Au moment où l’on célébrait la Journée mondiale de la lutte contre la corruption, la presse a publié une information rapportée par des sénateurs de ce que l’on appelle la majorité présidentielle selon laquelle Ould Abdel Aziz leur a déclaré, lors de la récente rencontre qu’ils ont eue avec lui, que le directeur de la Société française Balloré lui a proposé, dans son bureau, une somme de dix millions d’euros en guise de corruption en contrepartie de la gestion du Port de Nouakchott.
L’opinion publique a attendu une réaction ou un démenti à cette information grave qui nuit à la réputation et à l’honneur du plus petit fonctionnaire, à plus forte raison d’un Chef d’Etat auquel on propose de manière directe une corruption, sans que cela prête à aucune conséquence. Cela d’autant plus que le Loi 2016.014 relative à la lutte contre la corruption punit en son article 3 ‘’toute personne qui promet, offre ou accorde à un agent public, directement ou indirectement’’ une corruption, comme elle punit en son article 20 ‘’toute personne qui, de par sa fonction ou sa profession, permanente ou provisoire, prend connaissance d’une ou de plusieurs infractions prévues à la présente loi, et n’informe pas à temps les autorités publiques compétentes’’. La sanction est aggravée si l’infraction est commise par un élu (art.3).
Si la déclaration de Ould Abdel Aziz a soulevé une large indignation parmi l’opinion publique, elle n’a cependant surpris personne, car tout le monde connait le caractère déprédateur de ce régime ainsi que le rapport malsain de son chef avec l’argent et les méthodes condamnables dont il use pour l’amasser. Ils savent que la gabegie a atteint un tel degré dans le pays que parler de corruption ou de concussion est devenu chose naturelle comme si on parlait du temps qu’il fait ou de toute autre banalité de la vie quotidienne. Désormais, n’importe quel directeur de Société peut proposer directement au chef du pouvoir, de manière explicite et dans son bureau, une corruption sans que celui-ci y trouve la démarche inconvenante et sans que cela ait la moindre conséquence ou n’ouvre la voie à des poursuites. Si le directeur de Balloré ne savait pas, à l’avance, que la voie vers la poche de Ould Abdel Aziz est carrossable, il ne se serait pas permis de proposer une corruption à un Chef d’Etat dans son bureau et ne lui aurait pas précisé le montant d’une telle ’’transaction’’, cela dans une conjoncture internationale où aucun chef d’entreprise n’ose franchir un tel pas s’il n’est pas certain qu’il ne se trompe pas d’interlocuteur.
En effet, tout le monde sait que Ould Abdel Aziz et son entourage immédiat ne reculent devant rien pour amasser les biens et ne répugnent à aucun moyen pour y parvenir, depuis la corruption, l’entreprenariat et le courtage jusque et y compris le ramassage des ordures.
Ils s’enrichissent chaque jour davantage au moment où les citoyens sont écrasés par la pauvreté, la montée des prix, la cherté de la vie et la médiocrité des services de base ; au moment où les travailleurs souffrent de la faiblesse et du blocage des salaires ; au moment où la jeunesse est abandonnée au chômage et au désespoir ; au moment où les habitants des villes ne sont plus en sécurité dans leurs vies et dans leurs biens.
Leurs sociétés et leurs entreprises prospèrent au moment où les autres sont exclus des marchés publics et matraqués par les impôts ; au moment où les petits commerçants sont soumis aux tracasseries quotidiennes et aux taxes exorbitantes.
Cette situation interpelle la conscience de tous, car elle touche les intérêts, les droits et l’honneur de tous. Cette situation n’est pas une fatalité, mais elle ne changera que par les efforts conjugués de tous. Nous avons une patrie où il y a de la place pour tous et des richesses qui peuvent faire le bonheur de tous. Notre pays dispose de potentialités incommensurables et, chaque jour, on y découvre de nouvelles richesses qu’il serait inacceptable de laisser entre les mains d’une bande de prédateurs sans scrupules. Notre peuple a droit à une vie meilleure et nous avons tous le devoir de lutter pour qu’il recouvre ce droit.
Nouakchott, le 24 Décembre 2016
La Commission de Communication