Les scandales se suivent et se ressemblent. C’est un véritable scandale. C’est du scandale. Les scandales, ce n’est plus l’exception, c’est la règle. Vraiment scandaleux, tout ça. Mais c’est quoi, un scandale ? Voler « adroitement » n’est pas un scandale. Forniquer en privé dans un bureau public bien cadenassé n’en est pas non plus un. Tant que ce n’est pas visible. Pas de problème. C’est la maladresse qui fait les scandales. C’est quand on est profane qu’on fait des scandales. Il y en a qui en commettent tous les jours. Mais ce sont des professionnels. Des rodés. Des spécialistes ès-scandales à tout va. Les produits du Programme alimentaire mondial destinés aux cantines scolaires et à la sécurité alimentaire sont de très bonne qualité. Effectivement. Mais de là à les convoyer par camions étiquetés, c’est vraiment être un amateur. Des charrettes ou les vieilles 404 de l’Arrêt-bus ou de la Plage des pêcheurs auraient évité tous les soupçons. On a toujours mangé le CSA dans une bonne sauce depuis sa fondation. Il ya des villas en CSA. Des mariages en CSA. Des voitures en CSA. Des oumras et des hajs en CSA. Des actions en banque en CSA. Sans scandale. Seuls les cons se scandalisent. Heureusement d’ailleurs. Sinon, on en serait à ne s’adonner qu’à la gestion des scandales. Les épreuves de physique ? Seulement scandale. Comme en 2000. Vente publique des épreuves de sciences. Scandale. Puis rien. Succession de scandales. Pas un mois sans un scandale. Chaque institution a eu le sien. Scandale à balle rouge de la Présidence. Scandale du ministère de la Défense. Scandale du ministère des Finances. Scandale du ministère des Affaires islamiques. Scandale du ministère de la Justice. Scandale du ministère de l’Habitat. Scandale du ministère de la Jeunesse. Scandale du ministère de l’Intérieur. Scandale de l’état-major des forces armées et de sécurité. Scandale de l’état-major de la gendarmerie. Scandale de l’état-major de la garde. Scandale de la BCM. Scandale ici. Scandale là-bas. Scandale partout. Où aller ? Ailleurs, un scandale, c’est tous les dix à vingt ans. Et, généralement, le ou les responsables l’assument pleinement. Parfois même exagérément. Les scandaleux. Ceux qui ont mis les pieds et les mains dans les magasins. Ceux qui ont arnaqué, les faussaires publics, les incorrigibles, dorment, marchent, accueillent. Ce n’est pas qu’ils survivent. C’est qu’ils changent. Se transforment. Se réhabilitent. Combien sont-ils, les scandaleux qui nous gouvernent ? Ils devaient être à Aleg ou Bir Mogreïn. Pour de bon. Des ministres-scandales, ils existent. Tout comme les députés-scandales. Le scandale est civil. Le scandale est militaire. Sans âge. Sans tente. Sans case. Le scandale ne fait plus émouvoir. Plus baisser la tête. Plus rougir. Scandaleux de ne plus faire de scandale ! Mais « intelligemment ». Les bons scandales, quoi. Qui servent à quelque chose. Scandale justifié. Scandale certifié conforme à une certaine volonté. Retombées garanties dans des fonds de personnes-ressources vivement recommandées. Un scandale de deux à trois millions. C’est du maigre. Un vrai scandale : celui du fils d’une grande tente ou d’une grande case. C’est proportionnel à la naissance. Des centaines de millions au moins. Un ou deux milliards. Ce n’est pas que je sois un mouton que mène une esclave ou qu’elle soit un muscle et mal cuit. Un camion de produits alimentaires, c’est à peine deux ou trois millions. C’est un scandale. Mais quatre milliards d’ouguiyas, c’est quoi ? C’est de l’argent qui a servi à construire des bretelles, quelque part à Adel Bagrou. Deux cents millions de dollars ? Puis encore deux cents millions de dollars. C’est tout, sauf un scandale. C’est de l’argent utilisé sans scandale. Ne vous scandalisez pas pour rien. Un scandale, c’est un scandale. Un non-scandale est un non-scandale. Evidemment que c’est évident. Justement, c’est quand ce n’est pas évident que ça fait scandale. Comme la fuite des épreuves de physique au bac. Comme un camion CSA bourré de produits CSA, stationné devant une maison qui connaît le CSA. Scandale. Salut.
Il y a quelques semaines, un ancien fonctionnaire devenu conservateur de bibliothèque, Ahmed Mahmoud ould Mohamed, dit Gmal, publiait sur Facebook un post au titre évocateur : « La mémoire en décharge : quand les archives nationales finissent dans les ruelles de Nouakchott ».