J’ai, en tant que Vice-Président du Conseil Représentatif des Associations Noires de France (CRAN), sollicité la faveur d’une audience visant à soumettre à la sagacité des instances en charge de la coopération franco-africaine, les ressentiments des Africains, leurs attentes, ainsi que les suggestions dont le CRAN se fait l’écho, pour favoriser, un tant soit peu, l’éclairage « des questions qui fâchent », la levée des «équivoques », les chantiers dont la poursuite mérite d’être renforcée, tout comme la conversion co-développementale franco-africaine en mesure d’autoriser une meilleure consolidation des liens qui unissent la France à l’Afrique.
Le séjour du Président Hollande en terre camerounaise, étant aujourd’hui entré dans le registre « du passé récent », je me résous néanmoins à partager avec tous, ce qu’il me semble utile de dire…
I- DES RESSENTIMENTS :
I-1- De la voix et des intérêts de l’Afrique, bafoués par la France…
Ce qu’il me semble utile de dire est qu’une manière de désaffection de « l’hexagone » caractérise le regard que portent les Africains en général et les camerounais en particulier, sur la coopération franco-africaine.
Le propos courant au Cameroun comme l’argumentation la plus incisive font état de ce que la politique extérieure de la France, en dépit des liens historiques et culturels avec « l’Afrique francophone », est fortement marquée par le parti résolument pris pour une Europe consumériste et soumise au diktat des intérêts de la haute finance.
L’angélisme sans doute sincère de nombreux Africains et Camerounais qui voyaient en la France « une amie fidèle, sincère et porteuse de valeurs humanitaires» a tôt fait de tomber en désuétude, ces trente dernières années au cours desquelles, la France, de l’avis des Africains, notamment subsahariens, a sacrifié sur « l’autel des gains engrangés par les multinationales de la finance », la voix et les intérêts de l’Afrique auprès de ses pairs tant Français, Européens, qu’Américains.
I-1-1- L’ère douloureuse des ajustements structurel et monétaire en Afrique Subsaharienne sous le regard passif et consentant de la France…
Les ajustements structurels imposés aux pays africains dès les années 1980, ont fortement ébranlé l’autorité de nos Etats, anéanti leur tissu économique, fragilisé voire même réifié le pouvoir d’achat des ménages, et cela va sans dire, généré une précarité et une paupérisation extrêmes des populations.
La « doxa » de la Banque Mondiale (BM) et du Fonds Monétaire International (FMI) consistait en une « thérapie de choc » visant à arrimer nos économies africaines aux « standards internationaux ». Il apparaît clairement aujourd’hui qu’il ne s’est agi, ni plus ni moins que d’une « atteinte à la souveraineté de nos Etats », « d’une main basse sur les secteurs productifs de l’économie des pays subsahariens », et « d’une déstructuration des investissements publics ».
Au nom de la privatisation, de la baisse des salaires, de la déflation des personnels, de nombreux cadres, techniciens et ouvriers ont été réduits au chômage, les Entreprises et Administrations qui les employaient ayant été soumises à la restructuration.
Aucun des secteurs social, économique ou paraétatique n’a été épargné : les effectifs de la Fonction Publique jugés pléthoriques sont passés sous le crible du PAGE (Programme d’Ajustement Général des Effectifs). Sous « l’euphémisme indolore » de « départs volontaires », la Banque Mondiale a encouragé et financé « avec un zèle excessif » la prime de « départ volontaire», dans un contexte de récession économique incitant ceux des cadres les plus expérimentés de la Fonction Publique, à mordre à « l’hameçon de l’austérité, l’appât inespéré qui y était fixé ».
Sans aucune préparation, sans aucun accompagnement, des pans entiers de ressources humaines valeureuses qui auraient dû, qui auraient pu passer le témoin de leur savoir-faire aux jeunes générations, se retrouvaient, pour avoir fait le « saut dans l’inconnu », livrés à eux-mêmes, avec un « pactol en francs CFA dont la valeur réelle était de moitié celle ayant cours sur le marché de la récession ».
En clair, du fait de la parité fixe du CFA avec le Franc Français de lors, le passage de 1 FF pour 50 FCFA à 1 FF pour 100 (cent) FCFA correspondait à une dévaluation de l’ordre de 100%... Allez y comprendre quelque chose…
Au Cameroun, cette situation a été vécue dans une extrême douleur, les salaires ayant subi une coupe sombre « mécanique » de plus de 50%.
Dans ce contexte « inhumain et inacceptable sous d’autres cieux », les camerounais et bien d’autres Africains ne pouvaient que nourrir vis-à-vis de la Communauté Financière d’Afrique (CFA) des ressentiments tels que la méfiance, la défiance, l’amertume, le dépit.
Mieux, «une certitude et une conviction partagées ont conduit de nombreux Africains et Camerounais à n’entrevoir dans la dévaluation couplée aux programmes d’ajustement structurel du FMI et de la Banque Mondiale, qu’une volonté des créanciers du Nord de recoloniser l’Afrique Subsaharienne et d’anéantir l’autorité des Etats dont les programmes de développement étaient dorénavant dictés par les Institutions Financières Internationales ».
