Oui, oui... Cela fait un bail que nous ne nous sommes pas vus, vous et moi, Nous Z'Autres ambianceurs réunis. Vous m'en voyez désolée mais j'avais besoin de vacances, de longues, longues vacances, histoire de souffler un peu. 2015 est mort, 2016 est là. J'ai laissé passer l'orage des incontournables fêtes de fin d'année, ai pris quelques semaines de Janvier pour me remettre de ce passage accéléré du temps (à partir de 50 ans, le temps file, file... ça en devient épuisant !). Et me revoilà, bon pied, bon œil, comme disent les Nsara !
Je vais d'abord sacrifier au protocole des relations amicales entre adultes consentants et vous souhaiter une bonne année 2016. Je sais, cela vous fait une belle jambe. Entre 2015 et 2016 rien n'a changé, ou si peu... Si vous deviez de l'argent à votre boutiquier, votre boutiquier est toujours là et votre dette aussi. Cette dernière fait partie des trucs qui ne s'effacent que pour peu de temps. Votre boutiquier aussi... C'est dans l'ordre naturel de la société de consommation.... et des relations pigeons/chasseurs.
Nous avons entamé 2016 dans les pétards et les vœux pieux de ceux qui croient encore au Père Noël. Et, pourtant, on parle toujours de dialogue. Un peu moins fort, vu que les oppositions ne sont pas si amicales que cela entre elles, que la rupture, au RFD, est consommée, avec l'apparition d'un nouveau parti, avatar de la guerre père/fils qui a opposé l’historique de l'étape, Ould Daddah, au jeune premier que tout le monde voyait reprendre le parti, Ould Moine. Donc, dialogue, monologue, re-dialogue, re-monologue : nous ne sommes pas plus avancés, en ce début 2016, qu'en fin 2015. Mais ça occupe...
Un soutien de la majorité vient, aussi, de nous apprendre que nous étions la Suisse. Heureuse de le savoir. Je mourrai moins bête. .Je ne suis pas sûre que cela, notre côté suisse, colle avec nos coutumes mais si quelqu'un de la majorité éclairante nous le dit, c'est que c'est vrai. Frères Suisses, je vous salue !
Nous est annoncée, aussi, la mort programmée – que dis-je, le sabotage en règle – de nos Ould et Mint. La guerre est déclarée à cette spécificité qui fait notre fierté et notre orgueil. Si l’on ne peut plus se dire « fils de » ou « fille de », nous n'avons plus qu'à aller ravaler notre orgueil. En plus, l'administration étant ce qu'elle est, à savoir pleine d'astuces, non seulement, nous allons être amputés de nos filiations mais, en plus et contre notre gré, nos bourses seront amputées de 2500 UM ! Ouais... Moi, j'y tiens à mon Mint. J'y tiens tellement que j'ai bien envie, non seulement, de débarquer avec mon Mint, mais de rajouter, pour le fonctionnaire zélé qui voudrait amputer ma filiation, Mariem mint Brahim ould Khattry, ould ould ould ould....Derwich. Juste pour casser l'ambiance. Mais bon, le fonctionnaire a toujours raison et mon Mint est appelé à mourir.
La polémique, fort stérile, de ce début d'année : notre ancien patron de la CUN, filmé en train de danser le rock. Rock qu'il danse fort bien, d'ailleurs. Au royaume des polémiques stériles, en voilà bien une. Z'ont rien d'autre à f... les moralisateurs de tous poils, ceux qui se sont empressés de cracher leur ennui et leur vide intellectuel sur cette très banale scène de danse ? Il n'y a pas d'autres sujets plus sérieux ? Aîe, aïe, aïe ! Pauvres de nous ! Si la « politique » consiste à dénigrer quelqu'un parce qu'il danse, nous sommes tombés si bas, que même les pierres se sont détournées de nous. Mais, bon, ne demandons pas à des ânes d'être des chevaux de course...
