Chaque 28 novembre, je m’interroge sur le sens à donner à cette date d’anniversaire, partagée entre la sincère fierté de l’acquisition de notre indépendance nationale, et l’amer constat d’une nouvelle année de gestion politique plusdésastreuse encore.
La journée d’hier fut particulièrement éprouvante. Le Colonel Oumar OuldBeibacar, qui est comme un père pour moi, est arrêté au sortir d’une conférencecommémorant cet « autre 28 novembre », qui, en 1990, voyaitl’innommable exécution de vingt-huit militaires négro-mauritaniens.
Cet homme, héros national, à l’humanité légendaire, qui a le courage de ses convictions, et la cohérence de ses actions et de ses discours …cet homme-là, c’était attendu, ne pouvait que contrarier les us et coutumes de la République Hypocrite de Mauritanie, où la flagornerie a depuis longtemps supplanté l’Honneur.
En Mauritanie, un simple lien filial assure le droit de porter et faire usage des armes. En toute impunité. L’expression pacifique de son opposition, par la plume et par le discours, elle, est chose criminelle. Condamnant fermement tous les discours extrémistes et le sectarisme érigés en politique d’Etat depuis le funeste coup d’Etat d’août 2008, je condamne plus encore l’arrestation arbitraire de citoyens faisant simplement usage de leur libre pensée.
Je m’oppose aux discours qui racialisent les maux dont souffre le pays, au lieu d’observer les problématiques de fond, qu’il nous faut traiter avec conscience, responsabilité et sens du devoir. En tête de ces défis, la nature autoritaire et de plus en plus patrimoniale du pouvoir, et l’arbitraire qui fait de la soumission collective, à force de menaces, de contraintes et de privations, un mode de légitimation d’un pouvoir absolu. Ce sont ces injustices, qu’illustre l’arrestation arbitraire du Colonel Oumar OuldBeibacar, qu’il faut combattre d’une seule et même voix, que l’unité nationale, consciente et responsable, doit éradiquer.
Si Oumar OuldBeibacar n’est pas de ceux qui s’agitent confusément pour obtenir des grâces vaines, il est de ceux qui agissent conformément à ce que leur dicte leur seule conscience. Chose rare, et indépassable.
Une autre chose d’indépassable : il n’est d’impunité que Terrestre.