Le Protocole de pêche signé entre l’Union Européenne et la Mauritanie et couvrant la période 2012-2014 arrive à terme. Ce protocole est la matérialisation de l’Accord cadre de Partenariat dans le secteur de la Pêche (APP) signé entre notre pays et l’Union européenne en 2006 et reconduit depuis lors. C’est le moment à mon avis de faire le bilan de ce Protocole alors que le Gouvernement entame ces jours –ci de nouvelles négociations pour son renouvellement. En tant qu’ancien Secrétaire Général de la Fédération Nationale des Pêches (FNP) et ayant par ailleurs eu l’occasion de participer au titre de représentant de la profession aux réunions préparatoires aux négociations de certains accords de pêche avec l’Union européenne mais aussi aux négociations elles mêmes -en tant qu’observateur- j’ai décidé de livrer au lecteur la vision que j’ai de ce Protocole. Cette vision est loin de correspondre aux déclarations élogieuses que j’entends çà et là surtout de la part de responsables politiques. En effet ce Protocole marque pour moi un recul me fondant en cela sur une analyse des clauses qu’il contient mais aussi sur la comparaison avec le Protocole qui l’a précédé (2008-2012) et un Protocole qui lui est très comparable celui du Maroc (Protocole 2013-2017). Si ce Protocole n’est pas celui qu’il faut pour la Mauritanie par plusieurs de ses aspects, il ne l’est pas également et j’ajouterai paradoxalement pour les européens auxquels on a été amené parfois à imposer des clauses techniques pénalisantes pour eux et contreproductives pour nous. Il continue par ailleurs à soulever un tas de questions liées à son exécution. Une lecture du PV de la réunion de la Commission Mixte issue du Protocole montre que pratiquement toutes les clauses importantes de ce Protocole sont l’objet de remises en cause ou d’interprétations divergentes jusque et y compris sa date d’entrée en vigueur : zones de pêches, embarquement de marins mauritaniens, redevances etc… (Voir PV de la Commission Mixte tenue à Nouakchott les 17 et 18 septembre 2013). Jamais accord de pêche n’a suscité autant de controverses entre les parties signataires. Nous verrons aussi que des effets négatifs du Protocole ont même dépassé le cadre de celui-ci pour toucher des accords avec des flottes de pêche de pays non européens.
Pour ne pas être taxé de critique ‘’destructive’’, cet article propose ça et là quelques solutions pour les problèmes et difficultés soulevés.
La version officielle relayée par une partie de la presse, certainement pas au faîte des choses, présente ce Protocole comme un accord jamais égalé en termes d’avancées bénéfiques pour le pays et ce relativement aux aspects suivants :
-Les retombées financières de l’accord
-La sortie des céphalopodes de l’accord
-Le débarquement des captures à Nouadhibou
-l’augmentation du taux d’embarquement à bord de la main d’œuvre mauritanienne
-La protection de la ressource par l’éloignement des zones de pêche
-La réduction de la durée de l’accord
-L’octroi d’une redevance en nature représentant 2% du quota accordé pour le poisson pélagique
Nous allons passer en revue ces différents points pour savoir ce qu’il en est de ces avancées ‘’bénéfiques’’ pour le pays. Dans une deuxième partie, nous montrerons à travers une série d’exemples que ce Protocole contient également des clauses défavorables aussi bien pour nous que pour nos partenaires européens et qu’il a dévié des orientations de l’APP signé entre notre pays et l’Union européenne et reconduit jusqu’en 2018.
L’apport financier du Protocole
Notons tout d’abord qu’un accord de pêche ne se mesure pas à l’aune de son impact financier mais selon des critères fondés sur son impact sur le de développement d’un pays, sur les transferts de technologies à travers le développement d ‘un partenariat mutuellement bénéfique et sur la garantie de la durabilité de la ressource. Nous verrons plus loin que le nouveau Protocole enregistre sur ce plan un net recul par rapport au Protocole qui l’a précédé, celui de 2008-2012.
Pour bien comprendre les choses, il faut avoir à l’esprit que l’apport financier dans le cadre d’un accord de pêche avec l’Union européenne se compose de 2 montants:
-Un montant versé par l’Union européenne en tant qu’institution qui est stable et en général indépendant du nombre de navires ayant accédé à la ressource : c’est ce qu’on appelle la compensation financière
-Un montant payé individuellement par les navires européens et qu’on appelle redevances. Ce montant pour son calcul dépend du nombre de navires ayant accédé à nos eaux, des quotas pêchés. Le montant total payé au titre des redevances ne peut donc être connu qu’à l’issue d’une année ou à la fin du Protocole (il peut même varier d’une année à l’autre).
Au niveau de l’impact financier du nouveau Protocole et selon le Gouvernement, on est passé d’une contrepartie de 84 millions d‘euros par an dans le précédent Protocole (2008-2012) à 110 millions d’euros pour le nouveau Protocole (2012-2014). Ces chiffres incluent pour chaque Protocole aussi bien la compensation financière versée par l’union européenne que les redevances payées par les armateurs (propriétaires de navires).