Biram est toujours en prison. Rien ne change, là aussi... Pourquoi voudrions-nous que cela change ? -Notre Président nous a dit que tout allait bien sur le plan économique. Il n'a pas entièrement tort. N'avez qu'à voir les palaces en construction sur les terrains du trab Sahraoui : il y a de l'argent en Mauritanie, beaucoup d'argent.... A tel point qu'on ne trouve plus un maçon de libre. D'où viennent toutes ces fortunes ? Mystère et boule de gomme... Mais le fait est là : il y a des fortunes, colossales, qui construisent des habitations tout aussi colossales. Mais tout le monde n'est pas logé à la même enseigne. Il y a un monde, entre ces quartiers qui sortent de terre comme des champignons et la grande majorité des Nous Z'Autres qui vit de débrouillardise et de survie...Alors, Monsieur le Président, ne dites pas que tout va bien, même si l'on sait que la bonne santé du BTP est, ailleurs, signe de bonne santé économique. Chez nous cela ne veut rien dire : ce ne sont pas les pauvres qui construisent. Ce ne sont pas les classes moyennes. Ce sont les riches, les ultra-riches... L'économie ira bien quand nous pourrons construire, sans nous endetter jusqu'à la fin de nos jours, pris à la gorge par des banques qui pratiquent des taux d'usuriers.
On voit de plus en plus de ces anciens militaires à la retraite qui se découvrent des talents, divers et variés, en cette période de pré-campagne ou, selon votre bord politique, en campagne permanente. Ils se reconvertissent dans tout, occupent toutes les places encore vacantes, dans un bel ordre de bataille officiel qui mobilise toute l'armée au service d'une seule ambition. Le militaire à la retraite, surtout ex-galonné, est partout. Il y en a même qui se prennent pour des journalistes et qui nous pondent des sites tendancieux et orientés, nous prenant pour des analphabètes sûrement. C'est la mode : le militaire touche-à-tout et, surtout, haut-parleur de tout là-haut, là-haut.... Et l’on n'a même pas honte ! Du moins, ces militaires-là n'ont même pas honte.
Il y a cette brusque montée de fièvre, à l'annonce de l'obligation, faite aux usagers téléphoniques que nous sommes, de nous identifier. Nous avions jusqu'au 31 Décembre. Après cette date fatidique, nous allions voir ce que nous allions voir ! Morale de l'histoire : les numéros non-identifiés fonctionnent toujours. Heureusement car la moitié de la Mauritanie allait perdre sa carte SIM et son numéro de téléphone... et les sociétés de télécommunications la moitié de leurs clients. Sûrement un accès de fièvre... mais, au moins, ça faisait, ces menaces, de beaux panneaux sur nos artères.
Il y a la nouvelle campagne pour le port de la ceinture au volant. Ça distribue des amendes, en veux-tu, en voilà. Mais, attention, au pays de l'absurde, tout peut se voir et se concevoir : seul le chauffeur doit porter sa ceinture ! Le passager du siège « place du mort » peut aller mourir, lui. Il n'intéresse personne. Il ne lui est pas demandé de porter sa ceinture ni les passagers de derrière. Dans un pays où il y a encore des gens assez fous pour conduire en plaçant leur enfant sur leurs genoux, entre le volant et leur poitrine, je me demande pourquoi l’on s'acharne sur la ceinture de sécurité. Je ne m'attarderai pas sur les images d'un enfant ainsi véhiculé par un parent irresponsable mais imaginez un peu le petit corps écrasé contre le volant, sternum enfoncé et vous aurez un petit aperçu de cette irresponsabilité majeure... Mais bon, là aussi, on ne peut faire d'ânes des chevaux de course. Il y a des gens, chez nous, qui aiment tellement leurs enfants qu'ils les promettent à une mort atroce.
Il y a encore plus de mosquées. Nous sommes la ville au monde où il y a le plus de mosquées au kilomètre carré. Un petit espace ? Et, vlan, une mosquée ! Nous sommes, Nouakchott-Plage, devenus une immense boutique/mosquée à l'intérieur desquelles court un peuple en galère, arcbouté sur sa survie... Ne nous plaignons pas, nous avons, au moins, toutes ces mosquées.
J'en aurais plein d'autres encore des choses à dire sur cette nouvelle année. Mais, pour terminer sur une note positive, je vais faire comme ces affiches placardées un peu partout qui sont censées nous apprendre « la tolérance, le respect », etc., etc., je vais positiver : bonne année, les Vous Z'Autres ! Bonne année, la Derwichette ! Bonne année, même à ceux qui s'en fichent ! Je suis revenue. Vous m'avez manquée... Salut.
Mariem MINT Derwich