« Si l’unité nationale est aujourd’hui menacée, elle l’est par la politique de discrimination et d’exclusion du président Aziz qui ignore les Harratines et les Négro-mauritaniens. »
Au lendemain de l’investiture du président de la République, nous avons approché Samory ould Beye, président d’El Hor et du Conseil national du parti El Moustaqbel. Ce leader Harratine croit savoir que le Mohamed ould Aziz, président en exercice de l’Union africaine, doit être déçu, parce que ses collègues du Continent n’ont pas accouru, comme il l’espérait, à Nouakchott, et le niveau de représentativité des délégations est resté bien en-deçà de ses attentes. « Et pour cause », indique Ould Bèye, « la politique africaine du pays, d’Ould Taya à Aziz, n’a jamais été claire et cohérente, vis-à-vis des pays noirs du Continent », contrairement à ce que le pays fut de trait d’union, sous le règne de son premier président, Moctar ould Daddah. « Il n’y a pas de politique africaine de la Mauritanie, l’ambigüité, démarrée avec Ould Taya [sortie de la CEDEAO] a atteint son paroxysme avec Aziz qui, depuis qu’il a été porté, par défaut, à la tête de l’organisation continentale, n’arrête de courir. Il ne rate aucune réunion, aucune investiture en Afrique mais ses collègues ne lui ont pas rendu la monnaie de la pièce. »
Samory ould Bèye n’est pas resté insensible aux propos du Président sur l’unité nationale. Le président de la République s’est attaqué frontalement, dit-il, aux leaders et défenseurs des droits des opprimés et marginalisés du système politique en place. « En s’attaquant à ceux qui luttent pour l’égalité et la justice entre toutes les composantes ethniques du pays, Aziz II se dévoile et annonce les couleurs de son mandat qui, je n’en doute aucunement, sera marqué par de fortes exacerbations des tensions inter-ethniques. Il continuera à favoriser l’unique composante beïdane, au détriment de la majorité restante, et à fragiliser, donc, l’unité nationale. » Dès lors, « comment peut-on rallier un président qui ignore la cause harratine ? », s’est interrogé Ould Bèye qui ajoute : « à El Hor, nous ne saurons franchir ce pas, faute de trahir la cause pour laquelle nous avons consacré toute notre vie». Et de charger : « si l’unité nationale est aujourd’hui menacée, elle l’est par la politique de discrimination et d’exclusion du président Aziz qui ignore les Harratines et les Négro-mauritaniens.» Le leader d’El Hor prévient: « El Hor, qui n’a jamais recouru à des moyens illégaux, pour faire triompher ses idéaux, ne se laissera pas intimider par de tels propos. Au contraire, il restera très vigilant, une sentinelle, comme il l’a toujours été, parce que son combat est juste et légitime ; nous nous battons pour un pays où les uns et les autres ont les mêmes droits, les mêmes devoirs et les mêmes chances de s’épanouir. » Avant de dénoncer les pratiques des forces de l’ordre, dans les marchés de Nouakchott, qui visent à « perturber le mode de vie des couches marginalisées, à les priver de tout moyen de subsistance. » Face à cette menace, Ould Bèye lance un appel pressant aux compatriotes de tous les bords à rester vigilants, à resserrer les rangs pour isoler « le système esclavagiste et raciste, à commencer par le dirigeant qui l’incarne ». Ce n’est pas en cooptant quelques Harratines à des postes de responsabilité qu’on résout les problèmes de la cohabitation, estime le président d’El Hor, « la solution de la cohabitation passe par une large concertation, entre l’ensemble des acteurs politiques et de la société civile, parce que le problème est très complexe, il est politique, économique, social, culturel et humain, même ».
Pour le président du CN d’El Moustaqbel, « un président de la République qui se veut président de tous les Mauritaniens, comme il l’a dit dans son discours, se doit de susciter un environnement qui rassure et non pas qui aiguise des tensions. En reconnaissant, publiquement, qu’il reste beaucoup de choses à faire dans les adwabas et dans les villages, Mohamed ould Abdel Aziz se dédit et renforce les défenseurs des noirs opprimés, particulièrement la composante harratine dont nous dénonçons la marginalisation et la discrimination par le système beïdane. La Mauritanie nous appartient à tous, ses ressources doivent profiter, par conséquent, à l’ensemble de ses fils. Aziz II doit reconnaître et œuvrer à supprimer les déséquilibres criants que connaît la Mauritanie », a prôné le leader d’El Hor. Les Mauritaniens ont fini par le comprendre et nous les appelons à livrer bataille, pour un véritable changement à la tête du pays », a conclu le président d’El Hor.