Ainsi donc et toujours selon la présentation officielle des choses, l’impact financier du Protocole précédent (2008-2012) soit 84 millions d’euros par an se décompose comme suit :
-70 millions représentant la compensation financière annuelle y compris l’aide sectorielle.
-14 millions d’euros représentant le total des redevances acquittées annuellement par les armateurs européens au titre du protocole.
Pour le Protocole actuel (2012-2014) et toujours selon la version officielle, l’impact financier de 110 millions d’euros se décompose comme suit :
-70 millions d’euros représentant la compensation financière annuelle payée par l’Union européenne.
-40 millions représentant les paiements attendus au titre des redevances à acquitter par les armateurs européens.
Cette façon de présenter les choses comporte des amalgames et des inexactitudes: la compensation financière de 70 millions d’euros à laquelle est fait référence pour le protocole 2008-2012 est celle versée au titre de la quatrième année du Protocole qui, rappelons-le, a été conclu pour une durée de 4 ans. Pour les 3 autres années, la compensation a été de 86 millions d’euros pour la première année, 76 millions d’euros pour la 2eme année et 73 millions d’euros pour la 3ème année (Article 2 du protocole 2008-2012). Pour être donc objectif, il faut soit comparer les 2 premières années du Protocole précédent aux 2 années du Protocole actuel soit faire la moyenne de la compensation sur les 4 ans pour l’accord précédent et pour les 2 ans pour le Protocole en cours. Cette moyenne sur 4 ans nous donne 76 250 000 euros pour l’accord précédent (86 millions +76 millions +73 millions +70 millions : 4 ans=76 250 000 euros.
Pour le Protocole actuel, la moyenne annuelle de la compensation financière est de 70 millions d’euros (140 millions : 2ans = 70 millions d’euros)
La baisse de la compensation financière saute tout de suite aux yeux. Elle est de 6 250 000 euros par an (76 250 000-70 000 000) soit un total de 12 500 000 pour les 2 années du Protocole.
La baisse serait encore beaucoup plus importante si nous comparons les 2 années du Protocole actuel aux 2 premières années du Protocole précédent soit 16 millions pour la 1ere année (86millions -70 millions) et 6 millions pour la 2ème année (76 millions-70 millions) soit au total une baisse de 22 millions d’euros par an et 44 millions d’euros pour les 2 années du Protocole actuel.
Comme on le constate aisément, les montants sûrs quelles que soient les données de la pêche c'est-à-dire ceux acquittés par l’Union européenne en tant qu’institution ont baissé.
Pour ce qui est des 40 millions attendus au titre des redevances à acquitter par les armateurs et qu’on ajoute aux 70 millions d’euros pour avancer le chiffre de 110 millions d’euros, on ne peut les comptabiliser à l’avance à moins de vendre la peau de l’ours avant de l’avoir égorgé car ils dépendent d’un certain nombre de facteurs et d’aléas tels le nombre de navires qui réellement vont venir pêcher, des quotas que ces navires vont être amenés à pêcher etc…, surtout que toutes les données montrent aujourd’hui que le taux de fréquentation de nos eaux par les navires européens a été faible durant le Protocole actuel. Cette faiblesse du taux de fréquentation est souligné par une étude réalisée par un consortium de bureaux d’études pour le compte de l’Union européenne : « Le taux d’utilisation des possibilités de pêche au cours des premiers mois de l’accord a été faible à modéré suivant les catégories de pêche , tant en termes d’utilisation des licences qu’en termes de captures : Environ 150 000 tonnes de poisson ont été capturés en 11 mois soit un peu moins de la moitié du volume annuel de captures autorisées fixé à 326 700 tonnes », affirme cette étude (voir étude consortium COFREPECHE-MRAG-NFDS-POSEIDON, janvier 2014)
La Commission Mixte UE-Mauritanie chargée du suivi de l’exécution du Protocole a également, dans sa réunion tenue les 17 et 18 septembre 2013 à Nouakchott, dressé le même constat (Voir PV de la Commission mixte).
Il faut noter par ailleurs qu’un élément défavorable à la partie mauritanienne pour le calcul des redevances est entré en jeu dans le nouveau Protocole: celui du paiement à la tonne pêchée et non plus au TJB (Tonneau de jauge Brute). Pour faire simple, le TJB (en anglais GT) est une unité pour mesurer le volume du navire. Le paiement sur la base du TJB adopté dans la précédent Protocole nous assurait un paiement à l’avance dès que le navire touchait le port mauritanien que le navire pêche ou ne pêche pas par la suite. Avec le paiement à la tonne, nous devenons tributaires non seulement des aléas de la pêche mais aussi de nos propres insuffisances (risque de sous déclarations des tonnages étant donné que la majeure partie des captures est transbordée en mer). Il faut signaler ici que le système du paiement au TJB est appliqué aux navires nationaux depuis les années quatre vingt dix. Le Maroc mais aussi les autres pays signataires d’accords de pêche semblables avec l’Union européenne adoptent, pour le paiement des redevances, le paiement au TJB (Voir accord de pêche UE-Maroc 2013 -2017).
