L’organisation des FLAM, ce mot qui rappelle le feu, et qui a une connotation militaire, puisqu’il veut dire : Forces de Libération Africaines de Mauritanie, est pourtant composée d’un groupe restreint d’intellectuels civils, négro-mauritaniens pacifistes, qui n’ont que leurs plumes et leur courage pour dénoncer l’arbitraire ainsi que les injustices et les discriminations subies par leur communauté.
Cette organisation, qui avait engendré une véritable chasse aux sorcières de la part des services de renseignement de l’Etat qui l’avaient infiltrée, avait été exagérée par le Comité militaire dans le but de culpabiliser, au besoin, l’élite négro-mauritanienne. Qui voulait inquiéter un négro-mauritanien, occuper son poste, son domicile ou bénéficier de son patrimoine, l’accusait d’appartenir à cette organisation.
En 1986, ce groupe avait publié un manifeste, inspiré sans doute par le vingtième anniversaire de la célèbre lettre des 19, qui dénonçait déjà, en 1966, les discriminations flagrantes dont étaient victimes les cadres négro-mauritaniens. Ce manifeste, qui dénonçait lui aussi, l’ampleur des discriminations du pouvoir « beïdane » avec des statistiques précises, et qui contenait des revendications tout à fait légitimes, avait été distribué au cours du sommet des chefs d’Etat africains en juillet 1986. Les services secrets du comité militaire s'étaient saisis de ce document afin d'y apporter des modifications diabolisant les FLAM, considérées désormais comme de vulgaires racistes, sécessionnistes à la solde du sionisme international et d’un pays voisin. Ce document rectifié constitue l’acte de la naissance officielle de la POULAROPHOBIE.
Diabolisation
Sur les trente-trois condamnés à 4 et 5 ans de prison ferme, pour distribution de tracts (le manifeste du négro-africain opprimé), seuls 7 parmi eux étaient membres des FLAM. Il s’agit des inspecteurs de l'enseignement fondamental, Ly Djibril Hamet et THIAM Samba, de DIALLO Abdoulkerim infirmier d’Etat, de SARR Ibrahima, écrivain journaliste, d'Ibrahima Abou SALL professeur d’histoire, de l’ancien ministre martyr DJIGO Tafsirou et du grand professeur chercheur, socio-anthropologue et islamologue, Saidou KANE décédé en 2006 dans un accident de circulation.
Tous les autres n’avaient aucun lien avéré avec les FLAM. Certains entendaient pour la première fois le nom de cette organisation devant le juge, à la lecture du chef d’accusation. Ils ont été victimes du zèle de la police politique ainsi que du mépris et de l’incompétence du pouvoir d’exception dominé par le courant nationaliste arabe, idéaliste et raciste.
Parmi ces innocents, il y avait l’écrivain poète martyr, Tene Youssouf GUEYE condamné en septembre 1986, à 5 ans de prison ferme pour avoir transporté par avion, un pli fermé, de Dakar à Nouakchott, remis par un membre des FLAM, qui contenait, à son insu, semble-t-il, "ce maudit" manifeste. Il mourut, dans l’indifférence totale, loin des siens, le vendredi 2 septembre 1988 à Néma, d’une cirrhose aggravée par deux longues années de mauvais traitements et de malnutrition, dans le mouroir de Walata. Parmi ces innocents, on peut aussi citer le professeur Abdoulaye SARR et tant d’autres éminentes personnalités.
Ni les officiers et sous-officiers négros-mauritaniens coupables de la tentative de putsch d’octobre 1987, ni les paisibles citoyens déportés en 1989 et spoliés de leurs terres et de leurs biens, ni les martyrs du génocide de 1990-91, n’ont un lien quelconque avec les FLAM.
Ce manifeste falsifié du négro-mauritanien opprimé est ainsi devenu le porte malheur pour toute une communauté. C’est lui qui a déclenché la chasse aux toucouleurs, la haine raciste, aidé en cela par la tentative d’octobre 1987, qui a été la goutte qui a fait déborder le vase, bien que n’ayant aucun lien de cause à effet avec les FLAM. C’est ce manifeste retouché par les renseignements généraux, et renforcé par la tentative du coup d'état, qui est à l’origine de la déportation de dizaines de milliers de paisibles citoyens mauritaniens, de l’occupation de la vallée avec son macabre décor et du honteux et abominable génocide. Et ça continue.... Puisse Allah le Tout Puissant arrêter cette malédiction.
