M. Samba Thiam, président des FPC (ex-FLAM) : ‘’La décision du rejet de notre parti est arbitraire et illégale à tous égards ...’’

19 August, 2015 - 02:13

Le Calame : Votre parti vient de clôturer sa première université d’été à Nouakchott. Quelle évaluation vous  faites au terme de ces trois jours de débats ?

 

Samba Thiam : Je crois que ces journées de formation ont été, à bien des égards, positives ; bénéfiques pour les militants et les sympathisants qui  ont afflué   massivement, montrant ainsi un engouement certain. Je crois que nous avons répondu, pour une bonne part, à leurs attentes. Au delà des volets formation et information,  je crois également que ces journées ont permis de tisser de nouvelles relations, de  ressouder les rangs et les liens de solidarité, et  surtout de créer un esprit de famille…

C’est ici l’occasion pour moi de remercier chaleureusement l’ensemble des  participants, les organisateurs, en particulier les animateurs sans lesquels ces journées n’auraient pu se tenir.  

 

-A  propos de l’histoire de la Mauritanie,  Mamadou Samba Diop alias Murtudo  disait, en  1984/85 à un étudiant  de la faculté d’Histoire,  qu’on  n’enseigne pas l’histoire de la Mauritanie mais des histoires. Partagez-vous son avis  vous qui venez de traiter l’histoire de la Mauritanie au cours de cette université d’été ?

 

-Le thème sur «  l’histoire de la Mauritanie » proprement dit ne me revenait pas ; il avait été traité par monsieur Sidibe ; traité et bien traité ! Cela dit, le jeu de mots de feu Murtodo  ne me semble pas dénué de sens, au regard de notre réalité.

Dire l’histoire et dire des histoires ça n’est effectivement pas la même chose. Cette boutade me fait penser à une  remarque de  Nietzsche portant sur certains individus ou groupes chez lesquels, dit-il, on note « une tentative de se donner a posteriori un passé dont on voudrait être issu, par opposition à celui dont on est vraiment issu ». Feu Mohamed Ould Cheikh ne disait pas autre chose, seulement il l’exprimait en des termes plus caustiques. 

Murtodo ne me semble donc pas avoir tout à fait tort, dans son affirmation

 

Parmi les autres thèmes,  figure la  réforme foncière. Que reprochez-vous aux concepteurs de ce texte? Quelles sont, à votre avis, ses insuffisances? 

 

-Cette réforme foncière  dans son essence constitue, à mon sens,  un texte mal pensé, sous-tendu par des desseins obscurs, au delà de bonnes intentions déclarées ou supposées. Cette reforme, telle qu’elle s’applique, est porteuse de tous les  dangers ; ses aspects négatifs dépassent de loin ses aspects positifs supposés. La solution juste sur la question foncière réside dans notre proposition de réforme, découpant la bande fluviale en trois zones d’exploitation (waalo, moyen dierri, et haut dierri) affectées respectivement aux résidents locaux, au hommes d’affaires nationaux et régionaux et au grand capital international, qui doterait les résidents de moyens d’exploiter normalement leurs terres    

 

-Quels sont les chantiers en vue  du parti dans les jours et semaines ou mois à venir ?

 

-Pousser vers l’accomplissement du droit, violé allègrement  par le pouvoir du Président Abdel Aziz. Nous battre pour le recouvrement de nos droits, constitutionnels, bafoués.

 

-Vous voulez parler de la décision de rejet de votre parti ?

 

-Oui. Décision arbitraire, illégale à tous égards ...

En effet, il faut le souligner,  le ministère de l’intérieur continue d’imposer, arbitrairement,  une pratique – délivrance de récépissé - contraire à l’esprit de cette loi 91-024  au régime déclaratif, qui régit les partis politiques.

Par ailleurs, nous devons encore le rappeler, avec cette décision, tombée huit mois plus tard, le délai légal imparti à l’Administration – deux mois net- a été largement dépassé.

Enfin, nous ne nous reconnaissons pas dans la raison invoquée, telle que formulée, qui manque totalement de clarté: « Le parti ne répond pas aux dispositions de l’article 11 de la constitution et 06 de la loi 91-024 », régissant les partis politiques, disent-ils. Nous nous érigeons en faux contre cet argument fallacieux, parce que notre parti n’a jamais, à aucun moment, remis en cause ni la République, ni l’intégrité du territoire ou l’unité de la ‘’nation’. les FPC ne sont pas, non plus, fondées sur une base  « raciale, tribale, régionale, confrérique, ou de sexe ». Notre parti est transversal ; nous avons toujours plaidé  pour l’unité nationale, pour une unité véritable, recadrée mieux pensée qui préserverait la paix et la stabilité du pays.

Pour clore ce chapitre, et balayer leur argumentation, demandons au ministre  pourquoi avoir attendu huit mois (8) treize jours pour répondre, s’il était intimement convaincu que  ’’ nous ne répondions pas aux dispositions des articles précités ?’’ Deux jours auraient largement suffi, au vu de notre déclaration de politique générale  assortie de la liste des membres fondateurs !

Pour tout dire, il y a la loi, il y a le  prince ; en effet un préfet nous confiait pendant nos démarches administratives : «  je sais ce que dit la loi mais j’ai reçu des instructions…» !  Il y a donc les lois de la République   d’un côté, et de l’autre les pratiques du prince. …Nous sommes dans quelle République ?

C’est par chauvinisme, rien que par chauvinisme que nous avons été déboutés, et par rien d’autre !

 Mais nous nous battrons jusqu’au bout pour que le droit prévale, même si nous évoluons dans une République bananière, même si cela devait durer des années. …

Ils viennent peut-être de gagner une bataille, mais pas la guerre …   

 

-Le dialogue  que le pouvoir et l’opposition tentaient de nouer  s’est comme  estompé. Cela vous surprend ?

 

- Non, certainement pas, comme du reste un bon nombre de mauritaniens ; au vu de certains  comportements, de certains petits jeux au chat et à la souris, au regard des intérêts et calculs opposés des deux camps. Estompé dites-vous ? Mort-né me semble mieux convenir ; mais qui sait ? La Mauritanie ne colle à aucune grille de lecture ou d’analyse, et vouloir prévoir dans ces cas….

  Propos recueillis par DL