Pour atténuer les effets des aléas précités, nous n’avons même pas obtenu le paiement à l’avance d’un minimum garanti de perception raisonnable assurant à notre trésor public des entrées sûres. Le minimum de perception prévu par le Protocole est tout simplement ridicule puisqu’il est de …1000 (mille) euros par navire sauf pour le pélagique. Pour cette dernière pêcherie, il est de 5000 euros par navire.
Autre mesure qui milite en faveur de la baisse des recettes attendues au niveau des redevances: la diminution de la redevance pour les 36 navires crevettiers, diminution bizarrement intervenue bien après la signature du Protocole. En effet, la redevance par tonne pêchée pour ces navires est passée de 620 Euros à 420 Euros.
Il découle logiquement de tout ce qui précède que les 110 millions d’euros annoncés ne seront pas au rendez vous. A signaler d’ailleurs que ce chiffre de 110 millions d’euros n’existe dans aucune clause du Protocole.
Le Protocole et les céphalopodes
Les céphalopodes en particulier le poulpe constituent une ressource halieutique importante vers laquelle s’oriente l’essentiel de nos pêcheurs - Pêche industrielle et artisanale- mais qui est également exploitée par nos partenaires chinois (Voir la convention signée entre notre pays et la société Poly-Hondone Fisheries).
Il est effectif que les navires européens pêchant les céphalopodes sont sortis du Protocole actuel. Cela est une bonne chose pour notre pays étant donné le niveau inquiétant de surexploitation constaté pour cette ressource depuis plusieurs années et estimé à 40% selon les données officielles (Voir le Document de stratégie adopté par le Gouvernement pour la période 2008-2012 et le Plan poulpe). On oublie souvent de signaler également que les navires céphalopodiers européens qui évoluaient dans des conditions techniques et financières plus favorables que nos navires nous faisaient la concurrence sur le principal marché de destination des produits celui du Japon. Il y a lieu cependant de situer les choses dans leur contexte concernant cette mesure : la Commission Européenne ne pouvait pas signer un accord de pêche portant sur une ressource non excédentaire - le cas des céphalopodes en Mauritanie- et ce au risque de voir l’accord en question censuré par le Parlement européen. Ce dernier a, en effet, suite à la pression du puissant lobby des Verts et de la gauche fortement implantés en son sein, pris une résolution en date du 12 Mai 2011 donc à la veuille des négociations pour le renouvellement du Protocole avec la Mauritanie intimant à la Commission Européenne de ne passer un Protocole de pêche que sur les surplus (reliquats) non pêchés par les mauritaniens. Ainsi peut on lire dans le point 3 du paragraphe M de la résolution précitée « Le Parlement insiste pour que tout accès à la pêche dans les eaux mauritaniennes négocié pour les navires battant pavillon d’un Etat membre de l’Union européenne soit fondé sur le principe des stocks excédentaires visé par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer … souligne que tout accès de l’Union doit concerner les ressources ne pouvant être pêchées par la flotte mauritanienne » (Voir le site du Parlement européen www.europarl.europa.eu). Or pour les céphalopodes non seulement il n’y a pas de stocks excédentaires mais cette ressource fait l’objet d’une forte surexploitation comme je l’ai déjà noté . La Commission européenne ne pouvait donc, en l’absence d’avis scientifiques pertinents, passer un accord sur cette pêcherie .L’élimination des céphalopodes de l’accord n’est donc pas la conséquence d’une mesure prise par le Gouvernement dit on dans le but de réserver cette pêcherie aux nationaux, mesure qu’on aurait imposée à nos partenaires européens. Comme on le sait cette pêcherie a d’ailleurs été allouée à d’autres partenaires (CF accord de pêche entre la Mauritanie et la société chinoise Poly HondoneFisheries )
Le faux débarquement des captures à Nouadhibou
Le débarquement des captures à Nouadhibou a toujours constitué un point de négociation difficile depuis la signature du 1er accord de pêche avec l’Union européenne en 1987. En effet, la Mauritanie y voit un moyen de développer les infrastructures à terre notamment les usines grâce à ses effets induits multiples : emplois, transferts de technologies ... Rappelons qu’il est obligatoire pour la flotte nationale depuis le 23 Février 1983 (date de la signature entre l’Etat et la profession du PV organisant le débarquement).
Le nouveau Protocole de pêche passé avec l’Union européenne n’a, en ce qui concerne le débarquement, malheureusement rien apporté de nouveau, prenant d’une main ce qu’il a donné de l’autre. Qu’on en juge : Pour la flotte démersale, le chapitre V dispose en son alinéa 1-1 que « la flotte démersale est soumise à l’obligation de débarquement ».
Le débarquement de la petite flotte pélagique (pélagique frais) est consacré mais soumis à des conditions telle ‘’ une demande avérée’’ du marché etc… (Chapittre V alinéa 1-5).
Toutes ces dispositions sont cependant annihilées par l’alinéa1-3 du Chapitre V qui dispose que « L’obligation de débarquement n’implique pas l’obligation de stockage et de transformation ».
