A partir de désormais, sont nommés ministres les personnes dont les noms suivent. Je le fais illico, puisque, moi, Président fondateur, j’ai besoin d’aller me reposer un peu, quelque part vers Francfort ou Raq’aa, histoire de respirer un peu, après nombre de mois d’intenses activités en tout genre. Deux semaines loin de vous, ça ne peut faire que du bien. Quoique, bien entendu, je ne suis jamais si loin de vous. Le Président fondateur ne s’éloigne pas : il bouge. Il ne voyage pas : il se déplace. Il ne vole pas : il prend un peu pour lui. Il ne change pas la Constitution : il la reformule. Il ne vend pas le domaine public : il l’attribue. C’est ça que les gens de l’opposition – ou, pour ne pas mettre tout le monde dans le même sac, les gens d’une certaine opposition – ne comprennent pas. Le Président fondateur est intelligent. Il nomme un tel pour quelque temps. Le temps de voler. Astaghfiroullah. Le temps d‘améliorer sa situation. Puis il le dénomme. Le temps de méditer les bienfaits du Président fondateur. Et d’aller manger, tranquillement, ce qu’il a volé. « Pa’don », comme disent les Ivoiriens, ce qu’il a pris. Le temps d’aller fidéliser les gens de sa tribu aux vertus et valeurs du Président fondateur, en attendant que celui-ci repense de nouveau à lui. Repenser de nouveau, oui, ça se dit. Quand on voyage tous les trois ou quatre jours, comme le fait le Président fondateur, c’est « revoyager de nouveau », à tort et à travers. Sans raison. Imaginez un peu ce que les voyages de Président fondateur représentent, en termes d’argent : kérosène pour avion. Indemnités de déplacements aux ministres, conseillers et autres petits gnama-gnama intrinsèques aux voyages présidentiels. Et puis, pardine, l’argent de poche du Président fondateur. Qui ne sait plus, soit dit en passant, quoi faire avec certains de ce peuple. S’il laisse les ministres longtemps en place ? Oh lalalala, ce président ne sait pas remanier ! S’il les change au bout de trois à quatre semaines ? Oh lalalala, ce président ne sait que faire danser les ministres ! La tête du Président se noue. Alors, il se roule par terre, comme l’imam des autres. SNIM. Marché Capitale. Tripatouillage. Quels rapports ? Le propre d’une séance de thé est que tout passe autour. Entre la chute du fer et l’assainissement de Nouakchott, il y a quoi ? L’eau, le fer, les immondices. Comme ça, la SNIM va marcher. Cahin-caha. Sans qu’on sache qui l’a éclopé de ses centaines de milliards. Imaginez un peu : si Président-fondateur ne connaissait pas très bien la SNIM et tout ce qu’il y a dedans, tout ce qu’il y a dehors, ça allait chauffer. Comme les autres grosses affaires d’emprisonnement de personnalités, avec force commentaires sur la volonté de Président-fondateur de lutter imparablement contre la gabegie. Mais, comme nous le rappelle, si bien, l’adage populaire, « si ton dîner est dans la même calebasse que celui d’autrui, s’il essaie de le renverser, ne le laisse pas faire ». On peut paraphraser, c’est pas interdit. La chute des prix du fer. Le réinvestissement de l’argent de la SNIM. La gestion de la grève. Toute cette argumentation, toutes ces manœuvres, nous sommes des « classes », comme disent les militaires. Justement. Nouveau général de brigade. Félicitations. Général simple. Général de division. Général de corps d’armée. Un bon paquet pour une bonne Rectification ou un Bon Réajustement constitutionnel. Les noms ne manquent pas. Tout est dans la tête. Celui qui a donné plus d’un milliard « dans » le Marché Capitale a la « tête cassée ». Un ventre de patron et quelques boutiques en décrépitude dans les environs, c’est pas si important que ça. Aéroport international de Nouakchott. Route à péages de Boutilimit. Salle de conférence de la prochaine réunion de la Ligue arabe. Il faut bien qu’on les donne à quelqu’un. Pas à des Chinois quand même ! S’il vous plaît, soyons sérieux. Ce que je n’ai pu avoir que mon frère l’ait ! C’est la devise des bonnes gens. Et puis, il y en a pour toutes les bourses. Les monuments publics à « vandr » (la Semaine de la francophonie est finie non ?). Le marché d’impression de la nouvelle Constitution. Piètres ministres. Salut.
Il y a quelques semaines, un ancien fonctionnaire devenu conservateur de bibliothèque, Ahmed Mahmoud ould Mohamed, dit Gmal, publiait sur Facebook un post au titre évocateur : « La mémoire en décharge : quand les archives nationales finissent dans les ruelles de Nouakchott ».