"Ces articles sont publiés dans le cadre d’un projet financé par le Programme de l’Union Européenne pour la Société Civile et la Culture pour la promotion de la protection de l’environnement"
Dans le cadre de l’accord signé entre le Gouvernement Mauritanien et l’Union européenne, le Programme de l’Union Européenne pour la Société Civile et la Culture (PESCC), a attribué une subvention à notre association Action Environnement pour réaliser le projet intitulé Projet de sensibilisation nationale au développement durable et à la protection de l’environnement
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En ce quatrième article de la série commandée, au journal « Le Calame », par l’association mauritanienne « Action Environnement », nous voici à examiner un des obstacles les plus pénibles, en Mauritanie, à l’avancée d’un développement durable : l’absence de cohésion et de constance, tant des informations que des actions.
Le cadre scolaire est un milieu idéal pour débattre du pourquoi et du comment d’une gestion durable de l’environnement. Bien plus qu’ailleurs, on peut y prendre le temps d’y réfléchir, inviter des spécialistes à exposer diverses méthodes, concentrer un matériel didactique et informatique adéquat, établir des cartes, graphiques, statistiques, dans le cadre même d’une pédagogie vivante, finement adaptée aux conditions locales. Cela suppose une dynamique enseignante moins préoccupée de gavage que d’assimilation ; centrée, non plus sur la mémorisation et la reproduction servile de prêt-à-penser et à-faire conçus sous d’autre cieux et/ou d’autres temps, mais sur l’acquisition dynamique de savoir-faire et de savoir-être, ici et maintenant. Dans un monde bombardé d’informations, il s’agit d’apprendre à discerner les pertinentes, à les ordonner, à les mettre au service d’actes en symbiose optimale avec notre environnement.
Dans le domaine du profane, aucune convention n’est absolue. La découverte de sa nécessité doit être le fruit de tâtonnements expérimentaux : c’est bien en babillant qu’on apprend à parler. On propose ainsi, à des élèves du Primaire, de mesurer des distances ; chacun y va de ses unités de mesure : pas, coude, main, etc. ; et c’est au vu de la diversité des résultats que tous finissent par comprendre la nécessité d’un système conventionnel. Il en va de même dans toutes les sciences profanes et celles de l’environnement n’échappent pas à cette primauté de l’expérimentation. C’est signaler, ici, toute l’importance du matériel didactique et technique dont la carence, tant en quantité qu’en qualité, entrave, lourdement, les progrès du système éducatif mauritanien.
Nous avons évoqué, en divers autres documents (1), la possibilité de développer un vaste programme d’AGRC – Activités Génératrices de Revenus Communautaires – dont les bénéfices nets seraient statutairement dévolus à l’équipement des établissements d’enseignement. Chapeauté par l’Etat et les PTF, un tel programme peut également s’appuyer sur divers réseaux de solidarité internationale spécialisés, notamment dans la distribution de matériel réhabilité. Mais pour être un tant soit peu efficace, une telle démarche doit suivre un minimum de règles. Le moindre outil dévolu à une école doit être, systématiquement, accompagné de son mode d’emploi, tracé, suivi, maintenu en état par des compétences et un budget spécifiques. Une règle trop souvent transgressée, en Mauritanie, générant d’innombrables gâchis.
Une même cohérence, du plus local au plus global
L’autre aspect du problème relève un autre impératif : la cohérence conventionnelle de ces équipements. L’exemple des outils informatiques est ici significatif. Parlant de traiter des données exploitables à tous les échelons de la complexité sociétale, c’est doté d’applications normalisées, clairement expliquées – au mieux finement discutées, dès leur conception, sinon rectifiables, à l’usage – qu’un ordinateur pénètre dans une classe, une coopérative pastorale ou maraîchère, à Bir Moghreïn, Keur Massène ou Aîoun el-Atrouss. On peut imaginer, sinon un corps de fonctionnaires de la Direction de TIC, du moins un volant assez conséquent d’ONG dédié à ces effets, jusqu’à assimilation totale, par les populations bénéficiaires, des outils mis à leur disposition.
Un va-et-vient d’informations, entre le local et le global, se met ainsi en place. La base de données de chaque localité s’enrichit, d’année en année, bientôt de mois en mois, semaine en semaine. De mieux en mieux connus, le biotope, son potentiel, les spécificités et les problématiques locales qui s’y rattachent se voient d’autant plus efficacement soutenus, par les échelons supérieurs de la complexité sociétale, que les populations du terroir sont, à la fois, les sources et le bassin d’écoulement final des mesures visant au développement durable de leur lieu de vie ; partant, de la Nation et de la Planète entière. Mieux construits, mieux argumentés, appuyés par des données fiables et recoupées, les projets locaux s’intègrent dans une dynamique globale de mieux en mieux affinée. Le sentiment d’œuvrer concrètement, en brousse lointaine ou banlieue marginale, à une meilleure adéquation de l’homme à son milieu, grandit. Entendra-t-on, musulmans et musulmanes, tout ce qu’une telle stratégie, aussi profane soit-elle, nous donne à exalter notre sens du Sacré ? (A suivre)
Tawfiq Mansour
Note
(1) : voir, notamment, « Plaidoyer pour une éducation pragmatique », publiée en 2008, sous la signature de Ian Mansour de Grange, par le journal « Horizons », ou « Lutte contre la pauvreté avec les pauvres », publiée en 2012, sous cette même signature, par « Le Calame » ; tous deux disponibles gratuitement, en format PDF, sur simple demande à mon adresse courrielle : [email protected]