La Mauritanie va doucement. Marche lentement, celui qui a cœur de courir. C’est un peu ça que ne comprennent pas les Mauritaniens. La précipitation est de Satan et l’attente d’Allah. Ce n’est pas pour rien que l’Etat a attendu soixante-deux jours pour régler le problème de la SNIM. « C’est une affaire entre les travailleurs et leur direction générale », disait le Président. Qui ne voulait, pour rien au monde, interférer dans un établissement qui a ses gérants. Le problème était entre la DG de la SNIM et ses travailleurs. La solution fut entre les travailleurs et le maire de Zouérate. Personne d’autres. Nous sommes dans un pays de droit. De séparation des pouvoirs. Ne sautez pas sur nous. Nous ne sautons pas sur vous. Laisse-moi des petits moments où il arrive que l’un ou l’autre des pouvoirs aille rendre une visite de courtoisie à l’autre. L’hospitalité mauritanienne exige, alors, que l’hôte honore son visiteur. Si un ministre du gouvernement téléphone à son collègue de la justice qui téléphone à un proche collaborateur qui saisit un ami magistrat qui accepte de voir dans une affaire qui met en jeu une parente ou un parent ou un ami d’un notable ou d’un quelqu’un de ceux-là ou de ceux-ci. C’est pas important au point d’en faire une affaire et un point de presse où l’opposition cumule les imprécisions, comme celles de la presse sur des questions pas si fondamentales que ça. Cette histoire de séparation des pouvoirs. Il ne faut pas trop la prendre dans toute sa dimension. C’est juste un concept. Après tout, la Mauritanie est une et indivisible. Les connexions entre les autorités, c’est obligatoire. La Mauritanie n’a qu’une tête. Ce n’est pas une hydre. Une tête qui réfléchit pour tout le monde. Pour tous les Mauritaniens. De la majorité comme de l’opposition générale. Les députés, les sénateurs, les ministres, les hauts fonctionnaires sont soit de l’opposition, soit de la majorité. Et puis, celui qui trouve un « grilleur » ne se brûle pas les mains. La construction nationale passe par un mouvement d’ensemble dans la même direction. Pour une fois, au moins. Comment ça peut marcher, quand chacun tire de son côté ? Le Président va à l’Est. L’opposition va au Nord. Le Président va au Nord. L’opposition va au Sud. Le Président dit que le ciel est en haut. L’opposition dit qu’il est en bas. L’opposition dit que les prix grimpent. La majorité dit que les prix sont sous terre. L’opposition marche. Le pouvoir dort. Surenchère. Contrepied. La tête du Président chauffe. Puis refroidit. Les radiateurs en cuivre marchent bien, en cette période de canicule. Tout est discutable. Pas de ligne rouge. Elections anticipées. Biens bien acquis ou mal acquis. Départ anticipé du Président. Où est le problème ? Il faut faire trois à quatre dialogues avant de commencer à songer aux préliminaires du Grand Dialogue de sourds qui se prépare. Un : un dialogue entre la majorité. Deux : un dialogue entre le FNDU et lui-même. Trois : un dialogue entre la CAP et elle-même. Quatre : un dialogue entre le FNDU et la CAP. Ensuite, instituer un ministère pour le dialogue permanent et continu, ayant mission de préparer les dialogues nationaux sur la période 2015-2025 et de réfléchir aux modalités et conditions de profilage des délégations qui devraient pouvoir représenter les « dialogueurs ». Tous les chauves sont exclus. Pas de très longs ni de très courts. Juste des tailles moyennes. Pas de gros ventres. Ni des prédateurs de renom. Exit les parfois ici, parfois là-bas : tout politique ayant appartenu à trois formations politiques différentes est disqualifié. Out, ceux qui volent avec les voleurs et pistent avec les pisteurs. Les imberbes, les cheveux poivre et sel, les de plus ou de moins de quatre-vingt-dix ans sont rejetés. Aucune exception. Même taille. Mêmes costumes. Mêmes boubous. Turbans noirs exigés. Quand tout ça est prêt, le dialogue peut commencer. Sans précipitation. Peut-être même qu’on peut attendre de finir l’élection présidentielle de 2019. Comme ça, le pouvoir sera complètement libre de toutes ses occupations, pour enfin bien comprendre tous les préalables de l’opposition. Tous deux auraient ainsi eu le temps de bien composer leur délégation. Salut.
Il y a quelques semaines, un ancien fonctionnaire devenu conservateur de bibliothèque, Ahmed Mahmoud ould Mohamed, dit Gmal, publiait sur Facebook un post au titre évocateur : « La mémoire en décharge : quand les archives nationales finissent dans les ruelles de Nouakchott ».