La formation progressive au Cameroun de l’idée qu’« une vaste conspiration » pour ébranler le « socle granitique de l’unité » et « fissurer les acquis du tissu économique » avait été ourdie contre l’Afrique subsaharienne pour y établir, comme le souligne Eric TOUSSAINT : « un redoutable mécanisme de transfert de richesses des peuples vers les créanciers du Nord », s’est confirmée au fil des ans.
Vingt cinq ans après la dévaluation, « l’Afrique subsaharienne saigne toujours aux quatre veines » pour rembourser la dette extérieure ; le Cameroun avec.
Figurez-vous, ainsi que l’indique l’étude conduite par Eric TOUSSAINT, qu’en 2002 « la dette extérieure de l’Afrique s’élevait à 204 milliards de dollars ; elle a donc été multipliée par 3.4 depuis 1980. Toujours en 2002, l’Afrique subsaharienne s’est saignée pour rembourser la somme de 13.4 milliards de dollars au titre du service de la dette (capital et intérêts) ».
« Si on considère la période entre 1980 et 2002, c’est plus de 250 milliards de dollars qui ont été remboursés, soit quatre fois la dette de 1980. Ainsi, pour un dollar dû en 1980, l’Afrique en a remboursé 4 mais elle en doit encore 4… »
I-1-2-Le fardeau de la dette extérieure subsaharienne : un échec retentissant occulté par les institutions financières internationales et la France
Passées les décennies douloureuses de la dévaluation du FCFA, « les mécanismes de transfert de richesses des peuples d’Afrique Subsahérienne vers les créanciers du Nord demeurent, permettant aux « classes dominantes locales de prélever au passage leur commission ».
Qu’est-ce à dire sinon que faute de pouvoir annuler la dette dont le poids extrêmement élevé s’accroît davantage du fait de l’accumulation d’arriérés de paiement, il convient au moins de ramener le stock de la dette qui « représente ou dépasse pour la plupart des pays du continent 400% des revenus annuels d’exportation (ou quatre années d’exportation)… », à son expression la plus simple.
Il serait, de fait, plus conséquent d’envisager l’hypothèse que le stock de la dette et les intérêts d’une année soient repartis sur les années correspondant à la quotité en mesure d’assurer sans défaut, les paiements du service de la dette aux FMI et autres bailleurs de fonds.
A contrario, si l’ampleur du service de la dette perdure dans les proportions actuelles, « il y a un risque que l’Afrique soit privée des investissements directs et autres flux privés » comme le soulignait déjà, il y a vingt ans (1995), un rapport du FMI.
Loin de nous la prétention de nous ériger en « donneur de leçons » à des Institutions Financières Internationales qui ont sans doute bonne conscience d’aider les Etats, mais trente-cinq ans d’ajustement structurel et dès 1999, « de cadre stratégique de lutte contre la pauvreté » n’ont permis « qu’un endettement croissant malgré le remboursement de montants importants ; un échange inégal entraînant un déficit commercial croissant ; des bulletins de santé positifs du FMI pour l’Afrique par médias interposés ; des résultats diamétralement opposés aux proclamations optimistes de mise dans les communiqués officiels ».
Selon un rapport de la CNUCED, 2000, P4 «Dans la période de 1975-1982, les entrées de capitaux privés représentaient 3.9% du Produit National Brut des Pays d’Afrique Subsaharienne ; en 1983-1998, période de généralisation de l’ajustement structurel, elles ne représentaient plus que 1.8% du PNB, soit une chute de plus de 50% par rapport à la période 1975-1982 (période qui a précédé la crise de la dette et le début des politiques d’ajustement)… »
Le scénario de la dette en Afrique est un « cercle vicieux » qui participe depuis trente cinq ans « du châtiment de procuste » par son allongement et « du DEUS EX MACHINA Grec » par son caractère à la fois fatal et tragique.
I-1-3- Fatalité de la dette ou fatalité de l’histoire ? Des Programmes d’ajustement structurel (P.A.S.) au cadre stratégique de lutte contre la pauvreté (P.P.T.E).
Notre analyse, que dis-je ? Notre observation triviale est qu’en Afrique : « Qui paie ses dettes doit s’endetter davantage s’il veut continuer à produire de la richesse qui ne servira qu’à apurer les intérêts et « peu ou prou », le capital du stock cumulé de la dette ».
Si les Institutions Financières Internationales dont les technostructures se prévalent de se soucier du développement humain, poussent le cynisme jusqu’à l’aveuglement, alors, il y a lieu de désespérer de les voir mettre sur pied des mécanismes visant à « libérer les Etats et les peuples d’Afrique subsaharienne du fardeau de la dette extérieure ».
Sinon, d’où viendrait-il qu’occultant de leurs analyses, études et rapports le retentissant échec des plans d’ajustement structurels, les Institutions Financières Internationales et autres pourvoyeurs de fonds aient pu rebaptiser en 1999, les politiques d’ajustement structurel sous la dénomination « Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté » et ne pas dans le même temps affirmer au monde entier, qu’elles venaient de réussir le « tour de force » d’inscrire les Etats de l’Afrique subsaharienne au tableau historiquement « incestueux » de « Pays Pauvres Très Endettés ».
