L’importation, la commercialisation, l’utilisation des sacs et sachets en plastique sont officiellement prohibés, en Mauritanie, depuis le 1er Janvier 2013, par la loi N° 157-2012, Plus de deux ans après l’entrée en vigueur de ce règlement et malgré les moyens mis en œuvre par les pouvoirs publics, lesdits emballages ont encore de beaux jours devant eux. Même si l’usage a diminué, commerçants et consommateurs continuent à les utiliser. Parfois en cachette, parfois au vu et au su de tout le monde. Certains boutiquiers oublient de dire aux clients que la production et l’importation sont désormais interdites. Alors, où s’approvisionnent-ils ? Au département de l’Environnement, on croit à l’existence d’un réseau de contrebande.
Producteurs et importateurs ne disposaient que d’une année pour écouler leurs stocks, à partir de la date d’interdiction. De nombreux produits de substitution sont disponibles sur le marché. Il s’agit donc, maintenant, de durcir la législation, dresser contraventions, réprimer fermement les tricheurs. C’est en ce sens que le gouvernement a fait approuver, par le Parlement, une loi sanctionnant les importateurs et les utilisateurs du plastique. Cette loi complète les dispositions déjà en vigueur de la politique gouvernementale, élaborée, en 2014, pour préserver l’environnement. Les nouvelles règles marquent la volonté des pouvoirs publics de mettre en place des mesures coercitives et dissuasives pour mettre définitivement fin aux déchets plastiques sur le territoire national. Désormais donc, tous ceux qui seraient impliqués dans la fabrication, l’importation, la distribution, la commercialisation et l’utilisation des caisses et sachets plastiques seront durement réprimés. La production locale ne couvre que 10% des besoins du marché local, les 90 % restants proviennent de l’importation.
Mais, concrètement, qu’est-ce qui va changer ? L’approbation par le Parlement d’une loi ne suffira, certainement pas, à éradiquer l’importation et les réseaux frauduleux qui continuent à inonder le marché de ces produits dangereux pour notre environnement : le plus souvent, ce sont de gros bonnets qui en tirent les ficelles, tenant, sous leur coupe, les réseaux de trafiquants à nos frontières Sud et Est. Or tous les sachets d’emballage actuellement sur le marché proviennent du Sénégal et du Mali. Les descentes des éléments de la Direction de la pollution dans les marchés, pour saisir le produit et infliger des amendes aux contrevenants resteront peu fructueuses, tant qu’on n’aura pas tari leurs sources d’approvisionnement.
Faiblesse des moyens
La lutte contre l’usage des sachets en place est un combat de longue haleine qui exige plus qu’une affiche politique : des mesures draconiennes et des moyens conséquents. Au Rwanda, le combat contre les sachets en plastique est largement gagné ; en Mauritanie, nous sommes loin d’apercevoir le bout du tunnel. La différence tient en peu de mots : notre Ministère de l’Environnement et du Développement Durable (MEDD) ne semble pas disposer des moyens de sa politique. A en croire une sénatrice de Tawassoul, il ne dispose que de 0,6% du budget de l’Etat.
Il s’y ajoute que le comité interministériel, composé du MEDD, de l’Intérieur, des Finances, du Commerce et de la Santé, qui avait été mis en place pour coordonner la lutte, peine à travailler. Seuls le MEDD et les Finances, via le service des douanes, se démènent. Les descentes qu’effectuent les éléments des délégations régionales du MEDD ne disposent de peu de moyens pour traquer la fraude. Deux chiffres situent l’ampleur du besoin : on en est réduit, actuellement, à cinquante personnes, disposant de sept véhicules, pour couvrir les dix moughataas de Nouakchott...
Le commerce des substituts biodégradables s’impose et les nombreux promoteurs mauritaniens qui ont manifesté leur désir d’en implanter des fabriques doivent être mieux soutenus, pour abaisser les coûts. Les pharmacies, épiceries, boulangeries et autres unités de commerce ont fini par fidéliser leur circuit, dans nos marchés ; des revendeurs tendent, aux clients et autres badauds, des sachets de toutes couleurs et dimensions. Petit à petit, le substitut est entré dans nos mœurs mais il reste cher. C’est, probablement, la raison majeure de la subsistance des sachets, interdits, certes, mais toujours concédés gracieusement aux clients…
DL