L’union pour le meilleur et pour le pire, entre les FLAM, auteurs du manifeste de 1986 (33 cadres civils) et les putschistes de 1987 (35 militaires), a été inventée par le CMSN. Et c’est pendant le procès de JREIDA en novembre décembre 1987 que le contrat de mariage forcé a été scellé par ce pouvoir, entre l’aile militaire et l’aile civile des FLAM. Le « voyage de noces », long de 1212 km, s’est déroulé dans un camion remorque bâché. De Nouakchott jusqu'à Oualata, les conjoints étaient enchainés les uns aux autres, comme pour les obliger à se réconcilier, sous la « musique » des bâches fortement secouées par les vents frais de décembre, mêlée aux soupirs et aux gémissements des passagers.
Le couple, volontairement affamé, avait vécu plusieurs mois de « scènes de ménages », dans des conditions horribles, de décembre 87 à avril 89, parce que la « dot » n’avait pas encore été versée. C’est ainsi que le pouvoir d’exception qui tenait absolument à cette union va décider de payer une « dot » très alléchante. Et ce fut la déportation de paisibles citoyens en 1989 et l’occupation de la vallée. Le mariage ainsi « légalisé », il fallait préparer au couple « la lune de miel ». Et ce fut le génocide de 1990-91. Le POULARRICIDE.
Mariage forcé
Unies par la foi, par l’histoire, par la géographie, par le sang, par la langue et désormais par un destin commun, ainsi que par les malheurs et les souffrances de leur communauté, l’aile militaire et l’aile civile des FLAM ont enfin consommé, dans la plus grande douleur, ce mariage obligé, tant voulu par ce pouvoir d’exception.
Les FLAM, ainsi tonifiées par l’aile militaire, et nourries par les politiques d’exclusion et de discrimination du CMSN, qui leur a donné des arguments on ne peut plus solides, pour dénoncer la politique raciste du pouvoir « beïdane », sont devenues, au fil du temps, l’incarnation de la cause des négro-mauritaniens.
Aujourd’hui on leur refuse une tribune nationale à travers leur nouveau parti sous prétexte de velléité séparatiste ; au moment où le pouvoir s’entoure de conseillers privilégiés baathistes, partisans d’une Mauritanie arabe amputée de sa composante négro-africaine, qui avaient préconisé selon la déclaration télévisée de l’un de leurs leaders, aux auteurs du coup d’état du 10 juillet 1978 en cas d’échec de leur putsch , de provoquer la guerre civile et de se replier vers le nord. Entendre par là vers l’Algérie et le Polisario !
Au moment où toutes les télévisions publiques et privées produisent des émissions presque quotidiennes, animées par notre élite intellectuelle honorant le sécessionniste Ahmed Baba Miské qui fêtait avec notre ennemi, la mort de nos soldats sur le champ de bataille et notamment la mort du doyen de nos martyrs, le commandant de la Garde nationale Soueidatt ould WEDDAD, déclaration diffusée en janvier 1976 sur les ondes de la radio séparatiste.
Cet irréductible sécessionniste qui avait porté les armes contre son propre pays, sans être inquiété, avait écrit dans son livre, "Front Polisario, l’âme d’un peuple", que les frontières du Sahara occidental englobaient toutes nos régions du nord à savoir : l’Adrar, Dakhlet Nouadhibou, le Tris Zemmour et l’Inchiri.
Il y a deux ou trois ans, il a inventé une nouvelle approche séparatiste qu’il avait développée dans une conférence de presse au palais des congrès et qui consistait à alimenter une caisse pour le développement exclusif du Nord, à partir des taxes payées par les sociétés qui exploitent les gisements dans ces régions, sous prétexte que les nordistes sont les citoyens mauritaniens les plus pauvres malgré la richesse de leur sous-sol. On sent déjà les prémisses d’un nouveau projet sécessionniste de la république du Nord. Au lieu de passer devant une cour martiale, cet individu continue de bénéficier de tous les égards dans les milieux du pouvoir et de la classe politique Beidane sans mémoire.
Quant aux FLAM, il s’agit d’authentiques citoyens mauritaniens qui ne sont ni racistes ni sécessionnistes, détenteurs d’un projet de société raisonnable pour la Mauritanie qu’ils veulent soumettre au peuple. C’est leur droit le plus élémentaire. Leur exclusion du débat national constitue une erreur monumentale, leur parti doit être reconnu officiellement. Seul le peuple, souverain, peut refuser leur projet.
Malheureusement, le grand problème de notre pays c’est qu’on n'est pas dans une vraie démocratie, comme le disait Georges Clémenceau, chef du gouvernement français pendant la première guerre mondiale: « Il suffit d’ajouter ‘’militaire’’ à un mot pour lui faire perdre sa signification. Ainsi, la justice militaire n’est pas la justice, la musique militaire n’est pas la musique, …». La démocratie militaire n’est pas la démocratie.