
Les prochains mois, les prochaines trois années et sans doute au-delà de 2029, la Mauritanie vivra une période d'inconnues sur le plan intérieur et extérieur.
Sur le plan intérieur, la visite du Président Ghazouani a révélé et confirmé que le régime était en fait un régime profondément tribaliste, népotique et gabegiste. ..Les discours du Président étaient une reconnaissance tacite que son système était miné de l'intérieur et au plus haut niveau de la hiérarchie par les tares.... Sa mise en garde contre ses plus proches collaborateurs était un signal fort. La question qui se pose est de savoir si c'était juste un moment de crise psychologique et de remords, d'autoflagellation face au peuple, question de se démarquer et de se faire bonne conscience.... ou le début d'un réel revirement à 380 degrés qui va être suivi de mesures drastiques. Ce qui intrigue, c'est que l'homme a attendu la deuxième année de son dernier mandat pour se rebiffer... N'est-ce pas un peu tard? Au regard du passé lointain et récent des tergiversations débonnaires du président pour enclencher une réelle lutte contre la gabegie, la corruption et l'incurie....cette envolée verbale inattendue contre le tribalisme risque de n'être que piètre rodomontade si elle n'est pas suivie d'actes...Dans le même temps Ghazouani n'est- il pas en train de s'engluer dans une situation qu'il a contribué lui-même à créer et encourager depuis son arrivée au pouvoir en 2019? En effet, pour affronter l'ancien président Mohamed ould Abdel Aziz, il avait fait flèches de tous bois en ouvrant grandes les portes au consensus au prix de fermer les yeux sur la gabegie, le tribalisme, le népotisme, le racisme....bref toutes les déviances....Il avait laissé ses collaborateurs se comporter à leur guise, devenir de vrais apparatchiks, s'entourer de cours chacun, s'enrichir sur le dos de l'Etat, enrichir leurs ramifications familiales, tribales et sociales, avoir leurs pions, leurs journalistes, leurs flagorneurs, leurs officiers, leurs policiers, leurs politiciens...leurs hommes d'affaires....La grande question est de savoir comment il va détricoter tout cela avant 2029...
En aura- t- il les moyens et le temps ? L'Etat profond se sentira- t- il assez menacé dans son existence, sa survie pour tenter de le freiner dans ses soudaines ardeurs que certains assimileraient peut-être à la trahison, au poignard dans le dos...?
Une donne politique reconfigurée
Sur quelles forces Ghazouani va-t-il s'adosser pour engager sa mue réelle ou feinte? Les fébriles réactions à ses discours dans le Hodh Charghi, la mise en garde des islamistes de Tawassoul contre tout tripotage de la constitution, le signal donné par Biram comme quoi il voit d'un bon œil les intentions de Ghazouani et pourrait envisager de participer au dialogue, le silence de la classe politique traditionnelle qui guette une porte d'entrée pour s'y engouffrer sont l'expression de la gestation d'une reconfiguration de la donne politique qui n'est qu'à ses débuts. Personnellement, je doute fort que le dialogue puisse se tenir dans cet imbroglio. Si Ghazouani accepte malgré tout d'y aller, il sera alors astreint de payer une fois de plus le prix cher d'un nouveau consensus.
Tout ceci se déroule au moment où la paupérisation des populations, l'enrichissement illimité d'une poignée de familles, la chute de l'ouguiya, l'approfondissement de la fracture sociale, les risques de tensions violentes...l'émigration de la jeunesse, la démoralisation de la société, l'emprise des stupéfiants sur les jeunes, la déperdition scolaire, la dégradation de l'état sanitaire des populations sont le lot quotidien des mauritaniens...Cette situation intérieure n'est pas moins inquiétante que les inconnues de notre environnement régional et sous-régional...Certaines chancelleries surveillent à la loupe ce qui se passe chez nous. Notre gaz, notre or, nos terres rares, notre uranium...ne laissent indifférents ni les Emirats, ni la France, ni les pays européens, notre positionnement géostratégique, au cœur du Maghreb et du Sahel, fait de notre pays un point névralgique dans les conflits mondiaux actuels et le mouvement des populations.
Certes une baraka nous accompagne et nous a jusqu'à présent évité le pire...néanmoins tous les ingrédients existent pour nous faire basculer de manière imprévisible vers ce pire. Ce n'est pas la fatuité de certains flagorneurs de service qui doit nous empêcher d'être sur nos gardes.
Imam Cheikh




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