Autrement dit le navire pourra venir toucher le quai de pêche et partir et ainsi on considérera qu’il a débarqué. On est loin donc des effets économiques recherchés pour les installations à terre. Cette définition insolite du débarquement est en porte à faux par rapport à celle consacrée par notre Code des pêches et imposée à notre flotte nationale. En effet, l’article 17 alinéa 2 du Code des pêches définit le débarquement comme suit : « Par débarquement on entend la mise effective à terre de tous les produits pêchés en vue de leur stockage, traitement, transformation ou exportation ». Certes on peut toujours rétorquer que cette disposition ne s’applique pas à l’accord de pêche avec l’Union européenne, le statut de convention internationale primant sur nos lois. Il n’en reste pas moins que la définition du débarquement est une et c’est celle consacrée par notre Code des pêches; on ne peut donc par des artifices juridiques changer radicalement le sens de ce mot.
L’éloignement des zones de pêche : L’erreur fatale
Le recul des zones de pêche a concerné pratiquement toutes les pêcheries. On se limitera cependant ici à l’exemple de la pêche pélagique qui constitue l’ossature du Protocole actuel.
Le nouveau Protocole, suite a une exigence de la Mauritanie, a porté la zone de pêche de 12 à 20 miles pour les navires pélagiques dans un souci, pensait-on, de protection de la ressource. On voulait ainsi, semble-t-il, obtenir une diminution des captures accessoires de pêche de fond alors que par ce fait on a en réalité poussé les navires à pêcher dans un désert maritime. Cette mesure, prise sans étude sérieuse, fera partir non seulement les flottes européennes mais aussi, et suite à sa généralisation, les flottes des autres pays pêchant le pélagique (Voir plus loin les dommages collatéraux de l’accord). Ce genre de mesures ne doit pas être pris à la légère et ne doit être pris qu’après consultation des organes scientifiques spécialisés tellement les pêcheries sont enchevêtrées d’autant plus que les donnée scientifiques sur la zone objet de l’exclusion existent bien au niveau de l’IMROP (Institut Mauritanien de recherches Océanographiques et des Pêches) ainsi qu’au niveau du COPACE (Comité des Pêches de l’Atlantique de Centre Est, organisme des nations unies) et même des instituts spécialisés européens. Se rendant compte de l’ampleur des dégâts causés par cette mesure au niveau des captures du pélagique, le Ministère des Pêches décida de revenir sur cette mesure, là aussi sans l’avis d’organismes spécialisés. Désormais la délimitation des zones de pêche fera l'objet d’arrangements au niveau de la Commission mixte chargée du suivi du Protocole en dehors de considérations scientifiques fiables. Le Comité scientifique issu du Protocole n'a pas voulu d’ailleurs s’impliquer dans la détermination des Zones de pêche (Voir le PV de la réunion du Comité Scientifique tenue à Rennes en France du 2 au 5 avril 2013).
Le taux d’embarquement des marins mauritaniens : une clause technique mal conçue
La clause du chapitre XI Alinéa1 s du Protocole actuel stipule que : « A l’exception des thoniers senneurs qui embarquent obligatoirement 1 marin mauritanien par navire et les thoniers canneurs qui embarquent obligatoirement 3 marins mauritaniens par navire, chaque navire de l’Union européenne embarque obligatoirement à bord, pendant la durée effective de sa présence dans les zones de pêche mauritaniennes, 60% de marins mauritaniens choisis librement sur la base d’une liste établie par le Ministère, les officiers n’étant pas inclus dans ce décompte. Toutefois en cas d’embarquement d’officiers stagiaires mauritaniens, leur nombre sera décompté de celui des marins mauritaniens »
Il apparaît ainsi que le taux d’embarquement qui était aux environs de 35% dans le protocole passé est porté maintenant à 60% dans le nouveau Protocole.
Cette clause appelle de ma part les remarques suivantes :
-Certes le taux d’embarquement a été porté d’environ 35% à 60%. Ce pourcentage de 35% cache en réalité une donnée essentielle, c’est que dans le Protocole précédent, le taux était de 35% mais y compris les officiers mauritaniens, autrement dit chaque navire européen avait l’obligation d’embarquer à son bord et des officiers et des matelots mauritaniens.
Le Protocole en vigueur, lui, limite les 60% seulement aux matelots en excluant les officiers. Or dans les usages suivis, l’embarquement d’un officier équivaut à l’embarquement de 2 matelots.
-L’exclusion des officiers mauritaniens du nouveau Protocole constitue une remise en cause du vaste programme de formation d’officiers que nous avons engagé depuis quelques années notamment grâce à l’Ecole Nationale d’Enseignement Maritime et des Pêches (ENEMP) et qui se traduit aujourd’hui par la mise sur le marché de plusieurs centaines d’officiers mauritaniens.
- La répartition officiers étrangers -matelots mauritaniens envisagée par l’accord risque par ailleurs de créer des problèmes sociaux à bord. En effet, les matelots en général représentent à peu près 60% de l’équipage et l’etat major 40%. Par conséquent, tout l’état major risque de n’être constitué que par des européens et tout le personnel subalterne (matelots) par des mauritaniens ce qui, à l’évidence, risque de créer un esprit de ‘’communautarisme’’ à bord générateur de tensions surtout dans les conditions difficiles de la mer et donc préjudiciable au bon fonctionnement de l’outil de production.
