Campagne d’Amnesty International pour la libération de Biram et Brahim

5 November, 2015 - 01:25

Amnesty International  a décidé de lancer une vaste campagne pour la libération des militants anti-esclavagistes, Biram Dah Abeïd et Brahim Bilal Ramdhane, à l’occasion du premier anniversaire de leur emprisonnement, et pour la commutation de la liberté provisoire, accordée à Djiby Sow, en liberté définitive. La célèbre ONG les considère comme des prisonniers d'opinion. Ils ont été arrêtés uniquement pour avoir exercé pacifiquement leurs droits et doivent être libérés, immédiatement et sans condition, selon elle.

Dès février 2015, Amnesty International  et vingt autres organisations exhortaient les autorités mauritaniennes à libérer, tout aussi immédiatement et sans condition, les militants anti-esclavagistes et défenseurs des droits humains déclarés coupables et détenus arbitrairement, en violation des lois nationales mauritaniennes et des instruments juridiques internationaux ratifiés par la Mauritanie. « Préoccupée par les violations de la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique perpétrées par le gouvernement mauritanien », l’ONG passe maintenant à la vitesse supérieure. La campagne espère convaincre le « gouvernement mauritanien d’arrêter, d’inculper, de juger et de condamner les personnes simplement pour avoir exercé leurs droits à la liberté d’expression » ; de reconnaître « l’existence de l’esclavage et de la discrimination basée sur les catégories sociales et les professions »  et, enfin, « [d’autoriser] la fondation d’organisations de défense des droits humains et de [leur permettre] d’effectuer leur mission ».

Invitant le public à adresser des lettres, individuelles et/ou collectives, de pression, la campagne va se développer via Internet et autres media sociaux, ainsi que par des manifestations menées par les sections. Ce dispositif sera renforcé par des mobilisations directes, auprès des institutions de défenses des droits humains et politiques, au niveau national, régional et international.

 

Subterfuges

A l’approche de l’Examen Périodique Universel (EPU), le gouvernement mauritanien semble déterminé, constate Amnesty International «  à montrer aux pays « pairs » qu’il fait de son mieux pour respecter les droits humains. Dernièrement, la Mauritanie a adopté un certain nombre de lois, portant, notamment, sur les organisations de la société civile (OSC) et sur l’esclavage. Mais le gouvernement a eu recours, malgré ces lois et de façon ironique, à des mesures sévères, pour réprimer la liberté d’expression et de réunion. La pression de l’opinion publique sur le gouvernement pourrait encourager », indique Amnesty International, « les responsables mauritaniens à revenir sur leurs décisions et les inviter à libérer, immédiatement et sans condition, les deux  prisonniers d’opinion ».

Et de prier ses sympathisants d’envoyer également des cartes postales de solidarité à Biram, Brahim et Djiby Sow. « Il est très important de leur écrire des lettres/cartes postales de solidarité pour les soutenir, afin qu’ils se rendent compte qu’ils ne sont pas tout seuls », souligne l’ONG. Ces témoignages peuvent également leur être envoyés, via l’organisation Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste en Mauritanie (IRA). Les membres d’IRA sont, en effet, régulièrement en contact avec les prisonniers d’opinion et leurs familles et peuvent donc leur transmettre du courrier.​

Rappelons que le 15 Janvier 2015, les trois militants anti-esclavagistes et défenseurs des droits humains ont été condamnés à deux ans de prison ferme, par le tribunal de Rosso (wilaya du Trarza), « pour appartenance et administration d’une organisation non reconnue, participation à un rassemblement non autorisé et infractions commises à l’encontre des forces de l’ordre ». Bilal Ramdane, Djiby Sow et Biram Dah Abeïd avaient été arrêtés le 11 Novembre 2014, alors qu’ils menaient une campagne pacifique contre la pratique de l’esclavage et sensibilisaient la population sur la question du droit foncier des descendants d’esclaves. Amnesty International fait remarquer que « les autorités mauritaniennes restreignent fréquemment la liberté d’expression des défenseurs des droits humains et des organisations de défense de droits humains qui mènent campagne contre l’esclavage. Monsieur Biram Dah Abeïd, président d’IRA-Mauritanie, a déjà été arrêté en 2010 et en 2012. En 2013, il a reçu le Prix des droits de l’homme des Nations-unies et le Prix Front Line Defenders ».

Le lundi 23 Février 2015, les trois détenus entamèrent une grève de la faim, pour dénoncer les « conditions sordides » et les mauvais traitements que leur inflige l’administration pénitentiaire. Le 26 Juin 2015, Djiby Sow, militant anti-esclavagiste et président de l’ONG Kawtal,  fut libéré provisoirement, pour raisons de santé, mais, le 20 Août 2015, la Cour d’appel confirmait la peine d’emprisonnement de deux ans. Il est donc, officiellement, toujours redevable de dix-neuf mois de celle-ci.

Synthèse Thiam Mamadou