Jamais une conférence de presse n’a autant marqué les esprits que celle à laquelle s’est prêté, jeudi dernier, Ould Abdel Aziz. Non pas pour ce qui y a été annoncé, loin s’en faut. Mais pour un incident qui a failli la faire capoter, avant même qu’elle ne démarre. L’animateur de la conférence annonce que chaque journaliste posera une seule question. L’un d’eux, Ahmedou ould Wediaa, du site Essirage, lui rappelle alors qu’ils avaient convenu que chacun en poserait trois. Le Président intervient, s’énerve, tape sur la table, menace de renvoyer tout le monde et ordonne qu’on coupe le signal. Ce n’est que dix minutes après que la rencontre débutera mais le mal est fait. Ould Abdel Aziz donnera l’impression, dès les premières réponses, qu’il a perdu contenance. Pourquoi donc avoir programmé un tel rendez-vous en un tel moment ? Son conseiller en communication doit être, soit d’une nullité absolue, soit complètement largué, dans un domaine qui devrait, pourtant, le concerner au premier chef. Revenant d’un périple de dix jours, particulièrement harassant, aux Hodhs, le Président s’apprêtait à reprendre l’avion le lendemain, pour l’Egypte. Il n’y avait donc absolument pas urgence. A moins que… Notre guide éclairé allait-il nous annoncer qu’il acceptait les préalables de l’opposition pour le dialogue ? Qu’il avait ordonné de régler le problème de la SNIM ? Qu’il ne toucherait jamais à la Constitution ? Qu’il comptait apporter des réformes, substantielles, aux secteurs de l’éducation ou de la santé ?
Ben non. Rien de tout cela. Très loin de ses dernières sorties où il était apparu beaucoup plus décontracté, sans cependant véritablement convaincre, le Président est, cette fois, passé complètement à côté de la plaque. On n’improvise pas une conférence de presse, si l’on n’est pas doué d’un sens élevé de la communication et si l’on ne maîtrise pas parfaitement ses dossiers. Tout le contraire de notre rectificateur en chef qui s’est empêtré dans les chiffres, a balbutié ses réponses et est apparu très peu sûr de lui, se tournant, parfois, vers ses ministres pour se faire confirmer tel ou tel chiffre mais ne recevant, pour toute réponse, qu’un regard hagard. Depuis l’accroc qui avait marqué les prémisses de la conférence de presse, les ministres, transis d’effroi, étaient comme pétrifiés. Et ne lui furent d’aucun secours.
Que retenir, donc, de cette piètre sortie ? L’allusion aux préalables de l’opposition – ‘’ On ne peut avoir les résultats du dialogue avant d’avoir dialogué » – sonne comme une mise à mort du dialogue, avant même qu’il ne commence. Les grévistes de la SNIM ? Ils ont tort, la situation de l’entreprise ne lui permet pas de satisfaire leurs revendications. La modification de la Constitution ? Des ragots, sans plus. Le taux de chômage ? Le budget de l’état-civil ? L’aide à la presse ? Les prix des hydrocarbures ? L’assainissement de Nouakchott ? L’argent de la CDD ? Tout est y passé… sans aucune réponse réellement convaincante. Les déclarations de Cheikh ould Baya sur sa fortune ? Des bla-bla de campagne. L’électorale, bien sûr. Vous savez, celle, permanente, qu’on subit depuis 2008… C’est peut-être là le problème : à bouffer tous les jours le même plat, il en devient vite fadasse… Alors, si l’on oublie, en plus, d’y mettre le sel…
Ahmed Ould Cheikh