Je pense qu’il faut rester flexible et accepter le principe d’embarquer des matelots européens pour certaines tâches très spécifiques notamment au niveau du traitement du produit mais aussi des officiers mauritaniens, tout cela dans le cadre d’un plan d’embarquement minutieusement conçu et adapté pour chaque pêcherie (démersaux, pélagique, crustacés) au lieu d’imposer une répartition mécanique et rigide des fonctions à bord.
Pour nous résumer, il faut noter qu’il n’y a réellement pas, s’agissant de l’embarquement de la main d’œuvre mauritanienne, de progrès significatif réalisé par rapport au Protocole passé.
On ne saurait terminer sur ce registre sans signaler le recul important observé au niveau de l’embarquement des observateurs scientifiques mauritaniens. Ces derniers embarqués pour le compte de l’Institut Mauritanien de Recherches Océanographiques et des Pêches (IMROP) ont une mission d’observation de la ressource à travers les captures réalisés par les navires. Ils transmettent ainsi à l’IMROP des données permettant à ce dernier d’avoir des informations sur l’etat de la ressource.
Le précédent Protocole 2008-2012 dispose dans son Chapitre VIII alinéa 1 que « Tout navire de la Communauté détenteur d’une licence en zone de pêche de Mauritanie, embarque à son bord 1 observateur scientifique mauritanien sauf les thoniers senneurs pour lesquels l’embarquement se fait à la demande du Ministère. Dans tous les cas il ne peut être embarqué qu’un seul observateur par navire »
Dans le nouveau protocole, l’embarquement se fait désormais par catégorie de pêche et non par navire à raison de 2 observateurs par catégorie comme le stipule le Chapitre X alinéa 1 : «Pour chaque catégorie de pêche les deux parties désignent au moins deux navires par an qui doivent embarquer à leur bord un observateur scientifique mauritanien sauf les thoniers senneurs pour lesquels l’embarquement se fait à la demande du Ministère. Dans tous les cas il ne peut être embarqué qu’un seul observateur scientifique par navire. » Il y a là un net recul par rapport au Protocole passé. En effet, alors que sur la base du Protocole passé, il y avait la possibilité d’embarquer 94 observateurs scientifiques (exclusion faite des thoniers senneurs et des céphalopodiers), dans le nouveau Protocole, ces possibilités sont réduites à seulement 14 (2 observateurs par catégorie de pêche) là également à l’exclusion des thoniers senneurs et des céphalopodiers)
Pour ce qui est de l’accomplissement de leur mission, le nouveau Protocole reconduit les mêmes contraintes que le Protocole passé qui réduit ces observateurs à de véritables supplétifs du capitaine du navire européen. En effet, l’alinéa 10 du Chapitre X dispose que « A la fin de la période d’observation et avant de quitter le navire, l’observateur scientifique établit un rapport selon le modèle figurant en appendice 9 de la présente annexe. Il le signe en présence du capitaine (du navire européen) qui peut y ajouter ou y faire ajouter toutes les observations qu’il estime utiles en les faisant suivre de sa signature. Une copie du rapport est remise au capitaine du navire lors du débarquement de l’observateur scientifique ainsi qu’au Ministère et l’Union européenne ».
Pour bien comprendre la portée négative de cette clause, il faut avoir à l’esprit que l’observateur scientifique connaît bien les espèces et les tailles interdites, les maillages des filets de pêche et les zones de pêche autorisés. Il est par ce fait la bête noire des capitaines de navires en mal de pêche illicite. La clause précitée permet au capitaine, le cas échéant, de saborder la mission de l’observateur ’’imprudent’’. Mais le plus grave reste que la majeure partie de la flotte européenne échappe désormais au contrôle de ces observateurs et que par ailleurs l’objectivité scientifique de leurs rapports devient douteuse, ces rapports ne pouvant plus ainsi servir de base à une étude sérieuse sur la ressource.
La réduction de la durée du Protocole : une bourde
Si l’on se réfère aux déclarations officielles, la durée du Protocole (2 ans) serait une victoire arrachée à nos partenaires habitués dans les Protocoles précédents à une durée ‘’abusive’’ de 4 ans. Cette façon de voir les choses relève quelque peu de l’amateurisme et se trouve en contradiction avec le fait d’affirmer qu’il s’agit du meilleur Protocole de pêche conclu avec l’UE à ce jour. En effet, si tel est le cas, nous avons intérêt à lui donner une durée plus longue et ce sont les européens qui auraient intérêt à l’écourter. Signalons ici que par cette durée de 2 ans, notre Protocole devient une exception car tous les autres Protocoles de pêche passés avec l’Union européenne ont une durée d’au moins 4 ans. La durée de 4 ans constitue en effet un minimum et ce pour les raisons suivantes :
-Les négociations pour le renouvellement d’un Protocole de pêche commencent en général une année avant la date de l’expiration de celui-ci et ce en raison de la complexité de ce genre de négociations, d’une part et, d’autre part, le désir des armateurs européens d’être plus ou moins fixés sur ces chances et conditions de reconduction et ce afin de pouvoir, le cas échéant, prendre les dispositions nécessaires-qui prennent, elles aussi, du temps pour se redéployer sur d’autres zones de pêche .
