La bizarrerie, en Mauritanie, a un nom. Et quiconque ne peut imaginer ce que c’est. Il est bizarre. Il est particulier. Singulier. Ça, c’est un ogre, pour une affaire qui a plusieurs têtes en Mauritanie et aucune queue. Et Allah sait qu’il en existe en Mauritanie ! Tout est « ghoula » chez nous. Socialement. Politiquement. Economiquement. C’est le règne des ogres. Ravageurs. Destructeurs. Impitoyables. Pas de logique. Même dans la gestion de la gabegie. C’est ogre de nommer, à des postes importants, quelqu’un qui verse encore des tranches pour restituer des choses indûment extorquées de la chose publique. C’est ogre d’embaucher et de débaucher à tout va. C’est ogre de raconter des histoires à faire dormir en marchant. Ce sont quelques gouttes d’un gasoil bénin suinté d’un bateau qui a coulé en Crimée qui se sont propagées vers juste quelques deux à trois centimètres de nos vaillantes côtes. Des côtes qui aiment assez la Direction nationale et sa politique de pêche pour ne pas penser, un seul instant, à faire des choses qui puissent exciter l’opposition. D’ailleurs, heureusement, comme disent les Arabes – c'est-à-dire, les Nou’zautres – fasse qu’un préjudice devienne utile. Notre poisson national en sort ragaillardi. Meilleur. Plus fort. Plus digeste. Extraordinaire sortie du directeur général de l’Institut mauritanien des recherches océanographiques. Des taches ? Qui a senti quelque chose au bord de nos côtes ? Même ses familiers n’ont rien senti. Donc, pas de pollution. CQFD. De deux choses l’une : syllogisme ou raisonnement par l’absurde. La philosophie ou les mathématiques. Vous n’avez que l’embarras du choix. Bizarre Mauritanie. Ces taches d’huile sur les côtes, c’est, d’après le ministre des pêches, des « tarakoumatt du passé ». Accumulations des régimes successifs, du premier gouvernement de 1959 à celui du 5 Août 2008, juste quelques trois à quatre minutes avant la Rectification, redevenue, plus tard, coup d’Etat. Ce n’est donc pas la première fois que cela arrive. La Mauritanie est bizarre. C'est-à-dire que nous ne sommes pas dans la même logique que tout le monde. C’est quoi ? Simple. Deux exemples. Il y en a, d’ailleurs, beaucoup d’autres, des sacs à remplir de nos incongruités. De nos incohérences. De nos atypismes. Enfin, bref, premier exemple : ce n’est pas pour rien que nos plus grosses prestations sportives sont l’œuvre de nos handicapés. En plus de cinquante ans de courses…folles. De sauts… en tous sens. De mélanges, tantôt de la jeunesse avec la culture, tantôt avec l’emploi, tantôt avec rien…Aucun trophée. Rien. Zéro. Nos bien portants n’ont vu que du feu. Rien ne sert de bien se porter, il faut savoir se comporter. Et, pour apprécier le second, circulez, un peu, du côté des carrefours : Bakar, Yéro Sarr dont la tête est encore une graine, au Sixième, ou celui du secteur cinq de Mellah. Prenez ces axes à des heures de pointe, vers dix heures du matin ou le soir, au crépuscule. Qui y régule la circulation ? Où est Mesgaharou (le fameux Groupement général de la sécurité routière) ? Où est Ould Meguett (la police) ? Qui est là pour dissuader les usagers à ne pas en venir aux mains ? C’est Bakar dans son carrefour. C’est deux jeunes malades mentaux désœuvrés qui organisent les soi-disant bien portants manquant de tout (civisme, moralité, bon sens) qui vaquent à leurs occupations. Qui rient. Qui plaisantent. En montrant du doigt ceux qui les humanisent. Ceux qui les assagissent. Ceux qui les moralisent. C’est tout simplement « ghoula ». Du vrai ogre. Des bizarreries. Y en a plein ici. Plus bizarre que moi, tu meurs. Du « Tu ne voleras point », on est arrivé, bizarrement, à « Tu voleras toujours… impunément ». C’est comme du poker tricheur. Bats les cartes et redistribue-les. Les as et les rois. Mais, surtout, les dames qui tournent et se retournent dans les mains, voire entre les jambes, d’une poignée de joueurs. A peine une cinquantaine, autour d’une vaste table/aquarium de plus d’un million de kilomètres carrés. Un poker à l’envers où les carrés de sept et de huit régentent les carrés d’as et de rois. Bizarre. Oui, très. Salut.
Il y a quelques semaines, un ancien fonctionnaire devenu conservateur de bibliothèque, Ahmed Mahmoud ould Mohamed, dit Gmal, publiait sur Facebook un post au titre évocateur : « La mémoire en décharge : quand les archives nationales finissent dans les ruelles de Nouakchott ».