Comme attendu, le président de la République a tenu, ce mardi 5 mai, une conférence de presse dans les jardins du palais présidentiel. Aussitôt annoncée, cette conférence de presse a fait croire à l’ensemble du microcosme politique, des observateurs indépendants que le Rais va rectifier le tir. Sa première prestation a fait l’unanimité contre elle. Le président avait raté une occasion ; il il fallait se reprendre. Mais, à l’arrivée, on peut affirmer, sans se tromper que le président n’ pas beaucoup évolué. Ni dans le discours, ni dans les thèmes abordés. Mieux ou pire, c’est selon, il s’est substitué à un modérateur, distribuant la parole à ceux qui étaient visiblement là, dans la majorité, hélas pour acquiescer. Certains ont tellement voulu plaire qu’ils n’ont pas arrêté, tout au long de la soirée de chercher la complicité du président, soit à travers un regard, soit à travers un acquiescement de la tête. C’est dire que nos confrères n’ont pas voulu ou osé secouer le président, relativement détendu quand même, contrairement à sa première prestation. On se croirait presque dans une Mahadra où le marabout, entouré de ses apprenants, distribuait des ordres, sommait certains de se taire, ou administrait quelques coups de lanières. Heureusement que le président Aziz n’est pas arrivé à ce stade, seulement, il faut le regretter, ses rapports avec les journalistes n’étaient pas verticaux. Le choix des journalistes dont certains sont «complices» demeure encore un véritable frein à l’expression libre et épanouie du président. Il s’y ajoute un décor peu attractif, la présence de ministres, sollicités, par le président pour approuver ou confirmer les affirmations du chef. Le président aurait pu se passer de fardeau de « momies ».
Sur le fond, le discours ou disons le contenu du discours n’a pas, non plus évolué, sauf que le président semblait moins hésitant que la dernière fois. Cependant, il n’a rien apporté de nouveau, ni sur le dialogue qu’il semble avoir enterré à cause des « préalables » du FNDU dont la dissolution du fameux BASEP, ni sur la question de l’esclavage, allant même jusqu’à qualifier les défenseurs de cette cause de marchands d’illusions, d’opportunistes, ni sur l’unité nationale qu’on brandit comme un épouvantail alors que concrètement, rien n’est fait pour prévenir le danger d’un communautarisme latent. Sur l’école, la santé, les infrastructures, le président se décharge sur les pouvoirs qui l’ont précédé : le projet éducation et santé et populations qui ont englouti des milliards, pour rien, ont été épinglés.
Le président de la République qui a clamé qu’il est disposé au dialogue avec l’opposition n’a pas contribué à la rassurer, mettant à profit sa rencontre avec la presse pour l’accuser d’être derrière toutes les poussées de fièvre qui peuvent survenir, ici et là : SNIM, accueil à Zouerate, bidons jaunes, difficultés des éleveurs…Tout vient de l’opposition ou de certains déjà connus.
Disons enfin que les mauritaniens sont restés, hélas, une fois encore sur leur faim. Les journalistes auraient pu poser des questions que chaque père de famille, chaque diplômé chômeur, chaque entrepreneur…se pose : pourquoi les prix des produits de première nécessité, les prestations médicales ne cessent de grimper ? Comment est mise en œuvre la décision de faire de l’année 2015, année de l’éducation, 5 mois après ? Pourquoi, après la clôture du passif humanitaire, les organisations de défense des victimes et des veuves continuent à se plaindre ? Pourquoi les textes incriminant l’esclavage ne sont pas appliqués ? Pourquoi, dans le souci de renforcer l’unité nationale, le gouvernement ne crée pas un service militaire obligatoire pour tous les jeunes mauritaniens ? Les Mauritaniens auraient voulu savoir la position du président « suspecté » de mijoter un troisième mandat que l’actuelle constitution lui interdit.
Le président a raison quand il dit que l’avenir de la Mauritanie est une affaire de tous, quand il dit qu’il y a des efforts qui ont été faits depuis son arrivée au pouvoir, mais sa gouvernance gagnerait plus s’il acceptait de s’ouvrir et d’écouter davantage, pas seulement ses proches et son équipe, mais aussi d’autres personnes ressources parmi lesquelles figurent ses adversaires ou concurrents politiques que compte ce pays. Le faisant, la Mauritanie sortirait grandie.
Faites un petit tour à Nouakchott : allez de la plage des pêcheurs au Port de l’Amitié ou de cette infrastructure vers le carrefour dit Bamako ; partez d’Atak El Kheir 2 en direction de l’Est ; promenez-vous en divers quartiers de la capitale… Rassurez-vous, il ne s’agit pas de villégiature !