Faits divers: Le beau temps des imposteurs

27 August, 2015 - 01:43

Partout à Nouakchott, des hommes, chômeurs le plus souvent, quittent chez eux très tôt le matin et reviennent le soir avec un butin. Pas tous : c’est au poste qu’on retrouve certains, démasqués qu’ils se font faits de leurs tentatives d’escroquerie. Car il s’agit d’imposteurs qui passent leur journée à guetter la moindre occasion de filouter autrui, en se présentant, sous de beaux atours et de fausses identités, nanti de telle ou telle importante fonction ou titre.

Le cas du faux médecin qui avait passé des mois à consulter, à Boutilimit et Guerrou, en 1992, est toujours en mémoire. La même année, un pseudo-gynécologue avait également sévi, quelque temps, du côté de Kaédi, avant de s’éclipser. Si l’on n’en a jamais retrouvé trace, Mohamed ould Bahou, le faux médecin, avait, lui fini par être arrêté à Nouakchott. Quotidiennement, des hommes se présentent, partout dans les bureaux, les boutiques et les salons, en hauts responsables, députés, officiers, cadres, agents des renseignements, pour essayer d’arnaquer et soutirer de l’argent.

 

Pseudo-contrôleurs de produits alimentaires

Une Renault express bleue, sans plaques d’immatriculation, est ainsi utilisée par des jeunes hommes qui se présentent en tant qu’agents de la direction de protection du consommateur. La semaine dernière à Riyad, une vieille femme était seule dans la boutique de son fils parti faire des achats en ville. Une fourgonnette bleue s’arrête. Un jeune homme bien habillé en descend, dossier en main, et entre dans le petit commerce. « Je viens contrôler la date de péremption des produits », lance-t-il en passant derrière le comptoir, laissant, comme deux ronds de flan, la vieille femme toujours assise à l’entrée. Le pseudo-contrôleur fouine quelques minutes entre les marchandises puis s’en va en disant qu’il n’y a rien à signaler, au grand bonheur de la dame qui craignait d’être verbalisée. Elle a à peine le temps de lancer un « Attendez la boisson ! » que déjà l’express a filé. Et pour cause : bientôt de retour, le boutiquier va devoir constater la disparition de 90 000 UM et d’un lot de cartes de recharge !

Une boutique de pièces détachées au Ksar aura reçu, elle aussi, la visite d’une autre personne, à bord du même véhicule, qui se sera emparée d’une forte somme d’argent. Plusieurs autres boutiques de quartiers éloignés se sont déclarées victimes du même gang à l’Express bleu sans numéro. La police n’a pu, jusqu’à présent, leur mettre la main dessus.

 

L’officier de la garde présidentielle

Il y a quelques jours de cela, la direction régionale des impôts sise à Teyaret grouille, comme d’habitude, de monde. De longues files d’attente se pressent aux guichets, pour payer les taxes en retard. Un homme bien épais et sentant bon parfum se présente à la porte, demandant à voir, d’urgence, le directeur. On l’informe que celui-ci vient de sortir mais que le chef du service principal est sur place. Une fois seul avec ledit chef, l’homme se présente en tant qu’officier de la sécurité présidentielle. « Ma voiture est tombée en panne dans les environs », déclare-t-il, « et je voudrais vous emprunter 20 000 UM pour la faire réparer. – Pas de problèmes ! », lui répond le responsable qui a aussitôt flairé l’imposture, « Je vais passer à la caisse pour les retirer. Toi, attends-moi tranquillement ici ». Et d’alerter un ami officier qui lui recommande de retenir l’escroc le temps nécessaire pour réunir ses hommes. Un quart d’heure plus tard, l’officier et sa troupe  débarquent. Trop tard ! Le filou a déjà compris qu’il allait être piégé et a filé sans être vu !

 

Le journaliste au chèque

Dans une agence de voyages située sur l’axe Champs Elysées de Tevragh Zeïna, un agent de comptoir reçoit la visite d’un individu habillé à l’européenne et porteur d’un sac. « Je suis journaliste correspondant d’une chaîne étrangère. J’ai une petite urgence et j’allais retirer de l’argent dans un guichet automatique. Mais j’ai malheureusement oublié ma carte. Pourriez-vous me remettre 20 000UM contre ce chèque ? », lance-t-il. Le pauvre agent gobe l’histoire, passe la somme et prend le document. Ce sera toute une complication, deux semaines plus tard, alors que le pseudo-journaliste a, bien évidemment, disparu pour de bon, pour faire entendre sa bonne foi car le chèque provient d’une souche volée qui en a déjà roulé bien d’autres dans la farine…

Mosy