L’inflation et la déflation lexicales étaient passées par là : « Pays sous-développés » ; « Pays en voie de développement » ; « pays du Tiers Monde » ; « Pays Pauvres Très Endettés » ou « Pays du quart monde » … le tour de force a vraisemblablement atteint son apogée, à travers la trouvaille inspirée du « cadre stratégique de lutte contre la pauvreté », lequel, au lieu de faire le constat d’échec des politiques d’austérité ayant inexorablement « conduit les gouvernements africains les ayant appliquées » à la paupérisation de leurs populations, « se destinait à attirer les capitaux privés indispensables au décollage économique ». Pour ce faire, « les gouvernements africains étaient priés de réduire à sa plus simple expression l’impôt sur les bénéfices réalisés par les Entreprises étrangères, de permettre la libre sortie (rapatriement) des bénéfices vers la maison mère située à 95% des cas dans les pays les plus industrialisés. Une « rebetotte » en somme…
Les incitants jugés appropriés par les organismes financiers internationaux au premier rang desquels le Fonds Monétaire International (FMI) et la Banque Mondiale (BM) se résument en ceci que « les Gouvernements africains « offrent », gratuitement les terrains et l’infrastructure de communication aux Entreprises étrangères qui désireraient s’installer dans le pays. Si cela ne suffit pas, il leur est recommandé de créer des zones franches dans lesquelles aucun impôt n’est prélevé et où le code du travail et les contrats collectifs en vigueur dans le pays, ne sont pas d’application ». En termes clairs, « Pour obtenir un flux d’investissements étrangers, les Etats Africains (doivent renoncer) à des recettes d’impôts (augmenter) certaines dépenses d’infrastructure, (offrir) des parties du patrimoine national (terrains etc…) et (permettre) le non respect de certains aspects de la réglementation du travail ».
I-1-4- Le refus de la France d’interroger la faillite du P.A.S. et du cadre PPTE au sein de la zone franc.
Or, Six années après la mise en œuvre des politiques d’ajustement et une année après l’instauration du « cadre stratégique de lutte contre la pauvreté » visant principalement « les flux de capitaux et la croissance en Afrique », un rapport daté de juillet 2000 sous le titre sus évoqué, édifie déjà de ce que : « non seulement les capitaux étrangers privés n’affluent pas mais les capitaux privés nationaux quittent les pays concernés en quantités de plus en plus grandes ».
En tant que Vice-Président du CRAN, chargé de l’Afrique et des Affaires Internationales, il me semble utile de dire à la France que la dette impayée et querellée de l’esclavage, la dette mise en veilleuse de la colonisation, la dette extérieure perverse et « réitérative » pour laquelle saigne l’Afrique subsaharienne, et aujourd’hui, le poids de la dette intérieure, pur produit de la libéralisation en vue des « achats d’actifs étrangers par les résidents africains » participent d’une même « rengaine » : mettre sous « coupe réglée » les économies africaines, notamment subsahariennes ; instrumentaliser les Etats aux fins de les démunir de toute souveraineté, favoriser « un capitalisme privé africain délictueux et infâme à la solde et à la merci des créanciers du Nord ».
I-1-4-1-La fuite endémique des capitaux africains, issue de la « libéralisation : véritable boîte de Pandore » de la corruption et des détournements de deniers publics en Afrique…
De fait, « la levée des contrôles sur les mouvements de capitaux ordonnés par le FMI et la Banque Mondiale », s’est avéré une source importante d’instabilité. Rubens Ricupero, Secrétaire Général de la CNUCED faisait déjà remarquer en 1998 dans un rapport intitulé : « Le développement de l’Afrique : une approche comparative » :
« La libéralisation des opérations en capital a peu de chances de faire revenir les capitaux fugitifs qui, selon certaines estimations, représentent 70% de la richesse privée non foncière dans les pays subsahariens. Ces capitaux semblent constitués surtout de deniers publics détournés illicitement, plutôt que de revenus industriels et commerciaux à la recherche de stabilité économique ou de rendements élevés à l’étranger. La modification de la réglementation bancaire des pays développés où ces capitaux sont dissimulés pourrait avoir des résultats positifs à cet égard ».
L’extrait qui précède souligne fort à propos l’échec des politiques d’ajustement structurel, lesquelles, « Loin de lutter contre la corruption, la facilitent et l’augmentent… Loin de réprimer les détournements et le recel…les encouragent ne serait-ce que passivement… ».
Davantage, les principes de l’ajustement structurel selon lesquels, les capitaux privés sont le moteur du développement ne se vérifient pas pour l’Afrique. A ce sujet, la CNUCED expliquait dès juillet 2000 que : « les apports privés, notamment l’Investissement direct à l’étranger (IDE), ne mènent pas à la croissance mais la suivent ».
Eric Toussaint relève y relativement : « comme la croissance ne vient pas d’elle-même, c’est aux capitaux publics qu’il revient de pallier le manque de ressources » citant la CNUCED, il réitère : « l’impulsion première ne peut venir que de sources publiques de financement et devra s’accompagner d’une politique tenant compte de la nécessité non seulement de faire jouer les mécanismes du marché, mais encore de consolider le rôle de l’Etat et de renforcer les institutions ».