-Les circuits d’approbation européens sont longs et lourds : validation par la Commission, passage devant plusieurs commissions spécialisées du Parlement européen (commission Développement, commission budgets…), validation ensuite par la Commission. Par conséquent, une durée de 2 ans est insuffisante et pourrait même être à l’origine de blocages comme celui que nous vivons actuellement par rapport à la date d’entrée en vigueur du protocole qui est différente selon qu’on est à Nouakchott ou à Bruxelles. En effet, pour la partie mauritanienne, le Protocole est entrée en vigueur à la date de son application provisoire c’est à dire le 1er Août 2012, date correspondant à son paraphe par les 2 parties. Bruxelles au contraire se base sur l’article 11 relatif à l’entrée en vigueur qui dispose que « le présent Protocole et ses annexes entrent en vigueur à la date à laquelle les parties se notifient l’accomplissement des procédures nécessaires à cet effet » pour considérer que le protocole n’est entré en vigueur que le 16 décembre 2012, date de son approbation par le Parlement européen, L’Union européenne ne pouvant avant cette approbation faire une quelconque notification. Le plus surprenant dans tout cela est la façon dont a été rédigé l’article 9 relatif à la durée du Protocole qui stipule que « le présent Protocole et ses annexes s’appliquent pour une durée de 2 ans à partir de sa date d’application provisoire entrée en vigueur, sauf dénonciation ». Cet article donne raison en quelque sorte aux 2 parties nous rappelant le jugement de notre célèbre Cadi. Au delà de cette querelle de dates, se cachent des enjeux financiers notamment ceux relatifs au paiement de la compensation financière dont le 1er versement est dû au plus tard 3 mois après la date d’entrée en vigueur du Protocole. Pour la partie mauritanienne, cette première tranche doit donc être payée au plus tard le 1er Novembre 2012 alors que pour la partie européenne, elle doit être réglée au plus tard le 16 février 2013. L’argument de la partie européenne est réellement peu convaincant dans la mesure où les navires européens ont commencé effectivement à pêcher le 1eraoût 2012 en vertu d’un Protocole signé ou paraphé peu importe. L’Union européenne doit donc soit considérer que le Protocole est entré en vigueur le 1er Août 2012 soit verser à la Mauritanie une compensation proportionnelle pour la période allant du 1et Août 2012 au 16 décembre 2012. Evidemment dans ce dernier cas de figure, le Protocole aura ainsi une durée de 2 ans et… 5 mois ce que cherche aussi peut être l’Union européenne.
- Le délai de 2 ans est très court pour une absorption de l’aide sectorielle consentie par le Protocole étant donnés les circuits très bureaucratisés de notre administration. Rappelons que pour le Protocole précédent 2008-2012, 11 millions d’euros d’aide sectorielle tardent à être justifiés pour l’Union européenne nonobstant ses multiples relances.
-Tout Protocole qui se respecte doit inclure des clauses relatives au développement du partenariat entre l’Union Européenne et notre pays en particulier l’intégration économique des opérateurs européens dans l’ensemble de la filière pêche en Mauritanie et donc la promotion de l’investissement privé et les transferts de technologies (Cas du Protocole 2008-2012 et du Protocole signé avec la Maroc). Or un Protocole de 2 ans n’est pas propice à de telles actions qui nécessitent un cadre stable et durable.
Enfin dans le cas particulier du nouveau Protocole, nous avons intérêt à ce qu’il porte sur une durée importante dès lors que les céphalopodes n’y sont plus inclus, d’une part et, d’autre part, que plus de 90% des captures sont constitués de pélagique. Cette dernière pêcherie est une pêcherie migratoire et nous avons intérêt à utiliser pleinement le quota qui nous est alloué par les organismes spécialisés (COPACE) soit un million de tonnes par an, faute de quoi ce quota sera pêché par nos voisins. A cela s’ajoute le fait que les gros navires spécialisés pour cette pêcherie deviennent de plus en plus rares d ans le monde et nous avons l’opportunité d’en avoir avec un partenaire crédible comme l’Union européenne.
La redevance en nature : difficultés de mise en oeuvre
Le nouveau protocole prévoit l’octroi d’une redevance en nature représentant 2% du quota total du pélagique soit environ 6300 tonnes si ce quota est atteint et s’il n’ ya pas de sous déclarations. L’assortiment en espèces pour cette redevance à ma connaissance n’a pas été défini et la notion de pélagique est très générale puisque sous ce vocable nous trouvons plusieurs espèces : Chinchard, sardinelle, maquereau, sardine etc….Pour être précis, nous ne savons pas la répartition des espèces dans le tonnage consenti car les prix des espèces diffèrent.
