Le dialogue national « inclusif » s’est achevé jeudi dernier. En « apothéose ». Après trois semaines de palabres, ponctuées par le retrait de l’un des deux partis de l’opposition qui prenaient part à cette « conférence tam-tam », la surprise du chef est venue, telle une cerise sur le gâteau. Ould Abdel Aziz s’est, en effet, invité à la cérémonie de signature des conclusions de la rencontre. Pour prendre la parole en dernier et nous asséner quelques « vérités » bien senties. Tendu – il l’est souvent pour moins que ça – anxieux et tentant de sourire pour évacuer son stress. Comme à son habitude, le voici à décocher quelques flèches à l’opposition, s’en prenant violemment à Messaoud, sans pour autant le citer. Il n’est pas question de toucher à l’article 26 qui fixe l’âge des candidats à la présidentielle, une demande formulée par le vieux leader d’APP (qui n’a pas encore fait son deuil de la Présidence) et qui reçoit, ainsi, une fin de non recevoir. Attendu au tournant, sur l’article 28, fixant les mandats successifs d’un président définitivement à deux – et, donc, non susceptible de discussions, de révision ou d’abrogation, quoi qu’on dise – notre guide éclairé a décliné – provisoirement ? – l’offre avancée par ses ministres, son parti et ses laudateurs, de le déverrouiller, afin de lui permettre de postuler à un troisième mandat. Il aurait pourtant pu y « consentir », lui qui s’est vanté d’avoir, à deux reprises par le passé, modifié la Constitution à sa guise. Une prouesse qui n’est, cette fois, pas dans l’intérêt du pays, si l’on en croit notre rectificateur en chef des constitutions. Ce n’est certainement pas l’envie qui lui manque. Depuis 2005 et son premier coup d’Etat, l’homme a pris goût au pouvoir, aux avantages et plaisirs qu’il procure et pourra difficilement s’éloigner des lambris dorés de la République. Si les réformes constitutionnelles en cours ne toucheront pas l’article 28, c’est contraint et forcé qu’il le reconnaît. L’échec d’un dialogue qui s’apparente plus à un monologue qu’à autre chose, l’unité dont a fait preuve l’opposition, les pressions extérieures et le risque de voir la rue s’embraser ont eu raison de l’appétit du pouvoir.
Malgré cet effet d’annonce, rien n’indique qu’Ould Abdel Aziz ait dit son dernier mot. Après le referendum qui doit, pour qu’il soit organisé, être validé par les deux tiers de l’Assemblée et du Sénat – ce n’est pas gagné d’avance, lorsqu’il passera devant la Chambre haute, tant les sénateurs sont remontés contre une réforme qui les dissout – Aziz aura les coudées plus franches, pour décider, unilatéralement, de consulter le peuple, sans s’en référer au Parlement. Et, là, tout devient envisageable. Après 2011 et 2016, un troisième tripatouillage de la Constitution ne peut être exclu. Il suffit de lui préparer le terrain, construire, sinon, profiter d’une crise, une situation d’instabilité, une attaque terroriste… et nous la rejouer sauveur de la Nation. Bref : le début de l’acte III n’exclut, nullement, un nouveau coup… de théâtre.
Ahmed Ould Cheikh