucun parti, aucun groupe précis, encore moins individu, pas même le Président, ne peut imposer, au peuple mauritanien, son opinion. Un référendum sera organisé à ce propos et personne ne pourra l’empêcher. Seul le peuple sera l'arbitre, parce que la Constitution demeure la seule référence en ce sens », Mieux, les deux parties prenantes au dialogue se mettaient d’accord pour une consultation populaire avant la fin de l’année 2016. Vous connaissez la suite. L’année s’est achevée sans que personne n’évoquât le sujet. Des problèmes budgétaires ? Le risque de voir le projet rejeté par le peuple ? Ou, comme on le pressentait, l’irrespect de la parole donnée. Un peu des trois, certainement. A la fin de l’année, les caisses de l’Etat étaient vides et un referendum coûterait entre un à deux milliards de nos ouguiyas, sans aucune possibilité d’appui extérieur, pour un projet aussi inutile que coûteux. Rien n’indiquait, aussi, que les populations, fatiguées par la cherté de la vie et plus du tout aguichées par les slogans creux, accepteraient de se laisser embarquer dans une consultation sans aucun impact sur leur quotidien. Pire, le changement d’hymne national ou l’ajout de deux bandes rouges au drapeau sont loin de susciter leur adhésion. C’est, probablement, ce qui a motivé la volte-face d’Ould Abdel Aziz décidé à revenir sur une parole pourtant maintes fois ressassée, comme on l’a vu. Il a, d’ailleurs, promis tant de choses, par le passé, que plus personne ne s’en rappelle. Il nous avait juré, par tous les saints, qu’il mettrait fin à la gabegie, au clientélisme et au népotisme, que plus personne ne s’engraisserait sur le dos de la ‘’bête’’, qu’il ne choisirait que les meilleurs d’entre nous, qu’il n’accepterait, dans son camp, ni gabegistes ni flagorneurs, qu’il serait, en un mot, juste. Huit ans plus tard, le résultat est là : il se passe de commentaires.
Pour préparer le terrain à ce retournement spectaculaire, le gouvernement a pris soin d’amadouer les parlementaires : distribution de terrains à gogo, multiplication d’audiences présidentielles aux sénateurs appelés à être dissous et tutti quanti… avant de lâcher, le 16 Janvier dernier, la bombe : voilà les députés et sénateurs informés du choix de la voie parlementaire, pour la révision recommandée par le dialogue national inclusif. On évoque des problèmes de trésorerie susceptibles de justifier cette option à tout le moins hasardeuse, les sénateurs ne manquant aucune occasion, en privé, d’exprimer leur rejet d’une réforme constitutionnelle qui les enverra au chômage. Et les députés sont, également, loin d’être acquis. A moins de trouver une astuce pour encadrer le vote et garantir ainsi son résultat : « ce qui compte dans un vote », disait Staline, « ce n'est pas ceux qui votent, ce sont ceux qui comptent ». En russe, cela pouvait signifier : « roublards comptant des roubles ». En français, « les bons comptes font les bons amis ». Et en langues nationales mauritaniennes ?
Ahmed Ould Cheikh