Une délégation mauritanienne prend part à la deuxième édition des Jeux Olympiques de la Jeunesse 2014 (JOJ-2014) à Nanjing (Chine). Dirigée par le secrétaire général du Comité National Olympique et Sportif Mauritanien (CNOSM), Mohamed Abdellahi Ould Nagi, cette délégation comprend deux athlètes (un garçon et une fille), un pratiquant de taekwondo et deux entraîneurs. La participation mauritanienne n’a été possible que grâce à l’esprit de sacrifice et à la volonté du CNOSM de bannir la politique de la chaise vide, chère à nos gouvernants.
En dépit de plusieurs correspondances et relances auprès du ministère de la Jeunesse et des sports, le gouvernement n’a pas consenti prendre en charge les frais inhérents à un tel déplacement. « C’est une habitude qui semble prendre corps au sein du département », déplore un observateur de la scène sportive, dépité par de telles pratiques. De fait, il aura fallu bien d’ingéniosité et l’attitude compréhensive de la Solidarité Olympique (SO), pour permettre, à la Mauritanie, d’être dignement représentée en Chine. Au début de l’année, chaque comité olympique, présente à la SO, un programme annuel. Une fois approuvée, le CNO l’exécute. Et à la fin de l’année, un rapport financier et administratif est envoyé à la SO, qui peut l’approuver par quitus ou le rejeter.
Devant le mutisme du ministère des Sports, le CNOSM a dû, au cours de ce mois d’août, présenter un nouveau programme à la SO qui a consenti à la modification du précédent plan, comportant des activités culturelles et la célébration de la Journée Olympique, pour y inclure d’autres chapitres (perdiem de la délégation, tenues de défilé, communication, médicaments, présents et équipements) dans la contrepartie financière. Le CNOSM a dû ainsi prélever une enveloppe financière sur son propre budget, pour permettre, aux sportifs, de se rendre en Chine, face au refus des autorités de prendre leurs responsabilités. Ce n’est pas une première. Lors des Jeux Islamiques en Indonésie (2013), le ministère des Sports n’avait pas voulu prendre en charge la contrepartie (hébergement, restauration et équipements de la délégation), alors que cinq billets avaient été mis à la disposition du pays. Le CNOSM n'a jamais voulu porter sur le plan extérieur ses manquements notoires préférant toujours «laver le linge sale en famille», selon l'expression chère à son président, Dr Mohamed Mahmoud Ould Mah. Cette fois ci, le CNOSM a décidé de prendre le taureau par les cornes en portant pour la première fois ce différend devant le CIO en raison des obligations liées à sa participation.
Outré par une telle attitude, le comité exécutif du CNOSM cherche à savoir. Dans un projet de lettre adressé à la ministre de la Culture, de la jeunesse et des sports, les membres de cette instance demandent « les raisons de l’absence de prise en charge, totale ou partielle, par l’Etat, des délégations sportives, ayant occasionné la non-participation de notre pays à de grands événements sportifs : Jeux Africains de la Jeunesse (Maroc 2010) ; Jeux de la Francophonie (2013) ; Jeux Islamiques en Indonésie (2013) ; Jeux Africains de la Jeunesse (2014) ; Jeux Olympiques de la Jeunesse (Chine 2014) ».
Jamais un Comité National Olympique (CNO) n’a pris en charge, au cours des manifestations olympiques, la participation d’un Etat donné. Partout dans le Monde, en France comme ailleurs, les CNO reçoivent des subventions étatiques, en plus des appuis de la SO. Voilà pourquoi les membres du Comité Exécutif exigent « le rétablissement de la subvention de l’Etat au CNOSM, pour son fonctionnement, qu’il a cessé de percevoir depuis 1997, alors que tous les autres CNO du Monde la perçoivent, en plus de l’aide de la Solidarité Olympique ». Ailleurs, on semble avoir gravi des marches. Au Sénégal, par exemple, c’est désormais le CNO qui accorde des subventions aux fédérations. Des galas annuels sont organisés, pour récolter des fonds destinés à renflouer, de manière équitable, les caisses de plusieurs associations sportives. Article 27 paragraphe 6 «Les CNO doivent préserver leur autonomie et résister à toutes les pressions, y compris, mais sans s'y restreindre, les pressions politiques, juridiques, religieuses ou économiques qui pourraient les empêcher de se conformer à la Charte olympique.
Les faux bonds des sportifs mauritaniens aux grandes manifestations ne semblent guère émouvoir. En mai dernier, la Mauritanie, présidant pourtant aux destinées de l’Union Africaine, avait brillé par son absence aux Jeux Africains de la Jeunesse de Gaborone. Article 27 paragraphe 3«Les CNO ont compétence exclusive pour représenter leurs pays respectifs aux Jeux Olympiques et aux compétitions multisportives régionales, continentales ou mondiales patronnées par le CIO. En outre, chaque CNO a l'obligation de participer aux Jeux de l'olympiade en y envoyant des athlètes ».
