Une bande tente de braquer une épicerie, l’épicier en tue un
Comme nous ne cessons de le souligner, la métropole de Nouakchott se retrouve de plus en plus exposée à l’insécurité, malgré les efforts des autorités à lutter contre elle. Vols, cambriolages, braquages et agressions sont devenus routiniers dans presque tous les quartiers, surtout banlieusards. Après ceux du gardien, de la femme au marché et du jeune homme à la Médina 3, un nouveau meurtre un peu particulier a ensanglanté le dimanche 1er Février, vers deux heures du matin.
Au quartier Dubaï, entre Toujounine et Tenweïch, se trouve la station-service Total, flanquée d’une épicerie. Gérant de celle-ci, Itawel Oumrou ould Vadel est natif de R’kiz et âgé de vingt-et-un ans. Il a l’habitude de veiller tard, avec son jeune frère qui l’assiste, au service des usagers nocturnes de la route de l’Espoir. Le gardien de la station-service leur tient souvent compagnie. En cette nuit de dimanche, Itawel Oumrou, très fatigué après une rude journée de travail, profite de la présence du gardien venu faire du thé, pour piquer un petit roupillon à l’arrière-boutique, laissant son jeune frère en compagnie de leur compagnon. Aucun d’entre eux n’a rem arqué le groupe de gaillards qui les guettent, dans l‘ombre de la grande concession contiguë. Vers une heure cinquante, un « djenk » de teint foncé, corps balafré et chaîne au cou, vient acheter une cigarette. Il s’agit d’un éclaireur envoyé par les malfaiteurs sur le point de braquer. L’affaire lui paraît intéressante puisque, quelques minutes après son départ, il revient avec ses trois collègues, machettes en main : « L’argent, les cartes de recharge et les cartouches de cigarettes ! Vite ou vous mourrez ! », menacent-ils. Effrayé, le pompiste prend ses jambes à son cou et s’enferme, à double tour, dans la station. Lui aussi mort de peur, le gamin tente de réveiller son grand frère, en parlant à haute voix. « Laissez-moi aller derrière le comptoir pour vous satisfaire », leurs propose-t-il. « Non, ne bouge pas ! », lui ordonnent-ils. C’est alors qu’apparaît le grand frère, fusil de chasse calibre 12 pointé vers les bandits. « Dehors, vite, sinon, je tire ». Son jeune frère vient se réfugier derrière lui, tandis que les trois bandits s’apprêtent à fuir. Mais le quatrième, en sentinelle dehors, les exhorte à revenir à la charge. « N’ayez pas peur ! Le fusil n’est pas chargé. Ces salauds vous ont eu », affirme-t-il, avant d’entrer rapidement. Il s’élance vers l’homme au fusil pour lui asséner un coup de machette à l’épaule gauche, tente de lui arracher son arme. Mais au moment où il saisit le canon, le coup part et l’atteint en plein thorax, lui ouvrant un grand trou au côté droit. Titubant, il essaie de rejoindre ses complices dans leur fuite mais s’écroule, raide mort, quinze mètres plus loin. Ses complices l’abandonnent et disparaissent… avant de revenir, un peu plus tard, pour débarrasser le cadavre de tout indice susceptible de l’identifier : carte d’identité et téléphones portables. Tout cela sous l’œil effaré du pompiste qui a suivi la scène, de sa cachette.
Identification du cadavre
Vers quatre heures du matin, Itawel Oumrou ould Vadel ould Hassen est mené au commissariat de police de Toujounine 3. Son arme, qu’il détenait sans autorisation, est saisie. Deux heures plus tard, le substitut du procureur de la République vient dresser le constat de routine, avant que le cadavre ne soit évacué vers la morgue de l’hôpital Cheikh Zayed. La DRS de Nouakchott nord publie un communiqué radio évoquant un cadavre non identifié. Pendant quelques jours, des centaines de curieux vont défiler à la morgue, sans résultat. Finalement, une équipe de la police scientifique prend les empreintes digitales de la victime et c’est ainsi que quarante-huit heures plus tard, on apprendra, qu’il s’agit d’un récidiviste sorti de prison il y a peine deux mois : Baba ould Lemsid, natif de Rosso en 1993. La police publie alors un autre communiqué radio, priant la famille de venir récupérer le corps. En vain, aux dernières nouvelles.
Complices toujours en cavale
Contrairement à ce que certains sites d’information ont publié, les trois complices d’Ould Lemsid restent introuvables. On pense qu’ils pourraient avoir quitté Nouakchott. Les agents chargés de les identifier et les traquer travaillent d’arrache-pied, en quête de la moindre information pouvant aider à les dénicher et coffrer. « Leur arrestation n’est qu’une question de quelques jours », affirment-ils. Après trois jours de garde à vue, Itawel Oumrou ould Vadel a été, quant à lui, déféré au Parquet de la wilaya Nord. Accusé d’homicide volontaire, le voilà placé sous contrôle judiciaire, avec garantie d’un de ses parents. On attendra les assises de la Cour pour connaître son sort. Mais les avocats sont unanimes à dire qu’il ne risque pas grand-chose, du fait de la légitime défense.
Mosy