
Onze partis de l’opposition ont déposé leur proposition commune, dite « feuille de route », auprès du facilitateur au dialogue national en gestation, monsieur Moussa Fall. Celle-ci est fruit du travail d’une commission technique qui y a planché depuis quelques mois, s’appliquant à synthétiser les propositions des divers partis concernés. Aussitôt après sa désignation au titre de coordinateur du dialogue national, Moussa Falll avait demandé à l’ensemble des partis politiques reconnus, aux anciens candidats à la présidentielle et à toutes les personnes-ressources pouvant apporter une valeur ajoutée aux débats, de lui faire parvenir des propositions. Elles devraient tourner autour des questions à débattre, des attentes, de la durée du conclave, des participants, ainsi que du mécanisme de mise en œuvre et de suivi des recommandations. Dans la foulée, Moussa s’est évertué à rencontrer les leaders des partis politiques et autres personnalités-ressources, recueillant ainsi directement, auprès de certains, leurs propositions.
Les uns et les autres se sont alors tant bousculés au siège de la coordination du dialogue qu’on a pu penser que Moussa et son équipe allaient produire rapidement une feuille de route à soumettre à tous. Un premier draft fut divulgué mais le rendez-vous avec la presse fut reporté. Visiblement, le facilitateur prenait son temps, continuant à recevoir et écouter les acteurs politiques. Lors de sa première rencontre avec la presse, il avait d’ailleurs annoncé qu’il prendrait tout le temps nécessaire pour bien préparer le dialogue voulu par le président de la République. C’est de celui-ci lui-même qu’il avait reçu, disait-il, un mandat clair et carte blanche pour baliser le terrain et réussir un dialogue inclusif, sans sujet tabou.
Querelle de leadership ?
Durant plusieurs mois, la commission technique composée de onze partis politiques de l’opposition a donc passé en revue toutes les propositions de ses membres pour en tirer un document-synthèse, signé par l’ensemble des membres de ces partis. Mais, à la veille de la signature par les différents membres, la commission technique a convoqué une assemblée générale pour valider le document et arrêter les modalités de sa remise, le même jour, au facilitateur du dialogue. Tous les membres pouvaient assister à cet évènement. Libre à tout un chacun de prendre la parole ou non. Or quelques membres ont émis des réserves sur la manière de remettre ledit document, ce qui a occasionné un grand retard sur le timing prévu (voir le détail de ce contre-temps plus loin). Signalons ici que la commission technique est présidée par le président des Forces Progressistes de changement (FPC), parti qui court derrière sa reconnaissance officielle depuis plus de dix ans.
Enfin signé le mercredi 24 au siège de l’UFP, le document concerne essentiellement l’organisation du dialogue. Il évoque les objectifs de celui-ci, les thèmes à débattre, les participants, le déroulé des travaux déclinés en deux phases – avant et après mise en œuvre –, les mécanismes de cette dernière (base légale, inclusion des parties prenantes, rattachement institutionnel, présidence de la commission nationale chargée de faire appliquer les décisions du dialogue). Si le travail s’est déroulé dans un esprit de consensus des assemblées générales régulières, quelques divergences avaient apparu, comme dit tantôt, à la veille de la cérémonie de paraphe du document. Un des partis de l’opposition – en l’occurrence, Tawassoul, en collaboration avec le parti SAWAB – voulait déposer seul la feuille de route concoctée par la commission technique, parce que, tout simplement, il préside l’institution de l’opposition démocratique (IOD), un organe dont le rôle et la place sont ignorés par les pouvoirs publics. Mais la commission technique a été instituée par une assemblée générale des partis de l’opposition, ce qui dépasse de loin l’IOD. Les membres de l’opposition saluent toutefois le travail réalisé, à travers un consensus des assemblées générales. On se rappelle que l’ancien premier Ould Bilal avait sommé l’IOD de ne plus recevoir, au sein de son siège, les partis politiques non-reconnus par l’État… Ces partis se sont même opposés, un temps, à la présence de la presse dans la salle, lors de la cérémonie de signature de la feuille de route mais celle-là y a été finalement acceptée. En fin de compte, le document a été déposé auprès du coordinateur sans la participation de quelques partis de l’opposition. Dans ces conditions, ceux-ci joueraient-ils collectif avec le reste de l’opposition, lors du dialogue ? C’est la question que certains observateurs se posent.
Dalay Lam