Le baron Pierre de Coubertin en fit la devise des Jeux Olympiques : « L'important, c'est de participer ». En Mauritanie, on respecte, à la lettre, la célèbre maxime. A chaque olympiade, nous participons… sans préparer nos athlètes et sans mobiliser des moyens… puisque là n’est pas l’important. Cette année, Rio n’a pas dérogé à la règle. Ce n’est que grâce à la Solidarité Olympique que deux de nos athlètes ont pu concourir. Au Sénégal voisin (auquel notre gouvernement ne manque pas une occasion de nous comparer), c’est le Président Macky Sall himself qui a remis le drapeau de son pays à une délégation de trente personnes, après avoir ordonné qu’on leur débloque huit cent millions de FCFA, pour la préparation et le séjour au Brésil. Et nous, combien avons-nous donné à notre Comité National Olympique (CNO) et aux fédérations pour préparer nos athlètes : zéro ouguiya. Vous avez bien lu : zéro ouguiya. En 2012, pour les Jeux de Londres, le ministère des Sports avait fourni un petit effort, en remettant, au CNO, un chèque de sept millions d’ouguiyas mais… il était sans provisions ! Comment voulez-vous, dans ces conditions, qu’on gagne ou qu’on obtienne des médailles ? A cause d’une prise en charge financière partielle, notre pays a raté les Jeux africains de la jeunesse (2010), les Jeux de la Francophonie, les Jeux islamiques (2013), et à nouveau les Jeux africains de la jeunesse avant les 2ème Jeux olympiques de la jeunesse (2014). Ce ne sont pourtant pas les moyens qui manquent. Le ministère des Sports a un budget de plus d’un milliard d’ouguiyas, le lotissement d’une partie du Stade olympique et sa vente à des « mécènes », en guise d’aide au sport, devraient, normalement, rapporter plus de deux milliards, s’ils se sont tous acquittés de leur redevance, ce qui ne semble pas être le cas. 1% de recettes douanières rapporte, depuis 2011, plus d’un milliard chaque année. De quoi donner un bon élan à notre sport, comme ce fut le cas pour le football, lorsque l’Etat décida d’y mettre les moyens. Mais le docteur Mohamed Mahmoud ould Mah, le président du CNO, traîne un vice rédhibitoire : il n’a pas soutenu la rectification, en 2008, pas plus qu’il ne l’a fait pour le candidat Old Abdel Aziz en 2009 et 2014. Et comme notre guide éclairé veut tout politiser, faisant sienne la devise « Qui n’est pas avec moi est contre moi », Ould Mah, tout comme Ahmed ould Hamza, lorsqu’il dirigeait la Communauté urbaine, ou maître Ahmed Salem ould Bouhoubeyni, à la tête de l’Ordre des Avocats, ne sont plus que des ennemis à abattre. Le Comité Olympique a fait, il y a quelques mois, l’objet d’une tentative d’OPA, de la part du gouvernement, pour y parachuter un homme-lige mais la manœuvre a lamentablement échoué. Auparavant, le ministère des Sports avait introduit un projet de révision de la loi stipulant que le mandat de quatre ans du président du CNO serait renouvelable une fois, avec effet rétroactif. La ficelle était trop grosse et la Direction de la Législation a renvoyé le projet à son expéditeur, avec la mention : « Aberrant ».
Le concept d’aberration aurait-il quelque avenir, en Mauritanie, pour rectifier, également, les budgets inadaptés ? A cet égard, le CNO serait peut-être bien inspiré de présenter, à l’opinion publique et surtout, à l’Inspection Générale de l’Etat, un dossier précis de la participation mauritanienne aux Jeux de Rio. En y distinguant la préparation, depuis ceux de Londres ; avec les montants, aussi nuls soient-ils, alloués par le ministère des sports. Proposés à un exercice beaucoup plus positif de leur fonction – dynamiser le budget – nos organismes de contrôle de l’usage des deniers de l’Etat s‘engageraient-ils à relever la gestion totalement aberrante du ministère des Sports ? Cela nous permettrait-il de voir notre nation un peu mieux préparée aux prochains Jeux, en plein respect de la Charte olympique ? « Tous les Etats sont tenus de mettre à la disposition de leurs citoyens les sports de leur choix », ainsi que nous l’enseigne ses principes. Il est vrai que le seul sport national où nous excellons et qui ne nécessite ni moyens ni préparation n’est malheureusement pas encore homologué par le CIO : applaudir à tout rompre. Aberrant ? Non… si peu…
Ahmed Ould Cheikh