
Le gouvernement mauritanien a approuvé trois importantes mesures à caractère économique et, surtout, social. Coup sur coup, le PM a ordonné, en ce début de mois de Juin, la régularisation des centaines de travailleurs non permanents de la SOMELEC et adopté un projet de décret ouvrant la porte à l’obtention de logements pour les enseignants. Tous ont évidemment apprécié ces décisions et, on les a vus, comme toujours en pareil cas, sortir manifester et remercier le président de la République, oubliant, tout de même, que c’est le devoir de celui-ci de s’acquitter de sa mission citoyenne. Répondant aux aspirations légitimes de centaines d’employés dont beaucoup galèrent vraiment, le gouvernement n’a fait que corriger des dysfonctionnements intolérables. Nombre d’employés de la société d’électricité, comme bien d’autres en d’autres boîtes publiques, vivent quasiment au jour le jour, sans contrat et souvent sous-payés. Avec une telle épée de Damoclès pesant sur leur tête, certains se risquent à céder à des offres « douteuses ».
Comme la SNDE et d’autres gros établissements publics, la SOMELEC emploie un nombre important de travailleurs temporaires choisis sur le tas, grâce à des pistons et autres bras longs. Certains réussissent à décrocher des contrats, d’autres passent des années sans changer de statut ni sortir de la précarité. La décision du gouvernement vient donc mettre à l’abri moult chefs de familles qui disposeront désormais, en plus d’un traitement amélioré, d’une assurance-maladie. Ce n’est pas rien : nul ne l’ignore, la santé coûte trop cher et rares sont des familles capables de faire face aux charges qu’elle occasionne. Ce sera aussi l’occasion, pour les employés pourvus de qualifications et d’expérience attestées, de gravir les échelons et, partant, aspirer à assumer des responsabilités.
Un toit pour les ‘’garayas’’
Dans la foulée de la précédente décision, le gouvernement a adopté un projet de décret permettant aux enseignants de disposer de logement. Entrant dans le processus d’amélioration de leurs conditions de vie et de travail, cette décision constitue une réponse à une vieille doléance de nos « éternels grognards ». À chacune de leur manifestation, ils ne cessaient de réitérer, non seulement l’augmentation de leur salaire, primes et indemnités, mais également l’octroi de logements. Les compensations pécuniaires que l’État leur octroie restent à leurs yeux trop dérisoires au regard de leur salaire et, surtout, du coût de location d’un logement décent. Pour « arrondir les angles », comme on le dit, de nombreux enseignants courent derrière les écoles privées de la capitale et de l’intérieur du pays ; d’autres sont taximen ou revendeurs de cartes de crédit, ce dernier métier cependant devenu très peu lucratif.
En plus des enseignants et du personnel de la SOMELEC, le gouvernement a également décidé de régulariser la situation des pigistes des media publics, radio, télévision, agence mauritanienne d’information et autre télédiffusion de Mauritanie. Ces établissements publics en emploient de nombreux, notamment des retraités vivant dans des conditions difficiles, tant est dérisoire leur pension de retraite, comme celle de tout fonctionnaire public et qui peut même cumuler des retards de paiement. On rappelle que cette revendication des pigistes figurait en bonne place dans les nombreuses doléances exprimées par les syndicats et fut prise en compte dans le rapport de la commission de réforme de la presse. Lors de la fête du 1er Mai dernier, ceux-là n’ont pas manqué de toutes les réitérer et l’actuel ministre de la Culture, anciennement directeur de la HAPA et syndicaliste bien au courant de la situation du personnel des media, a visiblement su porter et défendre le dossier auprès des autorités.
Comme dit tantôt, le personnel non-permanent de la SOMELEC, les pigistes des media publics et les enseignants ont tous bien accueilli les décisions gouvernementales. Pour exprimer leur satisfaction, ils ont organisé des manifestations marquées par la présence de hauts responsables de l’État et au cours desquelles ils ont salué la décision ‘’courageuse et salvatrice’’ du président de la République, loué l’équité et la justice qui ont marqué la conduite des affaires publiques sous son magistère. La question que l’opinion se pose désormais est de savoir si les actes posés par le gouvernement profiteront aux autres catégories socio-professionnelles, victimes du tâcheronnat et de bien d’autres formes d’exploitation. Certaines sociétés privées doivent être elles aussi invitées à faire des efforts pour améliorer les conditions de leur personnel dont elles sucent le sang. Nombre de ces employés, dans les services de sécurité, par exemple, mais aussi d’entretien, de nettoyage, de domesticité ou de conduite de véhicule, peuvent travailler des dizaines d’années avec des salaires de misère, sans contrat ni assurance-maladie. Les syndicats doivent procéder à un recensement exhaustif de ces entreprises et le soumettre au Premier ministre pour qu’il s’en occupe, cas par cas. Le gouvernement doit en même temps accélérer le processus d’amélioration des pensions de retraite de tous les travailleurs dont certains vivent dans la précarité. Bref, l’équité et les ressources de l’État doivent profiter à tous. En posant ces actes, le Premier ministre prouve, d'une certaine manière, sa capacité à prendre des mesures audacieuses qui compteront dans le bilan de son mentor, le président Ghazouani. Ce faisant, il marque des points face aux potentiels candidats à la prochaine présidentielle. Il en a le pouvoir. Pourquoi s’en priverait-il ?
Dalay Lam