Or, l’application des politiques d’ajustement structurel dictées par la Banque Mondiale et le FMI s’est concrétisée par : « une diminution des apports publics extérieurs, une diminution des apports privés extérieurs et une augmentation de la fuite des capitaux africains vers les pays les plus industrialisés ». Dans un tel contexte, il est difficile d’éviter les révoltes, soulèvements des peuples dont la souffrance et le dénuement poussés à l’extrême ne peuvent servir que d’aiguillons à « la purgation des passions » et au déchaînement de la violence. Les « boucs-émissaires », recrutés dans « la classe locale dominante et prédatrice » sont alors indexés et livrés à la vindicte populaire, et les pays en proie au chaos.
Notre avis est que les racines profondes et souvent inexpliquées des crises en Afrique subsaharienne résident moins dans les processus démocratiques que dans l’application des politiques qui contraignent « Les gouvernements du sous-continent » à être littéralement sous la coupe du FMI, de la Banque Mondiale, du Club de Paris etc… alors même que « les avoirs de l’Afrique déposés à l’étranger sont supérieurs à la dette », ainsi que de nombreuses études l’ont démontré, sans que ce dernier aspect ne soit suivi de conséquence.
I-2-Le rôle de la France jugé pour les uns « velléitaire » « minimaliste ou réductionniste et pour d’autres « inhibiteur » voire « dévastateur ».
La France qui partage depuis 1948 avec ses anciennes colonies subsahariennes, la Communauté Financière Africaine (CFA) a le devoir d’interroger « la légitimité morale et juridique de l’obligation de rembourser la dette » pour une unique et simple raison : le maintien de la zone franc.
La dévaluation du FCFA a, par un mécanisme dont le trésor français détient le secret, modifié la parité vieille de 46ans. En 1959, année de la création du nouveau franc, 1FF équivaut à 50FCFA. Le 1er janvier 1994, suite à la dévaluation de 100%, le Franc Français vaut désormais 100 FCFA. Le 1er janvier 1999, la parité du FCFA s’établit à 655.957 FCFA pour un (1) euro. Les conséquences désastreuses au plan social et économique ont été, sinon mésestimées, du moins sous-estimées par les statistiques comparatives macro-économiques. Ces dernières supputent notamment que la zone franc (des colonies françaises d’Afrique) à mieux réagi aux difficultés rencontrées lors des tentatives d’ajustement réel et face aux chocs extérieurs : hausse du dollar par rapport au franc français (FF), baisse des cours de nombreuses matières premières.
Si la stabilité et la garantie de convertibilité sont demeurées des atouts indéniables, « la zone franc depuis aujourd’hui cinquante sept (57) ans, a mis « la charrue avant les bœufs ».
L’intégration monétaire a précédé l’intégration économique, tant et si bien que, mesurés à l’aune des flux commerciaux intra-zone, ces derniers ne représentent que 10% pour les pays de l’UEMOA (l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine) et 6% pour les pays de la CEMAC (Communauté Economique et Monétaire d’Afrique Centrale). « L’intégration monétaire n’a pas été suffisante pour compenser des handicaps structurels majeurs : une structure d’exportation centrée sur des produits peu transformés, des infrastructures insuffisamment développées, des marchés étroits, de nombreux obstacles aux échanges… ».
Ce constat pertinent de francis KERN et Claire MAINGUY se double d’une préoccupation constante aux yeux de nombreux africains : « la perte d’indépendance que le fonctionnement de la zone franc implique, dans certaines circonstances, en matière de politique monétaire ».
Les perspectives d’évolution de la zone franc porteront d’une part « sur l’opportunité ou non d’introduire plus de flexibilité dans la détermination des taux de change de façon à avoir une certaine marge de manœuvre en cas de chocs externes ; et de l’autre, sur la question des relations monétaires de la zone franc avec le Nigéria qui est le principal acteur commercial dans la région ».
Même en se donnant la peine de faire passer par pertes et profits, les cinquante sept (57) ans de ce qui à n’en point douter, est « un mécanisme de coopération monétaire original, en vertu du rôle de tiers-garant de la France au sein de la zone franc, les Africains ne se sont jamais départis de l’idée que les indépendances africaines demeurent jusqu’à nos jours « illusoires » en « l’absence de politiques monétaires conduites souverainement par les Etats Africains ». La zone franc constitue à leurs yeux une tutelle monétaire qui vient plomber, conjuguée au « service de la dette », toute velléité de croissance en Afrique subsaharienne. La règle est consacrée qui n’honore pas la zone franc : « Plus un pays africain est pauvre, plus grande est la part de sa dette détenue par les institutions financières internationales (IFI) et les Etats du Nord ».
Selon les statistiques de la Banque Mondiale, datant de 2001 : « 72% de la dette publique externe du Niger étaient dus aux IFI ; [tel était le cas] pour 88% de la dette du Burundi, pour 87% de la dette Rwandaise, pour 73% de la dette Centrafricaine, 82% de la dette du Burkina – Faso ».