Cette redevance est une bonne chose puis qu’elle représente un plus mais telle qu’envisagée pose cependant 2 problèmes : un pour notre partenaire européen et un pour nous-mêmes
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Pour notre partenaire européen se pose le problème de la délivrance de cette quantité de poisson : Le poisson se trouve sur de gros navires ne pouvant, pour des raisons techniques, s’approcher du port. La seule manière pour récupérer le produit est d’envoyer des petites embarcations artisanales. Débarquer du poisson d’un gros navire sur une petite embarcation n’est pas chose aisée.
Pour notre part, cette redevance en nature concurrence le segment de notre pêche artisanale orienté vers l’approvisionnement du marché intérieur.
Il faut donc trouver une solution à ces 2 problèmes.
J’ai personnellement pensé à une solution qui me semble tout à fait réalisable : au lieu de récupérer le produit le vendre à nos partenaires européens (armateurs) et avec l’argent ainsi obtenu acheter à Nouakchott auprès des filières artisanales de la place des produits frais pour ensuite les congeler dans nos usines à Nouakchott. Mes calculs m’ont montré que le tonnage ainsi obtenu sera environ le même que celui que nous recevons actuellement avec en plus les avantages suivants :
-Nous achetons des produits adaptés à la consommation de nos populations au lieu de leur imposer des produits qu’elles ne connaissent pas (Chinchard…)
-Nous faisons travailler nos usines à terre
Nous faisons l’économie du transport de Nouadhibou à Nouakchott
-Nous facilitons pour nos partenaires le paiement de la redevance qui désormais sera payée en espèces et non en nature.
L’examen auquel nous venons de procéder montre que sur l’ensemble des aspects sus évoqués et présentés comme étant des avancées, le Protocole 2012-2014 n’arien apporté d’extraordinaire par rapport au Protocole qui l’a précédé et aux Protocoles qui lui sont comparables et qu’au contraire, il enregistre des reculs sur bien des choses. Il s’agit maintenant de montrer que sur d’autres aspects importants mais cette fois peu connus du public, le Protocole a malheureusement été là aussi défaillant.
Baisse importante de l’aide sectorielle
La contrepartie financière versée par l’Union européenneen tant qu’institution se décompose toujours de 2 montants :
-Un montant destiné au budget de l’Etat
-Un montant destiné au développement du secteur de la pêche et appelée aide sectorielle.
Dans le précédent accord 2008-2012, cette aide sectorielle a représenté pour les 4 ans un total de 65 millions d’euros s et donc une moyenne annuelle de 16 250 000 euros soit 21% du montant de la contrepartie financière.
Dans le nouveau Protocole, elle n’est en moyenne que de …3 millions d’euros soit 4% du montant total de la compensation financière. Ce montant est évidemment dérisoire quand on sait les besoins en investissements multiples et variés du secteur : renforcement de la surveillance, appui à l’école maritime, protection des aires marines mais aussi développement de la pêche artisanale qui a toujours été le parent pauvre de l’aide sectorielle sans oublier un appui à la ville de Nouadhibou, dindon de la farce des accords de pêche.
A titre de comparaison, l’aide sectorielle représente dans l’accord de pêche UE-Maroc (2013-2017) 46 % du montant de la compensation financière (Voir l’art 3 du protocole UE-Maroc).
Dans le Protocole avec le Groenland (3éme accord en termes d’accès à la ressource après la Mauritanie et le Maroc), elle représente 25%.
On peut donc considérer que le développement du secteur est loin d’avoir constitué une priorité dans le nouveau Protocole 2012-2014.
Abandon de l’intégration économique des opérateurs communautaires
Le Protocole précédent celui de 2008-2012 avait prévu dans son article 8 tout un arsenal de mesures tendant à favoriser l’intégration des opérateurs communautaires dans le secteur et la promotion de l’investissement privé. Ainsi peut-on lire dans l’article précité : « les 2 parties s’engagent à promouvoir l’intégration économique des opérateurs communautaires dans l’ensemble de la filière pêche en Mauritanie… Les 2 parties conviennent de mettre en place un groupe conjoint de réflexion afin d’examiner périodiquement les questions liées à la promotion de l’investissement privé dans le secteur des pêches mauritanien notamment la facilitation de l’implantation d’entreprises privées européennes ; de sociétés mixtes … »
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Ces dispositions ont été malheureusement gommées du nouveau Protocole, ce qui représente un recul par rapport à l’Accord cadre (APP) et au Protocole 2008-2012.
Abandon de la pêche exploratoire
La pêche exploratoire appelée aussi pêche expérimentale vise la recherche de nouvelles possibilités de pêche autres que celles connues actuellement. Elle constitue ainsi un moyen de développement du secteur. Le Protocole passé (2008-2012) avait prévu en son article 5 un ensemble de dispositions pour encourager l’exercice de cette pêche qui ne peut être menée qu’à travers une coopération technique et scientifique avec nos partenaires. Le Protocole signé entre le Maroc et l’Union européenne a lui aussi consacré une large place à cette pêche. En revanche, cette pêche a été ignorée par le Protocole actuel ce qui, là aussi, constitue un recul par rapport au Protocole passé.
