Y a un oiseau de chez Nou’zautres qui a voulu imiter la marche d’un autre oiseau de chez Nou’zautres. Vous savez quoi ? Non seulement, il n’y est pas arrivé, mais il n’a pas non plus réussi à redevenir lui-même et recouvrer sa propre marche. C’est que ce n’est pas une simple histoire de marche ou de marché. C’est beaucoup plus que ça. C’est une histoire de place. Imaginez un peu, avec moi, si chacun était resté à sa place. Certainement qu’on n’aurait pas eu besoin, aujourd’hui, de faire le moindre dialogue, pas plus inclusif qu’exclusif. Vous ne voyez pas où je veux en venir ? « Garawoul » (c’est pas grave), comme disent les Wolofs. On répète. La répétition a des vertus pédagogiques. Et comme l’école commence, ce n’est pas grave de faire un peu de pédagogie. Suivez-moi bien. Personne n’est à sa place aujourd’hui, en Mauritanie. Sauf exceptionnellement. Et que dit-on de l’exception ? Comme quoi charité bien ordonnée commence par soi-même. Certes, la première que le purificateur (et non le fou) purifie est sa propre tête. Moi, je ne suis pas à ma place. Ce n’est pas au Calame, ma place. Elle est dans les classes, à côté des maîtres. Pas au marché ni devant les sièges des banques primaires, à vendre et acheter. Mais ensemble, amis, lisons ensemble dans les classes, pour enseigner. Sans discours officiel d’ouverture. Sans grand tapage médiatique, pour annoncer une ouverture qui se serait passée dans les meilleures conditions possibles, comme toujours depuis au moins trente ans que ça se passe ainsi. L’emplacement est important. Aussi bien pour les hommes que pour les choses. Les anciens blocs-manivelles n’étaient pas bien placés. C'est dire qu’ils n’étaient pas à leur place. Exactement comme les défuntes écoles 1 et 2 de la capitale, respectivement école Justice et école Marché. Qui a déjà vu une école entre magasins, vendeurs de fatayas, cure-dents et autres serrures, portes d’aluminium, banques, bureaux de change, représentations de grandes marques internationales de TV et électroménager ? Ce n’est pas la place d’une école. Dites la vérité. Chacun à sa place. Chaque chose à sa place. Vous pensez que si, par exemple – au hasard, hein ! – les militaires, les premiers, ceux des années 1978, étaient restés à leur place : dans les casernes, les escadrons et autres commissariats… Certainement que nous n’en serions pas là aujourd’hui. « Où ça, là ? », me diront certains. Là, là, à Nouakchott, en Mauritanie. Et ainsi de suite. Si les Cavaliers du changement étaient restés à leur place : militaires retraités ou officiers de service ; si les gens du 3 Août 2005 et ceux du 6 Août 2008, qui ne sont qu’une seule et même communauté dont une partie fait partie de l’autre partie, étaient restés à leur place ; il n’y aurait pas eu d’amalgame. Les chercheurs cherchent. Les docteurs soignent. Les professeurs enseignent. Les politiques mélangent. Les techniciens fabriquent et réparent. Les civils en ville. Les militaires dans les casernes. Les écoles restent des écoles. Les journalistes, journalistes. Les ambassadeurs, ambassadeurs. Les vieux, des vieux. Les femmes, des femmes. Et les jeunes, des jeunes. Sans haut ni bas ni conseil intermédiaire. Juste à la place que leur confèrent leur âge et leur vivacité. Pas des jeunes aux têtes bourrées de préoccupations de vieux. Ah, cette histoire de place ! Regardez bien autour de vous. Ici chez nous, quasiment personne n’est à sa place. Or qu’Allah bénisse celui qui a connu sa « place » et s’est assis en-deçà ! C’est tout le contraire, ici. Si haut perché sans rien comprendre. Y a pas que vendre, acheter, négocier, beloter, rebeloter, se positionner, se placer, jaser… Que diriez-vous de rangées de grosses boutiques, juste devant le bataillon de la sécurité présidentielle ? De boutiques juste collées au mur de la Présidence ? Exactement comme derrière l’école de police ou le Stade olympique. C’est une bonne place. Juste à quelques encablures et de la Banque centrale et du ministère des Finances. Entre argent, politique et commerce, le courant passe habituellement bien en Mauritanie. Salut.
Il y a quelques semaines, un ancien fonctionnaire devenu conservateur de bibliothèque, Ahmed Mahmoud ould Mohamed, dit Gmal, publiait sur Facebook un post au titre évocateur : « La mémoire en décharge : quand les archives nationales finissent dans les ruelles de Nouakchott ».