Dégradation de l’état de santé de Biram: «Des conséquences désastreuses à redouter» (avis médical)

5 November, 2015 - 01:22

Bien mal en point depuis quelques mois, le président d’IRA, Biram Dah Abeïd, continue de souffrir dans sa cellule à la prison d’Aleg où il purge une peine de deux ans, en compagnie de son adjoint Brahim Bilal Ramdhane. Le célèbre défenseur des droits de l’Homme est « alité », depuis un mois maintenant, dans sa cellule de la prison d’Aleg. « Il souffre le martyre, jour et nuit, suite à un mal qui ne cesse d’empirer, dans l’indifférence totale et sans avoir accès à d’autres soins que quelques sédatifs », s’émeut le collectif de défense. Les spécialistes  disent craindre des « complications, s’il n’y a pas une prise en charge urgente et appropriée ». De son côté, le gouvernement continue de faire la sourde oreille et réprime les manifestations de protestations des militants abolitionnistes.

Le 25 Août 2015, Biram est évacué en urgence vers l’hôpital régional d’Aleg, suite à de violentes douleurs dans la jambe droite. Il est alors examiné par le directeur régional de la Santé et deux autres médecins, accompagnés d’un radiologue. Unanimes, ils  déclarent, sans ambages, « que les moyens à leur disposition à Aleg sont insuffisants pour leur permettre de poser valablement un diagnostic. Il faudrait, notamment, lui faire passer un scanner ». En l’attente d’un tel examen, les médecins prescrivirent des calmants qui se sont très vite révélés insuffisants, pour atténuer des douleurs qui sont devenues insupportables.  « Malgré cet avis médical clair, le Parquet n’a pas jugé utile de donner suite », regrettent les avocats de Biram. 

En raison de  la dégradation manifeste de son état de santé – la douleur s’est propagée dans la   jambe gauche puis tout le bas du dos – et après une nouvelle crise d’une rare intensité,  le Parquet général d’Aleg s’est vu obligé de faire venir à la prison, le 18 Octobre 2015 à minuit, le directeur régional de la Santé et le médecin-chef de l’hôpital d’Aleg, pour un nouvel examen. Le pouvoir campe cependant sur sa position. En dépit d’un nouvel avis, émis par une équipe de neurologues mauritaniens, mandatés par le ministère de la Justice, qui recommandent, à son tour, l’évacuation de Biram vers une structure sanitaire adéquate. A en croire IRA, tous les  médecins sont unanimes sur ce sujet.

Loin d’être ébranlé, le leader abolitionniste continue d’enchaîner les visites. Certaines restrictions précédemment remarquées ont été levées et les responsables pénitenciers semblent lâcher du lest. Proches, militants et sympathisants d’IRA, continuent de déferler à la prison pour s’enquérir de l’état de santé de leur dirigeant, lui renouvelant soutien et solidarité dans cette épreuve difficile. Après les diplomates européens, c’est au tour d’une délégation de l’ambassade des USA à Nouakchott de s’être rendu à Aleg. Le   médecin américain qui a consulté Biram a corroboré l’avis médical émis par les neurologues, jugeant « indispensable des radios poussées, afin de déterminer la nature de la maladie », faute de quoi, tranche-t-il, « la situation du patient risque d'avoir des conséquences désastreuses ». Une éventualité déjà évoquée par plusieurs responsables de l’organisation abolitionniste. Balla Touré a indiqué, lors d'une conférence de presse tenue, le  22 Octobre, au siège du FONADH, que son organisation s’inquiète de la « volonté manifeste des autorités à maintenir Biram dans un état de souffrance inhumaine ». Dévoilant les propos qu'aurait tenus le  procureur de la République d'Aleg : « Tant qu’il pourra tenir debout, il ne sortira pas de la prison pour des raisons médicales » ; Balla a appelé les autorités à se ressaisir, en autorisant le transfert de Biram pour une prise en charge appropriée afin d'endiguer la maladie.

Balla tient le pouvoir responsable de la situation qui pourrait advenir. Au cours de son dernier point de presse, lundi dernier, le collectif  de défense de Biram insiste « sur la nécessité d’évacuer le militant anti-esclavagiste à Nouakchott, afin que ce dernier puisse subir un examen par scanner, ainsi que l’ont recommandé, tour à tour, trois équipes médicales dont la dernière comprenait le professeur Cheiyakh ».

Après avoir révélé la confiscation, par le procureur de la République, du dossier médical de leur client – « Ni le malade ni sa défense n’ont pu avoir accès à ces informations qui appartiennent, avant tout, au détenu », peste-t-il – le collectif dénonce les violations des droits de Biram et interpelle, par lettre ouverte au ministre de la Justice, au « respect des droits aux soins de leur client. […] En résumé », conclue-t-il, « notre client souffre d’une maladie grave, son état ne cesse d’empirer et, malgré de nombreux rapports médicaux concordants, le Parquet et la direction des prisons continuent à le priver de soins élémentaires ». Et pour cause : la décision vient du plus haut de l’Etat et nul n’osera s’y opposer. Biram victime, donc, de la déraison d’un Etat confisqué par un autocrate ?

 

Synthèse Thiam