Trois semaines après l’élection présidentielle du 21 juin 2014, les populations du Brakna sont revenues, tranquillement, à leurs vieilles habitudes. Celles de la débrouillardise, du colmatage et du tir du diable par la queue. Naturellement que la situation n’est pas invariablement pareille. Mais elle est quasiment la même. Partout. Le Brakna est une des régions les plus pauvres du pays. L’agriculture et l’élevage, les deux principales activités, ne marchent plus comme avant. Les activités, informelles, de petits commerces et métiers servent, juste, à subvenir à quelques besoins essentiels des dizaines de milliers de familles qui vivent, aléatoirement, de la Baraka et de la résignation. Rien à faire, la vie marche au ralenti. L’argent ne coule pas à flot. Les populations font contre mauvaise fortune bon cœur. Elles n’ont simplement pas le choix de faire autre chose. Et la fête s’approche de plus en plus. Elle n’est plus qu’à quelques jours. Et ces hommes politiques qui les ont beaucoup mises à contribution, pour faire réélire le président Mohamed Ould Abdel Aziz, où sont-ils passés ? Dès le 23 juin 2014, ils n’ont plus fait signe de vie. Leurs téléphones ne répondent plus. Fini le temps où ces hommes appelaient, au moins cinq à six fois par jour, leurs « amis » et leurs « frères ». Des appels incessants et réguliers qui frisaient l’hystérie et le harcèlement. Des « amis » et des « frères » à qui ils promettaient tout : argent, travail, promotion. Mais, sitôt la victoire du candidat président Mohamed Ould Abdel Aziz, pfuit ! Disparus. Aujourd’hui, les maisons de tous ces responsables sont hermétiquement closes. Il n’y a plus qu’un gardien qui ne sait pas exactement où se trouve son patron. « Il paraît qu’il est à Nouakchott », répond-il, inlassablement, à ceux, nombreux qui viennent aux nouvelles des promesses. Les politiques circonstanciels sont repartis se calfeutrer dans leur petit monde. Loin des yeux de ces populations dont ils se sont servis, l’espace d’une campagne électorale. Juste, pour eux, le temps de les manipuler, leur faire croire qu’ils sont quelque chose. Qu’ils ont leur monde. Leur monde à eux, pour avoir quelque chose. Voilà quinze jours que le béni mois du Ramadan a commencé. Les politiques ne se sont nullement manifestés. « Leur monde », comme ils aimaient à dire, leurs « amis » et« frères » souffrent, seuls, le martyr du dénuement, de la privation, de l’amertume. Normal. Les élections sont finies. Alors, bye bye, à la prochaine ! Peut-être que le Parlement sera dissous. Alors, on les reverra, nos politiques. Les directeurs généraux, les ministres, les ambassadeurs, les secrétaires généraux, les gradés militaires. Bonne arrivée. Les villas rouvrent leurs portes. Les populations sont, à nouveau, embrassées. Sur les deux joues. Sur les fesses ? Bon, allez, sur les fesses, pour vous faire plaisir et parce que c’est vous, ô mon monde, ô mes amis, ô mes frères… Et la comédie reprend… de plus belle. Au tout début, la politique était perçue comme une pratique malhonnête, « Beletig », c’était, tout simplement, l’art de la malversation, du faux et usage de faux. Ce n’était pas encore l’art du possible. Aujourd’hui, avec les comportements de ces nouveaux hommes politiques, c’est la « Beletig »ressuscitée, c’est la facétie, c’est le mensonge, c’est le spectacle. La société moderne, quoi…
« Ambiguïté délibérée » : voilà comment Ehoud Barak, alors ministre de la Défense de l’entité sioniste, désignait, en 2010, la stratégie nucléaire de son gouvernement ; « une bonne politique, en entente totale avec les États-Unis », tenait-il, sibyllin, à préciser.