Il est aussi notoirement connu, surtout en ce qui concerne les anciennes colonies françaises, qu’une partie considérable de l’aide publique au développement octroyé par les pays du Nord, est utilisée par les pays endettés pour rembourser les IFI. Dans ces conditions, d’où viendrait la croissance ?
I-5- L’incapacité de la France de passer de la tutelle monétaire en Afrique à une tutelle de développement de l’Afrique.
La France a le devoir historique de repenser son rôle de « tiers – garant » au sein de la zone franc et se positionner en partenaire solidaire, sincère et soucieux du développement économique de ses anciennes colonies. Cinquante sept ans de fréquentation monétaire commune l’y oblige. Cinquante sept ans de coopération et d’accords qui, s’ils n’avantageaient pas la France, les IFI et les créanciers du Nord, seraient frappés de caducité. Nul ne s’y méprend.
L’heure est venue de mettre un terme à l’iniquité, à l’inéquité et à la permissivité qui ont pour noms : l’évasion des capitaux privés africains, la révision des règles de fonctionnement des avoirs déposés sur le compte d’opération ouvert au Trésor Français, le poids rendu insurmontable du service de la dette.
Ne pas conduire une réflexion visant la « reconversion du regard et des actions de la France », à l’endroit de l’Afrique et principalement de ses anciennes colonies, serait préjudiciable à la dynamique mondiale de l’heure qui est à « la réinvention d’un nouveau modèle de développement affranchi des dégâts collatéraux du consumérisme et du diktat de la haute finance ».
La France y gagnera énormément et l’Afrique aussi. C’est pourquoi, les attentes des Africains, au-delà des ressentiments et de la défiance largement répandus, témoignent de l’intérêt et de l’attachement qu’ils continuent à manifester pour la France.
En Afrique, « on sait pardonner parce qu’on sait donner. Mais en vertu de la survivance de nos traditions orales encore vivaces dans la mémoire des peuples, on oublie pas. C’est aussi pourquoi on sait attendre. »
II-DES ATTENTES
II-1- Postulation pour un développement technologique et économique de l’Afrique tourné vers les valeurs déterminantes de la place de l’être humain et de son action dans le monde.
Nous voulons entrer dans le second volet de notre triptyque « ce qu’il nous semble utile de dire », en partageant avec vous ces lignes inspirées de l’encyclique LAUDA TO SI du Pape François sur la Sauvegarde de notre MAISON COMMUNE :
« On a tendance à croire « que tout accroissement de puissance est en soi « progrès », un degré plus haut de sécurité, d’utilité, de bien-être, de force vitale, de plénitude des valeurs »83, comme si la réalité, le bien-être et la vérité surgissaient spontanément du pouvoir technologique et économique lui-même. Le fait est que « l’homme moderne n’a pas reçu l’éducation nécessaire pour faire un bon usage de son pouvoir »84, parce que l’immense progrès technologique n’a pas été accompagné d’un développement de l’être humain en responsabilité, en valeur, en conscience. Chaque époque tend à développer peu d’auto-conscience de ses propres limites ».
Ces lignes dont la pertinence jaillit d’elles-mêmes, posent la thématique d’ensemble du « paradigme technologique, la place de l’être humain et de son action dans le monde » qui, réunis, constituent l’épineuse question du modèle de développement dont l’Afrique a besoin.
Le transfert des technologies, l’acquisition des savoir-faire, la compensation ou le rattrapage du déficit énergétique indispensable à l’industrialisation et à la transformation des produits de matières premières, le développement de l’Agriculture et l’appropriation des savoirs visant la transformation saine des produits agro-alimentaires, agro-industriels, la question des énergies renouvelables, la maîtrise du potentiel hydraulique à travers non seulement la vulgarisation des technologies appropriées, mais aussi, l’éducation à l’environnement inférant la nécessité de mettre en lumière l’idée que « l’accès à l’eau potable et sûre est un droit humain primordial, fondamental et universel, parce qu’il détermine la survie des personnes, et par conséquent il est une condition pour l’exercice des autres droits humains ».
Autant de chantiers, autant d’attentes, autant de défis dont il convient de dire qu’ils sont loin d’être exhaustifs, mais ne peuvent être mis en train en vue de leur réalisation, que si des préalables tenant lieu le conditionnalités ne sont véritablement réunis.
Ces préalables concernent l’éducation citoyenne, démocratique et environnementale des ressources humaines africaines présentes et futures, les formations professionnalisantes novatrices tournées vers le développement humain intégral et l’inclusion sociale, la mobilisation des ressources financières endogènes, exogènes des peuples et « diasporas » africaines à travers des projets structurants pensés, partagés et sous tendus par « une dynamique participative intéressée et soutenue par les Etats Africains ».
II-2- Postulation pour la nécessaire redéfinition d’une relation franco-africaine au service d’un autre type de progrès, plus sain, plus humain, plus social, plus intégral.
C’est dans ce cadre que les attentes des Africains sont les plus pressantes et que le concours de la France, pourrait autoriser une redéfinition de la relation franco-africaine, une révolution de la pensée et de l’action de la France vis-à-vis de l’Afrique.
