
L’intérêt porté par les pouvoirs publics à la mise en valeur de la vallée Naturelle de Tamourt-Naaj remonte à plus de cinq décennies. De nombreuses études ont été réalisées sans jamais aboutir à une mise en œuvre concrète, faute de concertation, de coordination et de suivi.
La signature, le 02 Décembre 2025, par la Mauritanie et la France de l’accord de financement du Projet par l’Agence Française de Développement (AFD) sur la base de la récente étude réalisée par les bureaux IRAM (France) et SHER (Belgique), ravive aujourd’hui de grands espoirs au sein des populations locales.
En tant que ressortissant de la zone, au regard des conclusions de cette étude qui confirme l’existence d’importantes potentialités agricoles, pastorales et touristiques de la Tamourt-Naaj, il m’apparait utile de formuler les observations et recommandations suivantes, afin d’éviter les échecs constatés lors des initiatives précédentes.
C’est à ce titre que je trouve utile de prendre en compte les facteurs suivants :
1. Les Ressources Hydriques (les affluents) : Un Enjeu Prioritaire
Les voies d’alimentation de Tamourt-Naaj sont constituées par les affluents qui lui drainent la quasi-totalité des eaux pluviales provenant du plateau du Taguant.
Leur préservation est déterminante pour la pérennité du Bassin de Tamourt-Naaj.
Affluents du Sud :
* N’Takech, Akneiker, Echram, Boulboul
Ces affluents acheminent les eaux de la partie Sud du plateau et se jettent dans la vallée de Tamourt-Naaj.
Affluents de l’Ouest et du Nord :
* A l’Ouest : N’Tilimit, Nouadar, Nouedjhena
* Au Nord : Ntitam, Vow, Lemraivegue, Biliniar, El Wad Lebyadh dont certains ravins sont ensablés, comme fut le cas du cours d’eau de Bourague qui alimentait, jusqu’en 1942, le Bassin de Tamourt-Naaj au niveau de Lekhreize.
La continuité du rôle central de ces affluents, en tant que voies naturelles de ravitaillement de la vallée de Tamourt-Naaj par les eaux pluviales, réside dans la fixation des populations locales dans leurs terroirs, près de leurs champs, palmeraies et pâturages.
Leur présence constitue un facteur efficace de lutte contre l’avancée désertique qui menace ces voies naturelles.
En conséquence, pour assurer la pérennité de ces affluents, il est indispensable de les doter des infrastructures vitales suivantes :
* Sondages et points d’eau pastoraux ;
* Écoles et centres de santé ;
* Pistes de désenclavement ;
* Clôtures et équipements solaires pour encourager le maraîchage sous palmeraies ;
* Diguettes pour les petites zones cultivables ;
* Barrages souterrains sur les versants à fort débit (notamment N’Takech et Boulboul).
2. Les Ressources Humaines : Un pilier de réussite
2.1 En tant qu’acteurs et bénéficiaires du projet
Les populations locales constituent le cœur du projet. Elles interviennent à la fois comme producteurs (cultivateurs et éleveurs) et comme futurs employés.
Ils connaissent intimement le milieu dans lequel ils peuvent jouer un rôle indispensable dans la régénération du milieu.
Ils y sont installés depuis plusieurs générations, ce qui leur permet de connaitre expérimentalement :
* La nature des sols et leurs aptitudes culturales ;
* Les anciennes zones inondables dégradées par l’érosion ;
* Les dynamiques de pâturages et de palmeraies.
La viabilisation des espaces cultivables permettra aux habitants de reprendre leurs activités permettant ainsi :
* Leur maintien dans leurs terroirs
* La régénération du milieu naturel
* La préservation du rôle des affluents dans l’acheminement des eaux vers Tamourt-Naaj
2-2. En tant que cadres originaires de la zone : facteur stratégique de réussite
L’implication des cadres natifs de la zone constitue un atout stratégique de réussite du projet à triple raisons :
* Acceptabilité sociale du projet
La présence de cadres locaux dans les structures de mise en œuvre du projet réduit la méfiance ou la perception du projet comme étant « intrusif » ou «expropriateur» ; impressions observées souvent dans les initiatives similaires dans d’autres régions.
* Motivation professionnelle et historique
Les cadres natifs, longtemps témoins d’études sans suite, seront naturellement plus mobilisés à œuvrer pour la réussite du projet.
La zone dispose d’un réservoir important de diplômés chômeurs et de retraités expérimentés.
* Bonne gouvernance et cohésion sociale
La participation des cadres natifs de la zone à la gestion et au suivi du projet permettra de :
* Orienter les investissements vers les zones les plus pertinentes
* Garantir une meilleure compréhension des réalités sociologiques et environnementales du milieu
* Préserver la paix sociale dans une zone composée de groupes et de sensibilités diverses.
Conclusion
A notre avis, la réussite du Projet de mise en valeur de Tamourt-Naaj repose sur deux fondements majeurs :
1. La préservation et la valorisation des ressources hydriques (les affluents)
2. La mobilisation des ressources humaines locales, tant au niveau communautaire qu’au niveau des cadres
En plaçant les habitants et les compétences locales au centre de l’action, le projet pourra garantir son efficacité, sa stabilité et son inscription dans une dynamique sociale et environnementale inclusive, harmonieuse et durable.
Ahmed Dah MOHAMED ABBA
Consultant, Expert-Comptable
Membre ONEC-RIM




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