"Ces articles sont publiés dans le cadre d’un projet financé par le Programme de l’Union Européenne pour la Société Civile et la Culture pour la promotion de la protection de l’environnement"
Dans le cadre de l’accord signé entre le Gouvernement Mauritanien et l’Union européenne, le Programme de l’Union Européenne pour la Société Civile et la Culture (PESCC), a attribué une subvention à notre association Action Environnement pour réaliser le projet intitulé Projet de sensibilisation nationale au développement durable et à la protection de l’environnement
.Huitième et dernier article de la série commandée, au journal « Le Calame », par l’association mauritanienne « Action Environnement ». Construite sur une connaissance constamment affinée et réactualisée des terroirs, fortement appuyée sur les établissements d’enseignement et la Société civile, locale et nationale, tous soutenus par des systèmes pérennisés de financement, une gestion véritablement intégrée de l’environnement peut se développer, sous l’égide de l’Etat, en ses différentes strates.
Ce n’est qu’à partir du moment où la subsistance et l’intégration des populations locales dans leur environnement sont assurées que peut se poser, au-delà des limites strictement vivrières de celles-là, la question d’une exploitation exogène de celui-ci. On a, trop souvent ce dernier quart de siècle, mis la charrue avant les bœufs, suscitant, non seulement, d’inutiles conflits sociaux dont la Nation n’en finit pas de subir les pénibles prolongements mais, également, d’inconséquentes gestions du terroir, mal informées et d’autant moins intégrées. Les exemples de tels gâchis pullulent, particulièrement dans la vallée du Fleuve. Ils invitent à mieux entendre les priorités et l’ordre d’intervention des acteurs, du local au plus global.
On l’a dit et redit tout au long de cette série : l’urgence, prioritaire, relève de l’information. Il s’agit, tout d’abord, d’organiser la collecte permanente de données, en chaque lieu habité. Articulée autour des établissements d’enseignement, soutenue par des visites ponctuelles d’experts – topographe, botaniste, hydraulicien, statisticien, bio-agronome, environnementaliste, etc. (1) – elle ne peut se développer efficacement qu’à partir des situations concrètes de terrain, des capacités et des besoins réels des gens et du biotope. La notion de projet lui est donc indissociable et l’on entend bien, ici, tout ce qu’une société civile locale bien structurée peut apporter de propositions, variées, en ce sens. Un entendement tout à fait en accord, au demeurant, des efforts consentis, ces dernières années, par les PTF et le gouvernement.
Car c’est le flot, croissant, ininterrompu et périodiquement réactualisé, de ces données localisées qui permet d’affiner les stratégies globales élaborées, au niveau national, à partir d’informations parcellaires, et très influencées par des visions exogènes, encore plus globales, voire géopolitiquement orientées, de PTF étrangers. Gérer lucidement ces insuffisances, au niveau global, en relativisant les décisions à l’aune de leur évolution, est des clés les plus sensibles du développement durable. On dessine, conscient de sa grossièreté, une planification ; on y annexe une stratégie d’informations susceptible de l’affiner en permanence, voire de lui imposer une réforme objectivement motivée ; et l’on module, en conséquence, les interventions au plan local. La société civile n’est seulement le bras des institutions : elle en est l’organe sensoriel.
Vers une architecture sociétale au diapason du biotope ?
C’est probablement aller au plus précis du suivi-évaluation que de propulser de telles boucles de régulation systémique en avant-garde de l’action. A cet égard, on remarquera, ici, qu’elles peuvent être initiées, indifféremment, à partir du local ou du global. Pertinent, d’un strict point de vue mathématique, une telle proposition est plus difficile à entendre, d’un point de vue politique, mais une fois bien intégrée par les décideurs et les populations locales, elle se révèlera du plus haut intérêt, tant stratégique que tactique. Un plan de développement local, une petite filière de moindre volume, l’exploitation limitée de telle ou telle ressource naturelle peuvent enclencher de plus universels processus, par extrapolation, glissement de sens ou osmose. On croit l’inverse plus ordonné et dynamique : compréhensible, c’est pourtant une obtusion de l’esprit, génératrice, comme on l’a dit, de trop de malentendus et complications…
On voit ainsi se dessiner une nouvelle architecture des rapports local-global. Selon deux modes connexes de construction : l’un concentré, de type « système sanguin », structurant une administration territoriale hiérarchisée ; l’autre beaucoup plus étalé, de type « système lymphatique », adaptant ses manifestations aux conjonctures socio-écologiques mouvantes ; le tout rythmé par la balance « activités lucratives/activités non-lucratives », de type « système nerveux », dont on finira bien par entendre – tôt ou tard mais le plus tôt sera évidemment le mieux – qu’elle ne saurait être commandée par un libéralisme économique dictatorialement greffé, en guise de cerveau, sur la gestion de notre environnement planétaire commun. Aura-t-on ressenti, au long de ce petit travail, où se situe le plus juste milieu de cette responsabilité ?
Tawfiq Mansour
Notes
(1) : On voit ici tout ce que pourrait apporter de dynamisme une organisation transversale des compétences ministérielles, notamment entre les départements de l’Education et de l’Environnement, ponctuellement mobilisable, à partir de projets précis, fussent-ils générés par la Société civile et financés par des sources exogènes.