Conscient de ce que « les avancées de la science et de la technique ne sont pas équivalentes aux avancées de l’humanité et de l’histoire… », nous sommes d’avis que la France doit oser pouvoir peser de tout son poids en Afrique, pour que soit possible « un élargissement nouveau du regard » porté sur l’idée que : « la liberté humaine est capable de limiter la technique, de l’orienter, comme de la mettre au service d’un autre type de progrès, plus sain, plus humain, plus social, plus intégral ». Ce challenge est indispensable. Il est la condition sine qua non du changement de la « matrice » des rapports franco-africains en mesure de permettre qu’une nouvelle ère émerge des cendres et rancœurs de la colonisation, des ressentiments du néo-colonialisme, des psychoses tutélaires et traumatisantes de l’appartenance à la zone franc.
Cette ère nouvelle, fondée sur « la reconnaissance de nouveaux horizons éthiques, implique une révolution politique et culturelle courageuse » de la part de la France et des Etats Africains qui, faut-il le dire, ne sont pas exempts de tout reproche, bien au contraire…
A la faveur du « Dégel », ayant favorisé le démantèlement du « Bloc de l’Est, la « chute du mur de Berlin » en Allemagne, « la Perestroïka » en Russie, la fin de « la guerre froide », les processus démocratiques africains entamés depuis « le sommet de la Baule » sous François MITTERAND, ont dans un engrenage digne d’une secousse sismique, ouvert « la faille » d’un monde unipolaire, précurseur de « la globalisation » actuelle.
La mouvance ainsi déclenchée dont « l’onde de choc » s’amplifiera sur près de deux décennies (1980-2000) sera estampillé en Afrique du sceau des « conférences nationales souveraines », émanations claires de la reconfiguration du géo-système libéral piloté par les Etats-Unis d’Amérique (U.S.A) et entériné par l’Europe.
La problématique qui traverse les Etats Africains alors englués dans l’impréparation et « les conservatismes inhérents aux systèmes de gouvernance monopartistes », se déclinait en une alternative qui consistait, soit à s’ouvrir au « vent de l’Est dans l’impréparation » ou alors « tenir ferme le statu quo ante de la stabilité assurée par « les partis uniques » et s’ouvrir progressivement au multipartisme ». Les choix opérés seront à « géométrie variable » et la « fortune démocratique » des Etats Africains aussi.
Mais ce qu’il est utile de dire, c’est que les processus démocratiques sont restés depuis lors tributaires d’une « forme de vassalité » qui induit, moins le choix des électeurs que celui dicté par les anciennes puissances coloniales occidentales. L’adoubement des chefs d’Etats bien ou mal élus par les Nations – Unies, la France et/ou les Etats-Unis d’Amérique, est à bien des égards, l’indicateur majeur qui détermine la régularité des élections en Afrique subsaharienne.
II-2-1- Postulation du passage « du droit d’ingérance » puis du « devoir d’ingérance » au dialogue des cultures des peuples et de leur histoire singulière.
La France, dont nul n’ignore la forte tradition diplomatique dans le concert des Nations, n’a jamais cru devoir modifier les grandes lignes de sa politique extérieure africaine depuis le Général de Gaule. Ses anciennes colonies continuent d’entretenir des liens « quasi fusionnels » avec « la métropole » dont « le conseil », « l’avis », « les réserves » ou « les directives » sont pris en compte, lorsqu’ils ne sont pas tout simplement suivis à la lettre. Il est dès lors compréhensible que les rapports de coopération entre l’ancienne puissance tutrice et les pays africains francophones, s’apparentent à ceux qui régissent « le Maître et ses élèves » ; le Maître donnant des bons points et satisfécits aux « meilleurs élèves », entendez ceux qui au-delà du suffrage universel des peuples, sauvegardent les intérêts de la France, et sanctionnant parfois très sévèrement « les récalcitrants et entêtés » qui osent s’écarter ou piétiner « le pré carré ».
Le retour à « l’ordre établi » depuis 1948 par la France, quelque soit « la fortune » des Etats Africains où cet ordre règne, est une préoccupation vitale et impérieuse de politique extérieure franco-africaine. Certes, « une accommodation » faite de mesures cosmétiques s’est opérée au fil des cinquante sept dernières années : des « répressions sanglantes et meurtrières coloniales » destinées à soumettre les peuples africains revendiquant leur autonomie, la France est passée dans la période post-indépendante, à « l’interventionnisme armé tous azimuts » censé rétablir « la légalité républicaine » partout où elle était à ses yeux, menacée, piétinée ou remise en cause, pour finalement s’ériger en « bras armé » des potentats qu’elle avait imposés aux peuples africains, lorsque ceux-ci n’étaient pas en mesure de « réprimer les foyers d’insurrection qui s’embrasaient » ici et là, du fait de leur « illégitimité », ou de leur « gouvernance jugée calamiteuse ».
La ligne de force de toutes les mutations de la diplomatie extérieure franco-africaine ne s’est jamais départie « des intérêts de la France».