Dommages collatéraux du Protocole
Aussitôt signé le Ministère des pêches s’empressa de généraliser par voie de circulaire les clauses de ce Protocole (Zone, redevances..) aux autres flottes non européennes (principalement d’Europe de l’Est)) en particulier pour le pélagique et ce sans tenir compte des conditions spécifiques de ces flottes. Le plus grave a été de demander à ces flottes de s’acquitter d’une redevancepar tonne équivalente à ce que paie l’Union européenne (redevance et compensation comprises), ignorant ou feignant d’ignorer que ces flottes ne bénéficient pas d’un mécanisme de subvention (compensation) tel celui dont dispose la flotte européenne. Les navires non européens se sont donc vus imposer une redevance par tonne pêchée de 346 euros pour le pélagique alors que le navire européen ne s’acquitte lui que de 123 euros par tonne pêchée.
A cela s’est ajouté l’éloignement de la zone de pêche (de 12 à 20 miles) créant les mêmes craintes de baisse de rendement que chez les navires européens.
Ce fut donc la Berezina pour ces flottes qui quittèrent nos eaux laissant derrière elles des centaines de marins au chômage et un trou béant dans nos recettes budgétaires. Le départ de ces flottes entraîna par la même occasion la faillite de la société Sahel Bunkering constituée entre le Soudan et la Mauritanie et qui jouait le rôle d’avitailleur en carburant pour ces flottes causant là aussi la mise au chômage de plusieurs dizaines de travailleurs. On se rappelle la crise qu’avait créée le départ des flottes pélagiques des pays d’Europe de l’Est et les propos virulents du Directeur Adjoint de l’Agence de pêche fédérale de Russie menaçant l’Union Européenne de porter le cas du Protocole de pêche signé avec la Mauritanie devant l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce) . Se rendant compte –tardivement-de l’ampleur des dégâts- leMinistère opéra un virage à 90 degrés en allégeant les conditions pour ces flottes mais celles-ci tardent malgré tout à rejoindre nos zones de pêche.
La généralisation des conditions du Protocole 2012-2014 aux autres flottes non européennes ne peut avoir comme explication qu’une interprétation excessive et à mon avis erronée des dispositions de l’alinéa 5 de l’article 1 du Protocole qui stipule que « L’ensemble des mesures techniques de conservation, d’aménagement et de gestion de la ressource, ainsi que les modalités financières, redevances ou autres droits, subordonnant l’octroi des autorisations de pêche, tels que précisés pour chaque pêcherie dans l’annexe 1 du présent protocole, seront applicables à toute flotte industrielle étrangère opérant dans les zones de pêche mauritaniennes dans le conditions techniques similaires à celles des flottes de l’Unioneuropéenne ». Cette clause ne fait aucunement référence à la compensation financière versée par l’Union européenne au titre du Protocole et prévue elle à l’article 2 de celui-ci et non à l’annexe 1 susvisée. Ensuite la Commission européenne , si elle est à l’origine de cette généralisation contraignante pour la Mauritanie, a par ce fait outrepassé la résolution-feuille de route du Parlement européen du 12 Mai 2011 déjà précitée et qui dispose au point i : « Considérant qu’il est essentiel, dans le cadre de la négociation des possibilités de pêche au titre du nouveau protocole, de tenir compte des relations qu’entretient la Mauritanie avec les pays tiers qui pêchent également, sur la base d’accords bilatéraux ou privés, dans sa zone économique exclusive »
Enfin toute généralisation des conditions du Protocole actuel intégrant le montant de la compensation financière européenne constituera la meilleure manière de faire barrage aux flottes de pêches d’autres pays.
En conclusion, je dirai que les accords de pêche avec l’Union européenne sont de 2 types , les accords de partenariat qui militent en faveur du développement du pays et connus sous la dénomination d’ APP (Accord de Partenariat dans le secteur de la Pêche) avec leurs Protocoles) et les accords mettant en valeur uniquement les impacts financiers et appelés communément PPP (Pêcher, Payer et Partir). Je pense que le protocole actuel rejoint cette dernière catégorie et ce en raison du fait que toutes les mesures allant dans le sens du développement du secteur et du pays ont été pratiquement abandonnées ou ignorées à savoir :
- Le débarquement des captures à Nouadhibou générateur d’effets induits bénéfiques pour le secteur et pour l’économie.
- L’aide sectorielle censée aider au développement du secteur
-Le partenariat et la promotion de l’investissement privé
- La recherche, condition de tout développement pour ce qui concerne notamment la pêche exploratoire.
En revanche tout un tintamarre est organisé pour mettre en valeur un apport financier du reste contestable comme nous l’avions vu.
Le Protocole 2012-2014 a donc dévié du cadre de coopération (APP) signé en 2006 entre l’Union européenne et la Mauritanie et reconduit jusqu’en 2018 qui met un accent particulier sur le développement de la Mauritanie par le biais de protocoles de pêches allant dans ce sens.
Nouakchott le 21 Juillet 2014
Mahfoudh Brahim Tfeil
Ancien Secrétaire Général de la Fédération Nationale de Pêche
Président de l’ONG Mer et Développement
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