Mais les Etats ne sont-ils pas tenus dans l’obligation de prendre part aux grands rendez vous (Jeux Olympiques) et de ne point s’ingérer dans les affaires des CNO ? Les fonctionnaires des ministères des Sports ne sont pas habilités à diriger les délégations olympiques. Mais l’ancienne ministre Cissé Mint Boyde avait fait adopter un arrêté, contraignant les délégations sportives à être dirigées par un cadre du ministère. La Mauritanie n’est cependant pas seule en telle attitude. La Gambie a fait fermer son CNO, avant de revenir sur cette décision, suite aux injonctions du Comité International Olympique (CIO). Article 28 paragraphe 4 «Les gouvernements et autres autorités publiques ne désigneront aucun membre d'un CNO. Toutefois, un CNO peut décider, à sa discrétion, d'élire comme membres des représentants de ces autorités».
Enfin, les membres du Comité Exécutif rappellent, charte olympique à l’appui, la primauté de celle-ci sur les textes nationaux relatifs au sport, l’indépendance et l’autonomie du CNO, des fédérations nationales sportives et les obligations des Etats, tenus de déléguer la gestion du sport à des structures élues : CNO, FNS, etc. Article 27 paragraphe 9 en dehors des mesures et sanctions prévues en cas de transgression de la charte olympique, la commission exécutive du CIO peut prendre toutes décisions appropriées pour la protection du Mouvement olympique dans le pays d'un CNO, notamment la suspension ou le retrait de la reconnaissance d'un tel CNO, si la constitution, la législation, ou d'autres réglementations en vigueur dans ce pays, ou tout acte d'un organisme gouvernemental ou de toute autre entité, ont pour effet d'entraver l'activité d'un CNO ou la formation ou l'expression de sa volonté. Avant de prendre une telle décision, la commission exécutive du CIO offrira au CNO concerné la possibilité d'être entendu ».
Si le pays venait être suspendu, cela va porter un rude coup aux activités sportives. D'autant que la Mauritanie ne pourrait prendre part à aucune manifestation sportive.
Soulignons que le coup d’envoi de la deuxième édition des JOJ-2014 a été donné, samedi, à Nanjing (Chine), par le président chinois, Xi Jinping, au Stade olympique, en présence de représentants de plus de deux cents pays. La cérémonie a été rehaussée par la présence de plusieurs personnalités, comme le secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-Moon, du président du CIO, l’Allemand Thomas Bach, ainsi que de son président d’honneur, le belge Jacques Rogge. Thème de la cérémonie : « Eclairer l’avenir ». Plus de quatre mille artistes et groupes ont participé à l’extraordinaire spectacle, extraordinaire offert au public. Ces jeux, dont la première édition eut lieu en 2010, à Singapour, se tiennent tous les quatre ans, en alternance été/hiver, comme les Jeux Olympiques.
THIAM Mamadou
Encadré
Nankin 2014 : les JOJ veulent grandir
La deuxième édition des JOJ d’été se déroule du 16 au 28 août 2014, à Nankin, en Chine. Ces JO destinés aux athlètes âgés de 15 à 18 ans veulent grandir, après une première édition mitigée, en 2010, à Singapour. Ils devraient rassembler environ 200 délégations et 3 800 participant(e)s. Vingt-huit disciplines sont au programme, dont des sports qui feront leur apparition aux Jeux olympiques en 2016, comme le golf ou le rugby à 7. Par ailleurs, les sports qui prétendent intégrer le programme olympique, comme le wushu, l’escalade sportive, le roller et le skateboard seront en démonstration à Nankin, à travers « le labo des sports ». Le CIO a également associé un Programme Culture et Education (PCE) à ces JOJ. L’institution internationale espère, par ailleurs, que le suivi médiatique sera plus important qu’il y a quatre ans, même si le comité n’a jamais fait, des JOJ, un enjeu lucratif.
Des « ambassadeurs » seront présents pour promouvoir l’événement. Avec, notamment, le nageur sud-africain Chad Le Clos, champion olympique 2012 du 200 mètres papillon, qui s’était révélé lors des JOJ 2010, à Singapour. « Les Jeux olympiques de la jeunesse ont été un énorme tremplin pour moi », a-t-il expliqué, « ils m’ont considérablement aidé pour me préparer à faire face à la pression de mes premiers Jeux olympiques à Londres. Mais au-delà du sport, les souvenirs et les amis que je me suis fait resteront à jamais gravés dans ma mémoire et je suis très excité à l’idée de faire à nouveau partie de l’expérience des JOJ ».
Les Jeux olympiques de la jeunesse ont été fondés en 2007. Leur objectif est de promouvoir la pratique sportive, en recul dans certains pays. Les prochains auront lieu, en 2018, à Buenos Aires, en Argentine.