Du « paternalisme autoritaire et fouettard » de la France, au « paternalisme bienveillant » en passant par l’interventionnisme républicain au nom de la liberté, de la paix civile et des valeurs humanistes inhérentes au bien-être des peuples, « la longue marche de la coopération franco-africaine et de la politique extérieure africaine de la France a toujours été émaillée de gestes, faits et haut-faits dont il ne nous semble pas utile de faire l’inventaire. En revanche, la reproduction en plein XXIème siècle de la capture d’un Président, fût-il dictateur, et son assassinat programmé par la France alors présidée par Nicolas Sarkozy est un extrême et fâcheux précédent.
II-2-2- Postulation pour que soit mis un terme en Afrique au soutien des rebellions instrumentalisées par les intérêts économiques et technologiques oligopolistiques.
Avec l’onction des Nations-Unies et une coalition de l’OTAN conduite par la France et l’activisme Onusien et International du Président Nicolas SARKOZY, la Libye a connu des heures dantesques et apocalyptiques dont l’unique but était moins de libérer le peuple libyen que d’évincer la dictature du Colonel MUHAMAR KHADAFI, devenu par « ses frasques et son arrogance » infréquentable. Le soutien armé des rebelles depuis Benghazi n’a pas suffi. Les convoyages, en plein désert du Sahara, de Charters d’armes légères et sophistiquées destinées aux troupes et bandes d’insurgés non plus. Il a fallu le feu nourri des bombardements aériens sur les cibles répertoriées à l’avance : les bases militaires, bunkers, caches d’armes, chars d’assaut etc…, et les résidences du « Guide » Lybien, pour faire plier les troupes favorables au Colonel KHADAFI. Le bilan inestimable en pertes matérielles, infrastructurelles et humaines civiles n’a jamais ému qui que ce soit. Seul l’objectif de déchoir KADHAFI importait. Trop d’intérêts européens bénéficiant de « la chute du dictateur » étaient en jeu. Le relativisme ambiant, orchestré avec maestria par « une médiatisation outrancièrement manichéenne a légitimé l’assassinat par des puissances occidentales mues par des intérêts avoués » d’un chef d’Etat en fonction et aux prises avec une rébellion locale.
Ceci est indéniable par delà toutes les conjectures pseudo-éthiques et/ou justificatives d’un « humanisme à l’eau de rose ».
Il est tout aussi indéniable que la vérité des chiffres sur le désastre causé à la Lybie aux plans infrastructurel, matériel, humain, économique et politique, tout comme la déstabilisation de la bande sahélo-saharienne, sera du fait de la culture du relativisme dominant, reléguée dans le meilleur des cas, au rang de dégâts collatéraux utiles au pire, « de résidus » issus de la logique implacable de la nécessité ; « la fin justifiant les moyens, ou plus trivialement : « on ne fait d’omelette sans casser les œufs ».
Pourtant, il s’agit d’un désastre au cœur de l’Afrique. « La chute de KADHAFI » prélude, de l’Afrique du Nord au Soudan, jusqu’aux tréfonds de l’Afrique Subsaharienne, à la naissance, à la maturation et à la recrudescence des groupes armés qui écumeront pendant des décennies, la bande sahélo-saharienne, mettant en péril, la stabilité des Etats, la paix civile et compromettant le développement économique des pays africains.
Etait-ce là l’objectif recherché par la France de Nicolas SARKOZY ? Toujours est-il que « le soutien apporté à tous les groupes rebelles locaux africains qui réussissent à s’auréoler peu ou prou de dénominations « avantageuses » telles « front du salut, « Parti nationaliste, « Front de libération, etc… ne contribue qu’à desservir les populations et à instaurer l’anarchie voire le chaos ».
La Lybie, après l’assassinat de MUHAMAR KHADAFI l’illustre parfaitement. Le silence complice des médias européens et français sur les dommages incommensurables causés au peuple lybien participe de la logique qui accorde la priorité aux intérêts de circonstance, rendant tout le reste relatif… ». C’est la même logique du « utilise et jette » qui caractérise « le paradigme technologique et économique dominant ». Pourtant, il est prouvé au quotidien que « s’il n’existe pas de vérités objectives ni de principes solides hors de la réalisation de projets personnels et de la satisfaction de nécessités immédiates, quelles limites peuvent alors avoir la traite des êtres humains, la criminalité organisée, le narcotrafic, le commerce des diamants ensanglantés et de peaux d’animaux en voie d’extinction ?» assurément aucune.
II-2-3- Postulation pour qu’une manière d’anthropologie politique fondé sur l’idée que le développement en Afrique suppose « un processus historique dans un contexte culturel »
Le déferlement des immigrés que l’Europe peine à contenir, la main mise des factions rivales sur la politique lybienne et l’économie, la montée de l’islamisme armé en quête d’ancrage territorial, d’enraciment et d’expansion idéologique, la menace croissante de la terreur perpétrée par des bandes puissamment armées qui hantent du sahara au Soudan, l’Afrique, sèment le désarroi et compromettent la paix civile, sont autant de succédanés de « l’ingouvernabilité actuelle de la Lybie ».
La France, dont la responsabilité ne peut être occultée quant à la désintégration de la Lybie et ses conséquences tant au Mali, au Niger, au Tchad, au Cameroun, au Nigéria, qu’au Soudan, doit à présent, reconsidérer les paramètres de sa politique extérieure en Afrique.
Les africains ont mal vécu « la chute de KHADAFI » et son assassinat, tout comme ils ont éprouvé un vif ressentiment et une profonde révolte lors de l’intervention française qui a conduit à l’arrestation du Président élu de la Côte d’Ivoire, Laurent GBAGBO» Voler au secours d’un Etat lié par des accords de coopération avec la France est compréhensible. Imposer par la force « un individu jugé accommodant » et « propice aux intérêts de l’Occident » est malsain.
La France sous Nicolas SARKOZY a adressé un message mal reçu par les Africains. Nul ne peut en effet présager des conséquences de la désaffection qui s’en est suivie. Il reste que le sentiment général et amplement partagé militait et continue de militer pour un changement de politique extérieure de la France en Afrique.
« La France doit tout en sauvegardant ses intérêts, éviter d’imposer aux peuples africains, l’image disgracieuse et humiliante de leurs chefs d’Etats, au nom d’une alternance de surface ». Ce qui incombe à la France, c’est de revisiter voire reviser en profondeur « le logiciel de ses accords de coopération » tournés vers les intérêts de la haute finance, pour les réorienter en vue du développement de l’Afrique.
« L’Afrique est l’avenir de la France » ; la France est condamnée à faire de l’Afrique « une alliée sûre et fière des avancées auxquelles elle aura contribué à favoriser… ». C’est pourquoi, il est urgent et nécessaire de cesser d’appliquer une politique étrangère basée sur « la dictature des urnes » pour entrer dans la voie « du dialogue des cultures, une manière d’anthropologie politique qui respecte le choix des peuples, même si ceux-ci se trompent… »
Il est utile d’asseoir non pas des scénarios de conflits, mais ceux de l’acceptation « de ceux que les peuples choisissent pour les gouverner ». En Afrique, la contre production de l’application des schémas établis à l’extérieur, a montré ses limites, parce que ces derniers n’incluaient pas la perspective des droits des peuples, des cultures, ainsi que la compréhension que le développement d’un groupe social suppose :« un processus historique dans un contexte culturel ».
Il incombe à la France, d’être attentive et perspicace afin d’appliquer en Afrique « un modus operandi » nouveau, respectueux des valeurs qui constituent le socle historique et culturel des peuples africains, et en mesure de déployer tous les voies et moyens propices au développement de l’Afrique.
Le développement de l’Afrique avec le concours actif de la France, servira la France et contribuera durablement à « panser les plaies et blessures » d’une relation tumultueuse certes, mais à laquelle l’Afrique reste profondément attachée.
Le devoir de la France, au-delà du lien affectif profond distillé par les valeurs humanistes de la langue, de la culture et de l’histoire françaises, est d’inventer une nouvelle approche des accords de coopération franco-africaine donnant la priorité à l’idée qu’il est dans l’intérêt de la France et de l’Afrique d’entrer dans « le cercle vertueux » qui veut que « participer au développement de l’Afrique, à la lutte contre la pauvreté en Afrique, au progrès du Continent, à l’expérimentation de nouvelles sources d’énergie, et à l’émergence des énergies renouvelables comme à la préservation de l’environnement », sont un challenge que la France, a dans l’urgence, la capacité de tenir et l’Afrique, la volonté d’accomplir.
Le Conseil Représentatif des Associations Noires de France dont je suis le Vice-Président, chargé des relations avec l’Afrique et les Affaires Internationales, reste persuadé qu’il est du devoir de la France de s’approprier en guise de programme pour les siècles futurs de sa devise : LIBERTE – EGALITE – FRATERNITE dont Alphonse de LAMARTINE disait déjà, après la Monarchie de Juillet et le Directoire, que cette triade est « l’évangile de la raison humaine ». Elle le demeure…
Le troisième volet de notre triptyque afférent à ce qu’il nous semble utile de dire, relativement au devoir de la France, fera l’objet d’une parution exclusive dont les grandes lignes souligneront « la nécessité que : la France des peuples ait la claire conscience de l’importance de la France pour l’Afrique et l’importance de l’Afrique pour la France ». La vérité libère.
La France, « encagoulée » dans la tradition vieille de plus de cinquante sept ans de préjugés et d’idées reçues, doit cesser de présenter l’Afrique à ses populations comme « une éternelle assistée » n’ayant aucun intérêt pour Elle.
En libérant « le peuple français » de préjugés et contrevérités enracinés dans l’historicité idéologique coloniale et post indépendante, en favorisant l’adhésion des français au « renouvellement du regard porté sur l’Afrique », la France et ses futurs gouvernements, fussent-ils de « droite » ou de « gauche », seront eux-mêmes libérés et par conséquent aptes à participer au développement de l’Afrique, comme s’il s’agissait d’y inscrire la marque dans les consciences, de leur modèle de qualité de savoir-faire et de savoir-être.
En clair, il faut que soit révolue l’ère des projets dispendieux, faramineux et sans lendemain, pour ceux péreins, qui impactent la croissance de l’Afrique et renforcent le respect et la considération que les Africains ont pour la France ».
Guy Samuel NYOUMSI
Vice-Président du Conseil Représentatif des Associations Noires de France (CRAN),
Chargé des Affaires Africaines et des Affaires Internationales